Cuba la rouge : rafraîchissons les mémoires…
Cette « île crocodile », surnommée ainsi en raison de sa forme géographique, et de l’élevage que l’on y fait de ce « charmant » animal – peut-être aussi une allusion aux vieux caciques du Parti communiste qui tirent les ficelles en coulisse – est entre les mains des kleptocrates du clan Castro depuis 1959 et sa révolution de la Saint Sylvestre.
Un faux romantisme
Tout avait pourtant bien commencé. Les photos du jeune chef rebelle et de ses maquisards de la Sierra Maestra, cartouchière en bandoulière et fusil à la main, faisaient le tour du monde, et attiraient la sympathie de tous, y compris et surtout celle des Américains (qui voulaient se débarrasser à bon compte, comme à Santo-Domingo avec Rafaël Trujillo, d’un caudillo devenu « trop encombrant »). Pensez, un jeune avocat rebelle qui plus est barbu comme un révolutionnaire du XIXe siècle, face à un vieux dictateur, le général Fulgencio Batista, c’était vendeur. Un pur descendant de Galicien (1) contre un sang-mêlé.
Paris-Match, pour ne citer que cette revue qui fut jadis un grand magazine, en fit des tonnes. Mais bien vite, le nouveau pouvoir allait montrer son vrai visage, celui hideux d’une dictature communiste. Le jeune intellectuel avait bien trompé son monde. Très rapidement, de nombreux Cubains furent contraints à l’exil pour échapper à la sanguinaire épuration menée avec un zèle criminel par un certain médecin argentin, Guevara, qui allait se faire mondialement connaître sous le nom du « Che ».
Les États-Unis, sous le magistère de Kennedy, tentèrent bien de renverser Castro, mais l’expédition de la « Baia dos cochones », la « Baie des Cochons », en 1961, tourna à la catastrophe. Le « parrain » américain des révoltés cubains laissa tomber ses protégés qui finirent, pour les plus chanceux, dans les geôles castristes de l’île des Pins, au grand dam des exilés de Floride. Déjà, à cette époque, les pénuries de produits courants commençaient à pointer leur nez, et l’embargo US n’arrangeait rien.
D’années en années, les files s’allongeaient devant des magasins aux rayons quasiment vides, comme dans la Roumanie de Ceausescu. Le système monétaire reposait sur deux jambes, le peso local et le dollar, quasi officiel, la monnaie de l’ennemi !
Les Cubains, qui voulaient s’acheter des chaussures ou des vêtements corrects de marques étrangères, devaient solliciter la complicité des touristes pour pouvoir s’approvisionner dans les seuls magasins réservés à ces derniers, le tout payé avec les billets « verts », bien sûr ! Vingt ans après la « geste » du Movimiento 26 de julio et du yacht Granma, à bord duquel Castro avait clandestinement quitté les côtes mexicaines pour débarquer dans l’Oriente, ça « tournait vinaigre » à La Havane.
Une île sous écrou, le troc avec les Soviétiques !
Les Cubains n’avaient pas encore reçu l’autorisation d’ouvrir leur maison à des étrangers afin de pouvoir y faire une sorte d’activité « bed and breakfast » pour améliorer l’ordinaire. Les chauffeurs de taxi acceptaient, en douce, de se faire payer la course en monnaie étrangère, le Dollar de préférence, et se cachaient littéralement le visage au moment de la transaction. Ambiance ! On ne risquait pratiquement aucune agression, rien, un policier en uniforme étant de garde statique, tous les cinquante mètres. C’était et c’est là, le seul avantage d’une dictature pour un touriste. Cuba a toujours eu la réputation d’avoir un bon système de santé. Vrai ou faux, elle a exporté ses médecins un peu partout dans le tiers-monde, histoire de se faire de la « pub » à bon compte. Le régime castriste, un autre rare bon point, fut de faire accéder le pays à un bon niveau scolaire. Vous me direz, comparé à celui de la France, il n’y a pas un grand mérite au classement Pisa !
L’île caraïbe vendait son sucre à l’URSS à un prix supérieur au marché, et cette dernière lui vendait du carburant en dessous du prix du marché. En échange de quoi ? Cuba fournissait la chair à canon alimentant les entreprises guerrières des Soviétiques, notamment en Afrique. Comme beaucoup de Cubains sont noirs ou mulâtres, les Russes pensaient que les Cubains seraient mieux acceptés qu’eux ou que leurs complices est-allemands par les populations locales. Un calcul qui ne s’est pas avéré tout à fait juste, notamment en Angola.
Là aussi, si les Américains avaient joué le jeu de la carte occidentale, au lieu de laisser tomber les Sud-Africains qui y menaient une vaste offensive à partir de la Namibie – coordonnée avec les milices de l’UNITA de Jonas Savimbi – ce vaste pays lusophone où la crème de la colonisation portugaise s’était échinée, ne serait pas tombé entre les mains des marxistes.
