Les « Écrits » de Napoléon Ier
S’il existe encore des Français qui s’adonnent à la lecture, car l’espèce Homo lectorus est en voie de disparition, la réponse ne peut être qu’affirmative et avec enthousiasme !Comment en douter ? L’homme fut un géant de l’histoire européenne, l’un des deux seuls hommes d’État que la France ait connue depuis la fin de l’Ancien Régime (Raymond Poincaré étant le second, le pays attendant toujours désespérément un improbable troisième).
La première surprise que révèle la réédition des Écrits de Napoléon Bonaparte (Éditions Dualpha) concerne l’homme privé. Il fut un grand amoureux, la légende nous l’avait appris. Il fut également, et ce livre nous le fait savoir, un grand écrivain de lettres d’amour, tour à tour passionné, émerveillé, jaloux, colérique, mais toujours tendre. Ce héros était un véritable grand homme parce qu’il était fondamentalement bon. Les historiens universitaires, rarement subtils, nous l’avaient caché. Ses lettres nous le révèlent.
Les notes napoléoniennes nous montrent ce que doit être le grand homme de guerre, le véritable génie stratégique. Il doit maîtriser l’art d’enthousiasmer ses hommes. Il doit se préoccuper, avant tout, de créer et d’entretenir d’excellentes voies de communications, et de soutenir son effort de guerre par l’édification d’une puissante industrie. Qui a lu les écrits du grand empereur comprend que Jomini, le théoricien de la stratégie qui paraît le plus original durant la première moitié du XIXe siècle, n’a fait que répéter ce qu’il avait appris auprès de Napoléon Ier qu’il a trahi, comme tant d’autres, en 1813.
Dans ses lettres et ses discours à bâtons rompus ici reportés fort intelligemment (car le choix des textes a été fort soigneux), Napoléon Bonaparte révèle sa véritable vocation, celle d’être l’homme qui bâtit les fondations de l’État, mais également les piliers de la société, pour les générations suivantes. De fait, non seulement la France, mais nombre de pays européens, dont la Belgique et l’Italie, conservèrent une structure étatique de type napoléonien jusqu’aux années 1960, c’est-à-dire jusqu’aux prémices de la décomposition de la puissance européenne.
Parmi les leçons que nous donne ce géant de la pensée politique, et dont il faudra tenir compte lorsqu’on établira enfin l’union des peuples européens après la débâcle de la société mondialiste, l’on peut en retenir deux.
Une nation qui se respecte (et un chef d’État digne de ce nom) doit accepter et glorifier son passé : pas d’avenir possible s’il n’est ancré dans les traditions nationales ou continentales.
La seconde, aussi essentielle que la première leçon, est que l’unité de l’Europe ne pourra se faire qu’en surmontant les égoïsmes nationaux (et Napoléon n’avait pas tort de conspuer l’égoïsme britannique… l’on ne saurait trop assurer qu’il ait disparu de nos jours !).
En 1810, l’empereur dit du « Français type » qu’il a plus d’esprit que de caractère et pratiquement pas de principes. On pourrait inverser les termes pour qualifier « l’Allemand type ». C’est sur la complémentarité du Français et de l’Allemand que l’on a voulu édifier la Communauté Européenne. L’expérience du demi-siècle passé prouve que ce schéma était trop réducteur : le salut ne peut venir que de la fusion des peuples de l’Europe de l’Est et de ceux de l’Europe de l’Ouest.
À Tilsit, Napoléon avait espéré se faire du tsar Alexandre Ier un allié, mais il ne comprit pas qu’il fallait pour cela l’autoriser à reprendre Constantinople et à chasser le Turc, musulman, d’une Europe où il n’avait rien à faire. D’autres têtes vides, depuis, ont commis la même erreur, ne tenant pas compte des erreurs passées.
Il reste à saluer le style du grand homme. La phrase napoléonienne, si différente de la phrase gaullienne romantique et redondante, est concise, vigoureuse, atteignant souvent la puissance de l’aphorisme.
Éternels pour le fond, puissants par la forme, tels apparaissent les écrits de ce météore de l’histoire de l’Europe.
Écrits, Napoléon Bonaparte, Éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire » dirigée par Philippe Randa, Présentation d’Octave Aubry, de l’Académie française, postface de Bernard Plouvier : « L’empereur Napoléon Ier et le Führer Adolf Hitler : Comparaisons historiques », 266 pages, 27 euros. Pour commander ce livre, cliquez ici.
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