27 mars 2020

Chronique médiatique du confinement au 26 mars

Par Euro Libertes

ALORS QUE LES FRANÇAIS COMMENCENT À S’HABITUER TANT BIEN QUE MAL AU CONFINEMENT, CETTE PÉRIODE DE RÉCLUSION ADMINISTRÉE POURRAIT DURER PLUS LONGTEMPS QUE LES 15 JOURS ANNONCÉS INITIALEMENT. CETTE DRÔLE DE GUERRE DÉCRÉTÉE PAR LE PRÉSIDENT MACRON EST RICHE EN ACTUALITÉ. AVEC LE PRÉSENT ARTICLE, L’OJIM RELÈVE QUELQUES ÉLÉMENTS SAILLANTS DANS L’ACTUALITÉ DES MÉDIAS. LE CROISEMENT DES SOURCES ET LA JUXTAPOSITION DES ÉLÉMENTS PERMETTENT DE RELEVER DES CONTRADICTIONS ET DES OPPOSITIONS DANS LA « GUERRE » CONTRE LE VIRUS, PAS FORCÉMENT RELEVÉES PAR LES MÉDIAS DE GRAND CHEMIN. CETTE CHRONIQUE EST UN POINT D’ÉTAPE AU 26 MARS.

LES FRONTIÈRES VRAIMENT FERMÉES ?

Au plus fort de l’épidémie du coronavirus en Chine, la quasi absence de contrôle des Chinois arrivant par avion en France avait ému l’opinion publique. Le 26 janvier, Ouest-France nous apprend que cela étonnait déjà certains voyageurs. Tout comme le déplacement à Lyon le 26 février de milliers de supporters italiens à l’occasion d’un match de football. Le gouvernement français a été un des derniers pays européens à annoncer la « fermeture » des frontières intérieures du pays, comme le relayait France Info le 16 mars. Des personnalités politiques soulignent notamment sur Twitter qu’ils ont demandé cette mesure depuis longtemps, sous les railleries du Ministre de la santé et de nombreux médias, notamment du Monde et du Figaro. Pas de mea culpa en vue pour le moment…

La réalité des contrôles aux frontières annoncés par le ministre de l’intérieur semble un angle mort des médias. C’est dans les réseaux sociaux que des particuliers témoignent récemment de l’absence de contrôle à la frontière franco-allemande et à l’aéroport de Roissy en provenance d’Asie.

UN CONFINEMENT À GÉOMÉTRIE VARIABLE

Si les frontières françaises semblent bien poreuses et échapper aux contrôles sanitaires, le confinement imposé aux Français est à géométrie variable. Alors que le JDD nous informe que 104 villes ont instauré un couvre-feu, cette mesure qui vise à interdire tout déplacement la nuit ne serait pas en Seine-Saint-Denis « la réponse adaptée » selon la Préfecture, citée par Le Parisien. Les maires de ce département, très majoritairement de gauche, ne seraient pas « demandeurs ». Le quotidien régional ne rappelle pas que 10% des infractions aux règles de confinement y ont été relevées. Même décision (ou absence de décision) à Trappes où des incidents violents ont pourtant eu lieu depuis le début de la période de confinement. Réagissant au non-respect du confinement dans certains quartiers, Michel Onfray écrit sur son blog :

« Il suffit qu’une centaine de tribus de ces zones perdues refuse le confinement pour que la totalité du confinement ne serve plus à rien pour le reste des Français ».

DES RÉQUISITIONS PLUS PRIORITAIRES QUE D’AUTRES

RFI souligne que le confinement est impossible pour les sans-domicile-fixe en France, notamment pour les « milliers de migrants, dont le quotidien dépend des associations ». Pour que celui-ci soit appliqué par tout le monde, y compris par les sans-domicile-fixe, l’État a annoncé le 19 mars la réquisition de chambres d’hôtel, nous informe L’Union.