Bref, ne refaisons pas l’histoire, mais nombre de cercueils revenaient au pays de la rumba et du mambo. L’aventure « néocoloniale » du satrape Castro commençait à coûter cher à Cuba. La population murmurait : cette guerre « anti-impérialiste » conduite par procuration au bénéfice du « Grand frère », ne faisait pas les affaires du petit peuple. Cette partie de la population hostile au communisme ne pouvait pas faire grand-chose, chaque quartier, chaque maison étant encadrée par des membres des CDR, les Comités de défense de la révolution. C’est-à-dire un mouchard qui notait tout, les va-et-vient des uns et des autres – qui venait, qui sortait – bref, une espionite aiguë à grande échelle, une malsaine activité qui n’a pas cessé un seul jour.
L’éruption !
C’est tout ça qui est ressorti, qui a explosé les semaines dernières, avec le manque de victuailles et de perspectives d’avenir. Sans le communisme, Cuba pourrait être une île riche, largement capable de rivaliser avec la République dominicaine au plan touristique, pouvant mieux exporter ses produits tropicaux, son tabac, installer des « maquilladoras » comme au Mexique…
Bref retrouver, à terme, le niveau de vie qu’elle avait AVANT, quoique l’on puisse dire du régime corrompu et délictueux de Batista. Il est vrai que sous son règne, La Havane, c’était la ville des tripots, de la prostitution et des gangsters américains. Pourtant cette dictature assurait, tout de même, un assez bon niveau de développement à l’île. Laquelle était, dans les années cinquante, classée parmi les pays d’Amérique latine – avec l’Argentine et le Venezuela – en tête du peloton.
Avec la chute de l’URSS en 1991, tous les avantages marchands que tirait Cuba de ses relations avec la grande Russie, sont allés progressivement dans le panier des souvenirs « heureux », même si Moscou entendait conserver Cuba comme un pion dans le jeu qui l’oppose aux États-Unis. Obama, au grand dam des exilés cubains de Floride, avait reconnu le gouvernement communiste et ouvert une ambassade dans l’île. Actuellement, il semble que Joe Biden lève progressivement les sanctions qui pourrissent la vie des îliens. Ce qui n’a pas fait baisser pour autant la pression dans la marmite. Mais tout de même, la levée progressive de l’embargo et la fourniture de pétrole iranien ou vénézuélien, vont desserrer un peu l’étau qui étreint La Havane.
Mais le peuple cubain en a assez de cette dictature qui ne lui offre aucune perspective d’avenir, pas plus que du pain. Les pièces détachées des « belles Américaines » qui font la fierté des Cubains, manquent, et les transports en commun, dans certains endroits, ont eu recours aux chevaux ! Il n’y a aucun espace de liberté, les gens qui ont pu fuir ne reviendront pas et, grâce à leurs dons, mettent sous perfusion les membres de leur famille restés au pays.
Les camps de prisonniers sont plus abondants en locataires que les produits de première nécessité dans les épiceries ou les pharmacies. Les tickets de rationnement, plus d’un demi-siècle après la révolution, sont toujours de mise. La pandémie,-qui n’est certes pas du fait du régime – assèche le tourisme qui amenait des devises. Donc, des milliers et des milliers de Cubains sont descendus dans la rue pour manifester contre le pouvoir. Ce dernier n’a pas fait dans la dentelle, faisant tirer ses troupiers à balles réelles, et invitant ses partisans à contremanifester. Des morts, des arrestations, de quoi rafraîchir l’ardeur protestataire.
Le nazisme a disparu, mais le « cadavre » communiste bouge encore !
Et dire qu’il y a encore, dans la France de 2021, des gens pour se réclamer du marxisme. Il y a même un olibrius qui veut se présenter à l’élection présidentielle sous l’égide du parti au marteau et à la faucille ! Au fou !
On avait pu penser qu’avec la mort de Fidel Castro en 2016, son remplacement par son frère Raoul, puis la démission de celui-ci en 2019 au bénéfice de Miguel Diaz Canel – un apparatchik du Parti communiste cubain, le PCC – l’étreinte mortifère allait se relâcher. Que nenni, le visage des dirigeants change peut-être, mais la matière est la même, la pâte dont ils sont faits est identique. Et le pire pour nous, est de voir en Occident des jeunes crétins porter un t-shirt à l’effigie de Che Guevara, ce tueur congénital, que Castro avait expédié au Congo ex-belge et en Bolivie pour exporter sa révolution. Il finit comme il avait commencé, dans la violence, à savoir, tué comme un chien par des rangers dans la selva bolivienne.
Tout a été faux dans cette révolution cubaine frauduleusement nimbée d’un halo de « romantisme ». Il n’y a eu rien de « romantique ». Ce n’était pas Lamartine en 1848 ! Fidel Castro a trompé son monde. Et certains fidèles l’ont quitté. Bien mal leur en pris, comme Hubert Matos ou Camilo Cienfuegos, fidèle parmi les fidèles, qui périt mystérieusement en octobre 1959, dans un étrange accident d’avion (2).
Si dans « le cochon tout est bon », comme le dit un dicton populaire, dans la révolution cubaine tout, ou presque, est à rejeter.
Notes
(1) Ce qui explique l’étrange complicité entre une Espagne franquiste à la tête de laquelle régnait un certain général Franco, lui-même Galicien, et un satrape communiste d’ascendance galicienne !
(2) L’avion, ce mystérieux tueur de célébrités (Atelier Fol’Fer) et Pronunciamiento sous les tropiques (Dutan), du même auteur. Pour commander ces livres, cliquez ici.
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