14 décembre 2017

« L’an prochain à Jérusalem »

Par Richard Dessens

 

Donald Trump vient de respecter l’une de ses promesses de campagne, comme l’avaient fait d’ailleurs tous ses prédécesseurs depuis que le Congrès américain avait voté en 1995 le fait que Jérusalem devienne la capitale de l’État d’Israël. Rien de vraiment étonnant donc dans la décision de Trump, avalisée depuis 22 ans par le Congrès et promise par tous les présidents américains… sans résultat jusqu’alors.

C’est la manière qui déplaît à nos élites, car les manières de Trump déplaisent par principe, et quoi qu’il affirme, même si c’est dans la lignée d’un vote démocratique antérieur, il est violemment critiqué. Mais rien d’étonnant que la puissante communauté juive aux USA, représentée par le gendre même de Trump, ait pesé pour que celui-ci concrétise une ancienne décision américaine.

D’ailleurs, le Huffington Post, dans un récent article dithyrambique et lourdement argumenté, défend la décision de « Jérusalem Capitale ». Tout comme le CRIF et le Consistoire en France demandent à Macron de soutenir la décision… en plein débat sur la laïcité, notons-le au passage. Benjamin Netanyahu, lui, jubile… en apparence tout du moins, en critiquant vertement la position de l’Europe qui condamne la décision de Donald Trump. Condamnation en réalité modérée lorsqu’elle est assortie d’une demande de « discussions » pouvant aboutir à une Jérusalem capitale des deux États !

Toute cette agitation tantôt sournoise, tantôt gênée, en tout cas souvent hypocrite, est très inquiétante pour le Proche et le Moyen Orient, mais aussi pour l’Europe.

Tout d’abord les positions officielles anti-Trump de l’Europe ne vont qu’envenimer des relations déjà tendues sur le fond d’un conflit vieux de 70 ans qui entretient un feu latent ou explosif au Proche-Orient avec des ramifications au Moyen-Orient.

Ensuite, la Russie, traditionnelle défenderesse de la position palestinienne, risque, elle aussi, de raviver de vieilles querelles en permettant à Vladimir Poutine de se repositionner encore plus au plan international vis-à-vis des USA. D’ailleurs Vladimir Poutine rencontre lundi 11 le président Erdogan, dont on connaît déjà l’opposition tranchée à la décision de Trump, pour en discuter.

Enfin des désaccords surviennent en Europe même. La Tchéquie, par exemple, soutient la position de Trump ajoutant, comme d’autres avec un sens de la nuance douteux, que Jérusalem « Ouest » peut être la capitale d’Israël si Jérusalem « Est » est celle de la Palestine ! Or, les appellations même « Est » et « Ouest » ont toujours été rejetées par les Palestiniens.

L’imbroglio revient en force dans cette affaire où les jugements de Salomon pullulent en ôtant toute sortie possible au conflit en cours qui vient de se raviver à nouveau.

Imposer un « État » israélien en 1948 n’a jamais été admis dans la région et l’épine israélienne alimente un conflit sans fin. Quant à affirmer comme beaucoup de politiques et de « spécialistes » que la solution appartient aux acteurs locaux (Israël et la Palestine, mais aussi l’Arabie Saoudite, la Jordanie ou la Syrie sans négliger l’Iran), c’est une pirouette et un « lavage de main » risible s’il n’était l’aveu d’une impuissance dramatique camouflant un soutien réel à Israël.

Cette région est sous le feu des intégristes musulmans de Daesh, des rivalités entre Chiites et Sunnites, sur la toile de fond des questions énergétiques et des luttes de pouvoir entre USA et Russie entre autres. Renforcer la puissance d’un État déjà surarmé et nucléarisé, sur le plan politique en faisant de Jérusalem, ville hautement symbolique pour les trois religions du Livre, la capitale d’Israël, constitue une provocation inouïe de nature à déstabiliser à nouveau gravement la région déjà à feu et à sang.

Quelle aubaine pour la propagande des islamistes radicaux ! En outre, les dissensions à l’intérieur de l’Europe ne peuvent que s’en trouver aggravées, surtout face à une UE anti-Trump, aux solutions bâtardes impossibles et ambiguës.

Peut-on encore ajouter que les relations de l’Europe avec le monde arabe n’en sortiront pas grandies, malgré des positions apparemment ambiguës elles aussi d’un certain nombre de pays arabes.

L’enchaînement risqué des évènements devant une telle situation explosive est de nature à provoquer des conflits imprévisibles aujourd’hui, des positions opposées des États européens et un redoublement des attentats sur le sol européen. L’UE nous montre encore une fois son incapacité à s’imposer, ses atermoiements craintifs et son absence de consistance politique.

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Philippe Randa,
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