17 février 2018

L’Action française est morte ! Vive le roi (quand même) !

Par Aristide Leucate

Triste début d’année pour la presse française. Avec couronne (mortuaire, celle-là), mais sans fanfare, l’on annonçait la fin de parution de L’Action française, l’un des plus vieux journaux de France (1908) avec Le Figaro (1826) et L’Humanité (1904).

Action française 2815

Sa disparition n’a ému personne parmi l’édition germanopratine stipendiée de la rive gauche (sans oublier la rive droite, non moins bénéficiaire privilégiée de la manne publique). Excepté Libération et Valeurs actuelles qui lui consacrèrent un entrefilet lapidaire, aucun autre titre ne s’est avisé de rendre compte de ce qui apparaît tout de même comme un évènement tellurique.

Seul le dernier né, catholique et conservateur, L’Incorrect, dirigé par le bernanosien « anarchrist », Jacques de Guillebon, prononça une brève oraison sincère et attristée : « Le numéro 2971, daté du 1er février, sera le dernier d’une aventure qui avait commencé, sous un autre format, en 1908. Le journal, qui paraissait ‘‘provisoirement les premier et troisième jeudis de chaque mois’’, était en effet le successeur du quotidien fondé par Maurras dix ans après les débuts de l’Action française, et qui s’était illustré par sa profondeur, politique et littéraire, comme par sa virulence. […] En souhaitant un prompt retour du journal royaliste, on peut lui dire avec les mots du même Bernanos : ‘‘A Dieu, l’AF 2000. À la douce pitié de Dieu’’» (1er février).

Depuis l’avènement d’Internet, les heures de la presse écrite sont comptées et celles-ci deviennent de plus en plus blafardes particulièrement pour la presse dextero-conservatrice ou nationaliste.

Combien sont partis rejoindre les cimetières des souvenirs désormais enfouis dans les entrailles des archives de la Bibliothèque nationale ? Fin décembre 2017, La Nouvelle Revue d’Histoire fondée par Dominique Venner et, après la mort de celui-ci, reprise par l’universitaire Philippe Conrad, tirait, sans bruit, elle aussi, sa révérence.

À chaque fois, la même antienne : ces satanés problèmes financiers qui prennent à la gorge. Injustice rendue d’autant plus insupportable que d’autres se gobergent aux frais du contribuable (qu’ils insultent copieusement à longueur d’ondes ou de colonnes) ou s’avilissent prostitueusement devant les puissants, les magnats et autres publicitaires cosmopolites. L’inégalité de traitement est patente, mais cela fait des lustres que la rentabilité concurrentielle s’est substituée au pluralisme réel.

Comme nous le disions, bien peu se pressèrent aux funérailles (fussent-elles uniquement de plumes, ce qui eût été déjà assez) du journal à la fleur de lys.

Parmi les « nôtres », une seule voix dissonante, celle de l’hebdomadaire de l’opposition nationale et européenne, le très radical et impétueux Rivarol, ose une explication qui vient rompre le flot mutique et pudique des larmes de deuil. Pour l’éditorialiste, « il faut aussi s’interroger sur la pertinence de la ligne éditoriale. Tout n’est pas la faute des autres ou de la malchance. Il faut ainsi reconnaître que L’Action française 2000 n’avait hélas plus grand-chose à voir avec le journal dirigé par Maurras. Certes les temps ont changé et les lois répressives font qu’il est plus difficile de s’exprimer aussi librement que sous la IIIe République. Mais il reste toujours possible, moyennant quelque habileté, d’appeler un chat un chat et de dire la vérité. »

Enfonçant le clou, le même considère que l’« on ne peut découper en tranches la pensée du maître de Martigues. Elle forme un tout cohérent. Sa critique radicale de la démocratie, de la République maçonnique est inséparable de sa position sur la question juive. L’une ne va pas sans l’autre. L’une s’explique par l’autre. L’une découle de l’autre » (7 février 2018).

La pusillanimité, sinon la pondération émolliente et convenue de sa ligne éditoriale aurait-elle eu définitivement raison de l’AF dont le message, il est vrai, avait de moins en moins à voir avec l’orthodoxie maurrassienne des origines, le journal ayant tenté d’opérer sa mue pour apparaître comme l’équivalent d’Éléments dans la presse d’opinion hexagonale ? Jusqu’à l’affadissement de son verbe, jusqu’à l’amollissement de son ton ?

