Erdogan, nouveau sultan ottoman
par Francoise Monestier.
Premier invité élyséen pour l’année 2018, Recep Tayyip Erdogan peut être satisfait et même content de son voyage parisien. Il a montré, en se rendant en France, que la Turquie était loin d’être isolée sur le plan international et que le coup d’Etat manqué de l’été 2016 (un « don d’Allah » selon ses propres mots), réprimé avec la violence que l’on sait, l’avait définitivement installé dans ses babouches de nouveau sultan d’un Empire ottoman ressuscité. En acceptant l’invitation d’Emmanuel Macron qui a ainsi rejoué la même partition qu’avec Poutine l’été dernier, Erdogan a souhaité également faire un pied de nez à Angela Merkel avec laquelle il est en froid, et montrer, en même temps, que notre pays était son nouveau terrain de conquête pour la diaspora turque. Calcul cynique et intelligent de la part de celui qui veut étendre ses réseaux islamistes en France et reconstruire le khalifat dans son propre pays.
« Dans l’Europe et avec l’Europe »
Alors que la Turquie est en pleine dérive autoritaire et que des centaines de milliers de ses citoyens – officiers, enseignants, journalistes – croupissent en prison, il a été reçu, ainsi que son épouse Emine, qui joue en Turquie un rôle comparable à celui de Brigitte Macron en France, avec tous les fastes dus à son rang. Certes, il a reçu les aimables remontrances d’Emmanuel Macron qui a ainsi tenu sa promesse d’évoquer les atteintes aux droits de l’homme en Turquie. Certes, les Identitaires ont déployé des banderoles hostiles, les Kurdes ont défilé dans le centre de Paris et les Femen se sont dépoitraillées comme à leur habitude. Certes, il n’a pas obtenu le feu vert de Macron pour une reprise du processus d’adhésion de la Turquie à l’Union européenne, mais il a reçu l’assurance, pour en finir avec « l’hypocrisie » européenne, d’un vrai partenariat avec Bruxelles. Il s’est surtout entendu confirmer par Emmanuel Macron que « la finalité, c’est de préserver l’ancrage de la Turquie et du peuple turc dans l’Europe et de faire en sorte que son avenir se construise en regardant l’Europe et avec l’Europe ».
Le nouveau sultan d’Ankara ne pouvait rêver meilleur souhait pour son peuple, déjà bien présent dans de nombreux pays d’Europe, tant la diaspora turque est importante, qu’il s’agisse de notre pays, de la Scandinavie ou de l’Allemagne. Est-ce pour fêter cela qu’il a rencontré en toute intimité des membres éminents de la communauté turque de France, dont le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), son compatriote Ahmet Ogras ?
Un drôle de paroissien à la tête du CFCM
Ahmet Ogras est né à Konya, la ville des derviches tourneurs. Arrivé à l’âge de trois ans à Vendôme, il suit une scolarité française et seconde son imam de père, à la tête d’une des mosquées de la ville. Proche du clan Erdogan, cet ingénieur de 46 ans nourrit de vives sympathies pour les Frères musulmans. Il est également main dans la main avec la Dinayet, l’organisme turc qui dirige les imams du pays. Il a longtemps fait partie de l’UDTE, une association liée à l’AKP qui fut très active, en 2012, en organisant des manifestations violentes contre la loi pénalisant en France la négation du génocide arménien.
Après les attentats de janvier 2015, invité d’une chaîne de télévision, Ahmet Ogras devait affirmer, péremptoire, que « l’islam radical n’existait pas » et que « l’on ne pouvait ni tuer ni égorger au nom de l’islam ». Et c’est ce pèlerin qui a été élu à la proportionnelle, en juin 2017, par les délégués des fidèles musulmans, comme président du CFCM. Un organisme créé en 2003 par un certain Nicolas Sarkozy pour représenter l’islam de France, et qui, en fait, sert de couverture aux représentants des courants majoritaires de l’islam pour diriger leurs communautés. On comprend, dès lors, les raisons pour lesquelles Erdogan a souhaité sonder les reins et les cœurs de sa communauté. En 2015 déjà, lors d’un rassemblement à Strasbourg, il avait harangué plus de 12 000 concitoyens lors d’un discours retransmis en direct en Turquie. Et ne parlons pas du Parti Egalité et Justice, émanation pure et simple de l’AKP erdoganienne qui a présenté ses premiers candidats aux législatives françaises de juin dernier.
Vers un nouvel impérialisme ?
Cette volonté affichée de renouer avec la tradition d’un Empire ottoman disparu, on la retrouve, par exemple, dans un discours tenu en mars 2017 par Erdogan à Eskischir, discours dans lequel il appelait les Turcs de la diaspora à faire de nombreux enfants afin d’inverser la courbe démographique des pays d’accueil.
Un problème que connaissent bien les Belges qui comptent de nombreux élus, maires ou députés, d’origine turque dont certains ont scandalisé par leurs dérapages religieux. C’est ainsi que le parti socialiste flamand a dû se séparer, après le coup d’Etat militaire avorté de 2016, d’un élu qui invoquait publiquement Allah.
Lors d’une récente visite officielle en Grèce – la première depuis 1952 – à l’invitation du désastreux Tsipras, Erdogan a exigé la révision du traité de Lausanne de 1923 qui définit, après la non-application du traité de Sèvres, les frontières de la Grèce et de la Turquie ainsi que les droits des minorités chrétiennes de Turquie (sévèrement malmenées…) et de la minorité musulmane de Thrace qui compte plusieurs députés et revendique de pouvoir élire ses imams, nommés par l’Etat grec.
Lors d’une intervention particulièrement musclée à la mosquée principale de Komotini, Erdogan a carrément appelé les musulmans de Thrace – grecs de papiers – à la désobéissance civique et s’est à nouveau présenté comme le père de « tous les Turcs ». Dernière victoire turque : alors que huit officiers turcs avaient trouvé refuge en Grèce et demandé – au grand dam d’Ankara – l’asile politique après le coup d’Etat de 2016, Tsipras vient de mettre un genou à terre en annulant la décision de la justice grecque qui avait refusé leur extradition.
L’arme des clandestins
Erdogan gagne finalement sur tous les tableaux car il tient l’Europe, et plus particulièrement la Grèce, en otage avec les millions de clandestins (dont quelques vrais réfugiés) qui ont franchi les frontières de la Turquie en 2015. Le tout avec l’exigence d’une rançon de trois milliards d’euros. Le flot s’est quelque peu tari dès que l’Europe s’est pliée aux exigences financières du sultan qui continue cependant à envoyer sur l’île de Lesbos des contingents d’envahisseurs. Il peut donc, à tout moment, déclencher le feu démographique sur cette vieille Europe qu’il déteste par-dessus tout, lui qui veut venger la défaite ottomane à Vienne.
Article publié dans les colonnes du quotidien Présent.
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