UE-Russie : lutte pour l’hégémonie culturelle
La politique, notamment internationale, est d’abord une question de rapport de forces. L’Union européenne, même abritée derrière le paravent prétendument vertueux des droits de l’homme et de l’irénisme démocratique, n’en échappe pas moins à la logique d’affrontement, notamment à l’égard des puissances qu’elle estime aux antipodes de ses « valeurs ».
Il en va ainsi de ses rapports avec la Russie de Vladimir Poutine. Au mois d’octobre, la commission des affaires étrangères du Parlement européen a adopté une résolution « sur la communication stratégique de l’Union visant à contrer la propagande dirigée contre elle par des tiers ». À sa lecture, on voit que les parlementaires désignent leurs ennemis, dans l’acception schmittienne du terme, à savoir la Russie et l’État islamique.
La lecture de cette résolution est particulièrement intéressante en ce qu’elle tend à faire reconnaître que les « ennemis » de l’Union européenne lui mènent « une guerre d’information », « dans le but d’instiller le doute, de paralyser le processus décisionnel, de discréditer les institutions de l’Union aux yeux et dans l’esprit des citoyens, et de ronger les valeurs occidentales et les liens transatlantiques. »
C’est finement observé et, bien plus, doit-on admettre que les parlementaires prennent véritablement la mesure d’un problème qu’ils jugent suffisamment grave, moins pour ce qu’il représente intrinsèquement, que pour ses effets particulièrement corrosifs et démobilisateurs sur une opinion publique européenne de plus en plus eurosceptique.
Néanmoins, cette alerte parlementaire à destination de l’exécutif de Bruxelles est révélatrice de la guerre culturelle que se livrent, depuis 1945, les États-Unis et la Russie.
En concédant être « gravement préoccupé par le développement rapide de l’activité russe en Europe ayant pour but d’étendre l’influence et l’hégémonie russes », nos européistes professionnels soulèvent en creux, d’une part, que l’Europe est, quant à elle, passée depuis longtemps sous domination US, d’autre part, qu’elle est incapable, par elle-même, de se départir d’un tel paradigme culturel. Cette inaptitude à proposer un modèle civilisationnel alternatif démontre, s’il en était encore besoin, que l’Union européenne, tout en se réclamant de l’Europe, n’en reflète aucunement l’identité polymorphique.
Mais il convient, au surplus, de savoir raison garder. Nos oligarques commencent, certes timidement, à instaurer une dictature douce, en empêchant l’accès à certains sites internet, motif pris, un peu trop facilement, de la lutte contre le terrorisme, notion entendue – pour les besoins de la cause – très largement. C’est dire que, sous couvert de guerre contre la propagande extérieure, l’UE se livre, en réalité, à une autre guerre, plus insidieuse, mais réellement liberticide, contre ses propres peuples.
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