25 décembre 2022

« Les inquiétantes lacunes des professeurs des écoles… » (Le Figaro)

Par Jean-Pierre Brun

Quelles sont-elles ? Peut-on les combler ? Si oui, comment ?

Fainéant comme je suis, je ne me sens pas un seul instant passer ma vieille cervelle à l’alambic pour pondre le moindre texte sur ce sujet rebattu depuis des lustres. En revanche le Créateur m’a doté d’une solide mémoire. Mémoire dont j’ai abusé au cours de mon slalom universitaire entre les piquets de coin d’un terrain de football et les piges dans des organes de presse compatissants. Thémis était une bonne fille ! Mémoire que je sollicite pour reconstituer le parcours scolaire édifiant du petit paysan qu’était mon père et qui permet d’éclairer, chichement peut-être, le débat ainsi rouvert pour la nième fois.

Dans son village drômois, alors que mon grand-père usait ses godillots sur la Voie Sacrée quelque part du côté de Verdun, il écoutait religieusement un modeste instituteur. Un comble pour cet insatiable bouffeur de curé qui n’imaginait pas devenir un jour professeur des écoles. Il se contentait d’être un maître. Dans une classe conforme à celle évoquée par Alain Fournier dans « le Grand Meaulnes », il devait instruire concomitamment la trentaine d’élèves de cette école de campagne.

Pour ce hussard de la république il ne fallait laisser personne sur le bord du chemin du savoir. Il se glissait inlassablement entre les bancs pour se consacrer à ceux qui éprouvaient des difficultés à suivre. Pendant ce temps les élèves qui avaient assimilé la leçon traitaient des exercices individuels supplémentaires appropriés pour parfaire leur maîtrise du sujet. C’est à ce prix qu’il obtenait une cohésion certaine et de bons résultats malgré la modularité des niveaux, du cours préparatoire au « certif libérateur ».

La journée d’enseignement achevée, les élèves se retrouvaient en étude. Il s’agissait pour les gamins de faire leurs devoirs sous le regard attentif du maître qui pouvait alors pallier quelque carence de compréhension repérée. Les plus rapides disposaient de la bibliothèque de la classe pour occuper ce temps libre providentiel. Mon père me disait qu’il avait élargi ses connaissances en lisant les romans de Jules Verne et en localisant sur un atlas géographique les pérégrinations de leurs héros.

L’argument des origines sociales des élèves perdait beaucoup de sa pertinence. L’impact de l’illettrisme paternel ou maternel était ainsi considérablement atténué. Le fils de l’ouvrier agricole, comme le fils du propriétaire terrien étaient matériellement traités égalitairement. L’armoire aux articles scolaires était là pour y veiller avec ses manuels, ses cahiers, ses buvards, ses crayons, ses porte-plumes « sergent-major » …

C’était une époque heureuse pour le corps enseignant. L’instituteur partageait le respect des populations avec le maire et le curé. La punition magistrale distribuée rigoureusement n’était jamais contestée par un père qui, le plus souvent, n’hésitait pas à rajouter la sienne. Faut-il préciser que la palette desdites punitions était exclusivement pédagogique (les copies des conjugaisons, des tables de multiplication et des leçons mal apprises en constituaient la base).

Les agents scolaires n’existaient pas. Des tours de services impliquaient les élèves. Le froid venu, il appartenait aux plus grands d’allumer le poêle à bois. Pour ce faire, ils devaient se lever plus tôt. Les encriers étaient remplis précautionneusement par les plus petits, de cette encre violette préparée dans une bouteille au bouchon verseur, à partir d’une dose pulvérulente. Vider les corbeilles à papier, effacer à grande eau le tableau noir et l’approvisionner en bâtons de craie, c’était leur quotidien.

L’ordre régnait dans le local en général et dans les pupitres individuels inspectés régulièrement. L’hygiène élémentaire n’était pas oubliée. Les mains sales allaient immédiatement goûter aux vertus rafraîchissantes des lavabos en tôle émaillée installés dans la cour et les ongles « en deuil » subissaient le blanchiment instantané d’un canif.

L’ascenseur social n’était pas inventé et pourtant…

La fin de la solide scolarité de mon père approchait. Alors que bon nombre d’hommes politiques continuaient à dénoncer l’alliance entre le sabre et le goupillon, le farouche anticlérical n’hésita pas à franchir les portes du presbytère, bien décidé à user de sa férule magistrale pour convaincre le cureton à remplir au plus tôt son seau d’eau bénite afin de l’aider à faire aboutir son projet.

« Il ne faut pas gâcher les talents de Marie Brun. Allons voir sa famille pour qu’elle consente à laisser le petit poursuivre ses études. »

Bras dessus, bras dessous, ils se rendirent à la ferme familiale où ils eurent tôt fait de convaincre ces braves paysans qui n’en attendaient pas tant.

C’est ainsi que mon père se retrouva interne au collège des Maristes de Bourg de Péage… et que, en 1962, il termina sa carrière comme ingénieur en chef à la SNCF.

À défaut d’avoir été poussé dans l’ascenseur social qui restait à concevoir, un humble enseignant l’avait mis sur de bons rails.

Tout bien réfléchi, dans un court instant de lucidité, je doute de la pertinence de cette évocation qui ne concerne que l’histoire familiale d’un ratiocineur sénile.

P.S. Avez-vous écouté « Mademoiselle » l’une des dernières chansons de Julien Clerc ?

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