Il n’aura échappé à personne que la France subit une immigration massive depuis plusieurs années. Certains migrants dorment dans des bâtiments squattés et des campements de fortune. À Rennes, reprenant au bond l’annonce du gouvernement, la maire invite dès le 18 mars l’État à réquisitionner des hôtels pour y loger des migrants, selon Ouest-France. Ceci alors que 850 migrants sont déjà hébergés par la municipalité à l’hôtel, nous apprend le quotidien régional.

La Croix souligne le 19 mars que 500 migrants vivent dans des tentes à Paris. Ils seront bientôt « mis à l’abri ». La France semble se transformer en une vaste terre d’asile incapable de soigner tous ses citoyens. Info migrants nous apprend que quatre gymnases ont été ouverts, afin d’héberger familles, mineurs étrangers et réfugiés. Un terme euphémique pour désigner des clandestins. D’autres ouvertures sont prévues, mais « il manque de travailleurs sociaux ».

Le 23 mars, alors que BFMTV couvre une visite du Président Macron dans un hôtel dont des chambres ont été réquisitionnées, le directeur de l’hôtel parle de « poudrière » à cause du confinement et de « communautés ». Grand moment de gêne, BFMTV et le président Macron passent rapidement à un autre sujet.

La lutte contre le coronavirus ne passe pas que par la réquisition de chambres d’hôtel et la « mise à l’abri » dont le président Macron s’est fait le champion. D’autres réquisitions sont nécessaires, mais n’ont pas encore été faites au 24 mars. Il y aurait des réquisitions plus prioritaires que d’autres peut-être.

CNews nous apprend le 22 mars que des anesthésistes réanimateurs du privé demandent à être réquisitionnés. Le même jour, c’est la Fédération des hôpitaux privés qui demande que les hôpitaux privés soit réquisitionnés selon le HuffPost, afin d’épauler l’hôpital public arrivé en certains endroits à saturation.

DES TESTS POUR LES « HAPPY FEW »

Sur les réseaux sociaux, des personnalités politiques — notamment la secrétaire d’État Emmanuelle Wargon et Michel Barnier — évoquent leur résultat au test du coronavirus. Un vrai exercice de transparence et d’humanité. Ils ont été testés positifs. De nombreux commentaires sur Twitter sont acerbes, comme celui de Gilles Sacaze : « Merci de ces bonnes nouvelles Monsieur Barnier. Sincèrement et respectueusement ravi pour vous. Une petite pensée pour nos concitoyens qui ont les mêmes symptômes, mais qui rentrent chez eux en famille, sans avoir été testé (faute de test) sans masque (faute de masque)… ».

DES MASQUES EN ABONDANCE

Le 10 mars, le ministre de la santé affirme qu’ « il n’y a pas de pénurie de masques » de protection, nous informe France Info. La radio d’État nous donne un autre motif de satisfaction : « les gels hydroalcooliques ne connaissant pas non plus de pénurie ». Comme le dit l’expression, c’est l’hilarité générale sur les bancs de l’assemblée. Une semaine plus tard, le 18 mars, le directeur général de la santé modère ces annonces. Il affirme que le gouvernement achemine vers les pharmacies plus de 12 millions de masques. Il ajoute, selon Le Point« plus d’une dizaine de millions de masques vont aussi être livrés vers les hôpitaux ».

Cela n’empêche pas des professionnels de la santé de continuer à se plaindre du manque de masques. Comme ce médecin qui pose nu pour dénoncer le manque de protection, selon Ouest-France le 24 mars.

«  En même temps », un reportage de France Bleu nous apprend que des masques en quantité abondante sont disponibles en Chine, mais que pour des raisons de lourdeur administrative en France, leur acheminement en France n’est pas organisé. Pour pallier cette inertie mettant en danger les soignants et la population, « LVMH offre 10 millions de masques et Bouygues 1 million  (…) dans les prochains jours » selon Capital le 23 mars. Une affaire rondement menée.

Le journaliste de Médiapart Fabrice Arfi relaie sur son compte Twitter une communication de l’ambassade de France à Hong Kong concernant la prévention de la contamination, bien différente de celle en vigueur en métropole : outre les gestes barrière, « les armes en sont simples : portons un masque, conformons-nous scrupuleusement aux règles de quarantaine pour ceux qui ont voyagé récemment ».

