Entretien avec NikolaĂŻ Starikov, Ă©crivain russe, journaliste dâopinion, activiste social et co-prĂ©sident du Parti de la Grande-Patrie: « Si les politiciens occidentaux sâinquiĂ©taient vraiment de la possibilitĂ© dâune guerre et voudraient lâĂ©viter, ils auraient Ă©tabli une ceinture dâĂtats indĂ©pendants en Europe centrale. »
En mai, Ferenc AlmĂĄssy a eu lâoccasion de rencontrer NikolaĂŻ Starikov, qui Ă©tait Ă TimiĆoara, pour prĂ©senter son livre « La nationalisation du rouble â La voie vers la libertĂ© de la Russie ». Une bonne occasion dâavoir une petite conversation avec un intellectuel et politicien patriotique russe pour mieux comprendre le point de vue des Russes sur les pays dâEurope centrale et orientale.
Ferenc AlmĂĄssy : Dâabord, je voudrais vous remercier pour cet entretien. Nous avons lâoccasion de nous rencontrer Ă TimiĆoara, oĂč vous avez lancĂ© la promotion de lâĂ©dition roumaine de votre livre « La nationalisation du rouble â La voie vers la libertĂ© de la Russie ». Je commencerais par une premiĂšre question : comment vit-on en Russie, dans une dĂ©mocratie illibĂ©rale ?
NikolaĂŻ Starikov : Vous avez posĂ© la question clĂ©. Dâun cĂŽtĂ©, en utilisant le mĂ©canisme du marchĂ©, Poutine a rĂ©ussi Ă rĂ©tablir une part importante du pouvoir de lâĂtat en Russie et Ă rĂ©tablir la position de la Russie sur la scĂšne internationale. Aujourdâhui, la situation en Russie est contradictoire, dâune part nous avons une politique Ă©trangĂšre puissante et sĂ»re dâelle. Dâun autre cĂŽtĂ©, en Ă©conomie interne, nous avons suivi le systĂšme Ă©conomique mondial amĂ©ricain. Mon opinion est que les opportunitĂ©s offertes par le modĂšle Ă©conomique libĂ©ral ont Ă©tĂ© Ă©puisĂ©es. Nous avons besoin dâune nouvelle politique Ă©conomique et de nouvelles personnes capables de lâappliquer. Je veux souligner que lorsque je parle de nouvelles personnes, je veux dire, nouveau Premier ministre, nouveaux gouverneurs, de nouvelles forces politiques. Ceux-ci doivent complĂ©ter lâactivitĂ© du PrĂ©sident, que je considĂšre comme lâun des meilleurs politiciens de lâhistoire de la Russie.
FA : Vous ĂȘtes le prĂ©sident de votre propre parti, le Parti de la Grande-Patrie. Cela signifie-t-il que vous voulez gagner le pouvoir ou que vous voulez travailler avec Vladimir Poutine, une personnalitĂ© que vous semblez apprĂ©cier ?
NikolaĂŻ Starikov : La politique est lâart du possible et toute force politique est créée pour accĂ©der au pouvoir. Nous approuvons la politique de Vladimir Poutine, notre PrĂ©sident. Toutefois, nous sommes opposĂ©s Ă la politique Ă©conomique mise en place par le gouvernement. LâĂ©volution du processus politique au cours des derniĂšres dĂ©cennies peut ĂȘtre rĂ©sumĂ©e comme suit : aprĂšs la chute de lâUnion soviĂ©tique, les «ultra-libĂ©raux» sont arrivĂ©s au pouvoir. Toutes leurs actions nâĂ©taient pas destinĂ©es au bien de la Russie mais Ă celui des Ătats-Unis. En raison des actions de Poutine, ces âultra-libĂ©rauxâ ont Ă©tĂ© remplacĂ©s par des patriotes libĂ©raux. Ils sont prĂȘts Ă sâopposer aux AmĂ©ricains en matiĂšre de politique Ă©trangĂšre, mais ils ne sont pas prĂȘts Ă avoir une politique intĂ©rieure souveraine. Cela conduit Ă une situation dangereuse, dans laquelle lâengagement dâune politique intĂ©rieure souveraine devient impossible parce que notre Ă©conomie est nĂ©gativement affectĂ©e par son cours libĂ©ral. Ă mon avis, nous avons besoin de nouvelles personnes et de nouvelles forces politiques pour changer la politique intĂ©rieure du pays. Je qualifierais ces forces de patriotiques, parmi lesquelles je compte, bien sĂ»r, le Parti de la Grande-Patrie.