Philippe Mesnard, ci-devant rédacteur en chef du seul bimensuel vendu à la criée, selon l’ancienne tradition des camelots du roi, semblait en convenir à demi-mot devant les rédacteurs : « Il y a sans doute mille raisons pour expliquer cet arrêt : la crise de la presse, l’absence de publicité, les difficultés inhérentes au royalisme français (vivace à proportion de ses divisions !), la cherté de la vie, que sais-je ? Ma ligne éditoriale, bien sûr. J’ai osé le mot “clic” et me suis permis de parler d’Israël comme Boutang en parlait. Il ne s’agissait pas de viser en permanence les vieilles cibles faciles, ni de célébrer avec une ridicule nostalgie des combats qui n’avaient plus de sens, mais de regarder ce qui se passe et ce qui s’annonce – puisque nous vivons un moment de décomposition aussi désespérant qu’enthousiasmant. »

vente Action Française criée

À la notable différence de la plupart de ses confrères spécialisés dans l’information générale – y compris, même, L’Humanité dont l’exigeant cahier des charges imposé par ses financiers, n’autorise évidemment plus les violentes diatribes antiétatiques et anti-bourgeoises des anciens temps stalinolâtres – l’AF, bien qu’autonome par rapport au mouvement éponyme de la rue Croix-des-Petits-Champs, demeurait toujours dans l’esprit de ses journalistes comme de ses responsables, l’organe du nationalisme intégral, indissociable, par là même, du royalisme maurrassien explicitement revendiqué par ledit mouvement – ainsi qu’en témoigne, par exemple, l’utilisation de son logotype fleurdelisé jaune et bleu.

Dès lors, ne fallait-il pas poursuivre avec abnégation et loyalisme dans la voie du martèlement inconditionnel de la doctrine au risque, cependant inévitable et périlleux, de la figer, tel un dogme immarcescible ? Fallait-il, d’ailleurs, continuer à égrener le lourd chapelet de ces illustres patronymes, Maurras, Daudet, Bainville, Pujo, à une époque frappée d’une incommensurable amnésie à l’évocation de leur souvenir ou de leurs œuvres quand ils n’exhalent pas l’intenable odeur de soufre de la reductio ad hitlerum – le biographe du Martégal, Olivier Dard, ayant justement souligné que « sur le plan du débat d’idées, Maurras n’est plus une référence, mais tout juste un opprobre » ?

Et le royalisme, défendue comme nécessité logique par Maurras, est-il même encore audible au XXIe siècle ? Et de quel royalisme parle-t-on, à la veille des 230 ans de la Révolution française, quand nos compatriotes, s’ils ressentent confusément un indescriptible vide politique que la classe politicienne actuelle est bien incapable de remplir, en tiendraient peut-être davantage pour une monarchie, sinon une monocratie ?

Avec la disparition du plus célèbre et du plus ancien journal royaliste de France – en attendant celle, aisément et malheureusement prévisible, de quelques rares titres qui subsistent et résistent –, ce n’est pas qu’une page de plus de notre histoire intellectuelle et politique qui se tourne, mais bien un changement d’ère qui s’annonce ; celle de l’omnipotence technicienne invasive, celle de l’omniprésence d’un capitalisme résilient, celle d’un consumérisme hédoniste qui évacue jusqu’à la mort comme limite (c’est-à-dire comme mesure) ontologique de l’existence, celle d’une déterritorialisation exponentielle que renforce le nomadisme industriel du tourisme et de l’immigration de masse, celle de l’autodestruction spirituelle et civilisationnelle de l’homme blanc européen. Toutes ces techniques postmodernes d’arraisonnement du monde et de leur corollaire, son affligeante crétinisation, rendent grotesquement obsolescent tout maurrassisme d’essence attique, classique et contre-révolutionnaire.

L’Action française n’est plus. Vive le roi ! (quand même…)

EuroLibertés : toujours mieux vous ré-informer … GRÂCE À VOUS !

Ne financez pas le système ! Financez EuroLibertés !

EuroLibertés ré-informe parce qu’EuroLibertés est un média qui ne dépend ni du Système, ni des banques, ni des lobbies et qui est dégagé de tout politiquement correct.

Fort d’une audience grandissante avec 60 000 visiteurs uniques par mois, EuroLibertés est un acteur incontournable de dissection des politiques européennes menées dans les États européens membres ou non de l’Union européenne.

Ne bénéficiant d’aucune subvention, à la différence des médias du système, et intégralement animé par des bénévoles, EuroLibertés a néanmoins un coût qui englobe les frais de création et d’administration du site, les mailings de promotion et enfin les déplacements indispensables pour la réalisation d’interviews.

EuroLibertés est un organe de presse d’intérêt général. Chaque don ouvre droit à une déduction fiscale à hauteur de 66 %. À titre d’exemple, un don de 100 euros offre une déduction fiscale de 66 euros. Ainsi, votre don ne vous coûte en réalité que 34 euros.

Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

Quatre solutions pour nous soutenir :

1 : Faire un don par virement bancaire

Titulaire du compte (Account Owner) : EURO LIBERTES
Domiciliation : CIC FOUESNANT
IBAN (International Bank Account Number) :
FR76 3004 7140 6700 0202 0390 185
BIC (Bank Identifier Code) : CMCIFRPP

2 : Faire un don par paypal (paiement sécurisé SSL)

Sur le site EuroLibertés (www.eurolibertes.com), en cliquant, vous serez alors redirigé vers le site de paiement en ligne PayPal. Transaction 100 % sécurisée.
 

3 : Faire un don par chèque bancaire à l’ordre d’EuroLibertés

à retourner à : EuroLibertés
BP 400 35 – 94271 Le Kremlin-Bicêtre cedex – France

4 : Faire un don par carte bancaire

Pour cela, téléphonez à Marie-France Marceau au 06 77 60 24  99

Partager :