DES PRISONNIERS ET DES CLANDESTINS LIBÉRÉS PAR MILLIERS

Le Monde nous informe que des clandestins détenus dans des centres de rétention sont progressivement libérés. Le gouvernement semble abandonner l’objectif d’expulser ceux qui se maintiennent illégalement sur le territoire, dans une indifférence générale.

La libération des délinquants ne concerne pas que les clandestins. Selon le site actupenit.com le 23 mars, la ministre de la justice va autoriser la libération de 5 000 détenus en fin de peine. Des instructions seraient également données pour l’on ne « mette pas à exécution les courtes peines d’emprisonnement ». L’objectif serait de « désengorger les prisons » en cette période de confinement. Le Figaro a recueilli la réaction d’un officier de terrain. Il craint que ces mesures « ne viennent encore étoffer une faune déjà bien vénéneuse ».

Alors que l’on s’apprête à libérer une « faune vénéneuse », ce sont les Français qui font une entorse aux règles de confinement qui pourraient se retrouver en prison. C’est en tout cas ce que veut la ministre de la justice. Le respect du confinement au domicile est une priorité pour la ministre de la justice. Lors du débat parlementaire sur l’état de siège sanitaire, elle plaide pour que les infractions répétées aux règles de confinement soient lourdement sanctionnées. « Six mois d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende » nous apprend LCI. Un député rappelle à la Garde des Sceaux que… « les prisons sont pleines ». La Ministre, tout à son empressement de libérer les délinquants, revient finalement sur son objectif d’incarcérer ceux qui enfreignent les règles de confinement.

UNE COMMUNICATION SURABONDANTE

Alors que le budget de l’État et des départements dédiés à l’immigration a considérablement augmenté ces dernières années, il n’en est pas de même pour l’hôpital public. À chacun ses priorités. Un scientifique présente sur le blogue Anthropo-logique l’évolution du nombre de lits en soins intensifs en France depuis 1998. Non seulement ce nombre ne fait que baisser, mais il place la France à l’avant dernier rang dans le classement des 5 pays retenus. Dans ces conditions, la pandémie actuelle sature les structures hospitalières publiques. La construction d’un hôpital de fortune à Mulhouse fait l’objet d’un abondant storytelling dans les journaux télévisés. Chaque étape du montage des tentes est présentée. Ce qui amène un abonné à Twitter à faire ce commentaire :

« Chine : 10 jours pour construire un hôpital de 1 000 lits.
Macron : 15 jours pour construire 5 pauvres tentes de 30 lits ».

Les communications calamiteuses de la porte-parole du gouvernement font l’objet le 23 mars d’une vidéo lors de l’émission Quotidien. Elle met en lumière de nombreuses contradictions, contrevérités et un manque certain d’anticipation.Les éléments de langage guerriers choisis par le Président de la République lors de son allocution télévisée le 16 mars sont repris par le staff gouvernemental. Sur CNews le 23 mars, le fait de voir le Président sans masque et sans distance de sécurité lors de ses déplacements étonne les intervenants. Un journaliste cite des propos tenus à l’Elysée :

« Il va falloir vous habituer à voir le président de la république au contact sur le terrain, c’est Clemenceau dans les tranchées ». Personne sur le plateau n’a l’outrecuidance d’évoquer un costume trop grand pour le président Macron…

Il y aurait tant à dire encore sur les réactions médiatiques face à, en vrac : la polémique entre les États-Unis et la Chine sur l’origine du virus ; la stratégie de plus en plus décriée des autorités françaises de confinement sans recours massif aux tests et à l’isolement des personnes contaminées ; les modalités du recours à la chloroquine par les autorités françaises, etc. Mais il faut en garder pour les prochains jours. En cette « drôle de guerre », il y a fort à craindre que tant la communication que la stratégie du gouvernement dans la lutte contre le coronavirus soient une source inépuisable d’étonnements par médias interposés… À suivre.

Article paru sur le site de l’OJIM.

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