FA : Votre parti est prĂ©sentĂ© comme un âparti de la dĂ©fenseâ russe, mais dans les mĂ©dias occidentaux en particulier, la Russie est prĂ©sentĂ©e comme une agresseuse et non comme une victime, et il y a plusieurs exemples : la CrimĂ©e, le Donbass, lâexercice Zapad, les provocations dans les pays baltes. Alors, la Russie est-elle vraiment dans une situation dĂ©fensive ?
NikolaĂŻ Starikov : Analysons les faits. De 1945 Ă 1990 en Europe, il y avait deux Ătats allemands. Cela veut-il dire quâil y avait deux peuples allemands diffĂ©rents ? Bien sĂ»r que non. En 1990, un Ătat a englouti lâautre et aujourdâhui nous avons un Ătat allemand uni et un peuple allemand uni. Cela a Ă©tĂ© rendu possible parce que lâUnion SoviĂ©tique, câest-Ă -dire la Russie, a organisĂ© ce processus et ne lâa pas bloquĂ©. Aujourdâhui, nous ne comprenons pas pourquoi lâEurope bloque le mĂȘme type dâintĂ©gration pour le peuple russe. En politique, il est risible de parler de gratitude, nĂ©anmoins on aimerait voir, dâabord en Allemagne et en Europe de lâEst, quâon a laissĂ© choisir son propre destin politique, une certaine forme dâapprĂ©ciation. Pour mieux comprendre notre situation, regardez-la de notre point de vue : Hitler a attaquĂ© lâUnion SoviĂ©tique. Ă cette Ă©poque, trois jours dâavance ininterrompue Ă©taient nĂ©cessaires pour quâun char allemand atteigne Moscou. Aujourdâhui, il y a 350 km de la frontiĂšre russo-ukrainienne Ă Moscou. Des bases militaires amĂ©ricaines dans les pays baltes Ă ma ville natale de Saint-PĂ©tersbourg, il y a moins de 200 km. Aujourdâhui, les AmĂ©ricains, les troupes de lâOTAN, sont beaucoup plus proches de nos centres Ă©conomiques, culturels et politiques. La question est de savoir pourquoi ils se rapprochent et qui est lâagresseur potentiel ? Si les politiciens occidentaux sâinquiĂ©taient vraiment de la possibilitĂ© dâun Ă©clatement de la guerre et voudraient lâĂ©viter, ils auraient Ă©tabli une ceinture dâĂtats indĂ©pendants en Europe centrale. Au lieu de cela, ils ont violĂ© tous les engagements pris envers Gorbatchev, et lâinfrastructure de lâOTAN a Ă©tĂ© accolĂ©e Ă la Russie. Autour de nos frontiĂšres, un soi-disant bouclier anti-missiles est en train dâĂȘtre mis en place. Lorsque nous nous interrogeons sur son objectif, nous sommes traitĂ©s comme des enfants de maternelle et nous nous voyons rĂ©pondre que le bouclier est dirigĂ© contre les missiles iraniens et nord-corĂ©ens. Ăvidemment, si ce bouclier Ă©tait dirigĂ© contre lâIran et la CorĂ©e du Nord, deux prĂ©-requis auraient Ă©tĂ© nĂ©cessaires : premiĂšrement, que ces pays possĂšdent ce type de missiles et deuxiĂšmement, dans ce cas le bouclier aurait dĂ» ĂȘtre placĂ© aux frontiĂšres de la CorĂ©e du Nord et de lâIran, pas en Roumanie, en Bulgarie et en Pologne. Si nous devions suivre cette pseudo-explication proposĂ©e par les politiciens amĂ©ricains Ă lâĂ©poque, le rĂ©armement de lâarmĂ©e russe est entrepris afin de protĂ©ger lâEurope contre une invasion extraterrestre. Peut-ĂȘtre que cela aura lieu. Et nous avons une bonne armĂ©e. Ou peut-ĂȘtre que nous devons nous dĂ©fendre contre les barons de la drogue colombiens.
FA : Vous avez dit que lâEurope centrale devrait ĂȘtre neutre, ĂȘtre une zone tampon. Quelle est votre opinion sur le groupe de VisegrĂĄd et cette rĂ©gion de lâEurope ? Comment voyez-vous la situation actuelle ?
NikolaĂŻ Starikov : Le comportement est diffĂ©rent dâun Ătat Ă lâautre. Le plus inquiĂ©tant est la position de la Pologne. Dâun autre cĂŽtĂ©, nous, en tant que rĂ©alistes, comprenons que les dĂ©cisions politiques en Europe ne sont prises ni Ă Bucarest, ni Ă Budapest ni Ă Varsovie, pas mĂȘme Ă Bruxelles, mais Ă Washington. Par consĂ©quent, notre prĂ©sident essaie de conclure un accord avec ceux qui dĂ©terminent le cours des politiques europĂ©ennes. Mais, au lieu dâun accord, nous voyons le rapprochement des forces militaires vers nos frontiĂšres. Lorsque les pays de lâEurope de lâEst ont adhĂ©rĂ© au TraitĂ© de Varsovie, ils ont Ă©tĂ© confrontĂ©s Ă lâinfrastructure militaire de lâOTAN. Aujourdâhui, parce quâils appartiennent Ă lâOTAN, ils seront automatiquement pris pour cibles par lâappareil militaire russe. Quelle est la diffĂ©rence ? Je ne pense pas que leur sĂ©curitĂ© ait Ă©tĂ© augmentĂ©e en devenant la cible dâune arme nuclĂ©aire diffĂ©rente. La prioritĂ© Ă©tait complĂštement diffĂ©rente : aucune arme nuclĂ©aire ne devrait viser les pays dâEurope de lâEst. Quand les AmĂ©ricains effraient lâEurope avec le pĂ©ril russe, chacun devrait se poser la question suivante : de quoi la Russie a-t-elle besoin de lâEurope ? A-t-elle besoin de territoires europĂ©ens ? Avons-nous des revendications territoriales sur la Pologne, la Roumanie ou la Bulgarie? Nous nâen avons jamais eu. La Pologne a des fantĂŽmes historiques et des griefs contre nous. Nous nâavons aucun grief contre la Pologne. Nous voulons seulement rĂ©tablir lâunitĂ© de notre peuple. Nous ne cherchons pas Ă acquĂ©rir de territoires Ă©trangers.
FA : Cela signifie-t-il que vous voulez reprendre dâautres parties de lâUkraine ou certaines parties des pays baltes oĂč il y a dâimportantes minoritĂ©s russes ?
NikolaĂŻ Starikov : Chaque Ăšre historique dicte ses propres formes dâintĂ©gration. Auparavant, un empire intĂ©grait un certain territoire. Et ce territoire devenait une partie de lâempire en question. Il y avait des Ătats dans une certaine dĂ©pendance des grands empires, mais ils gardaient leur indĂ©pendance. Ă lâĂ©poque, les empires se battaient entre eux en essayant de dĂ©membrer leurs rivaux par la crĂ©ation de petits Ătats « indĂ©pendants » sur le territoire de leurs rivaux, qui finissaient par devenir dĂ©pendants dâun certain acteur gĂ©opolitique. Ă titre dâexemple, aujourdâhui, les Ătats europĂ©ens sont subordonnĂ©s aux Ătats-Unis dâAmĂ©rique. Câest pourquoi nous pouvons affirmer que, dans lâEurope dâaujourdâhui, il nây a pas de vĂ©ritables Etats indĂ©pendants mĂȘme si certains attributs extĂ©rieurs de lâindĂ©pendance tels que le PrĂ©sident, le drapeau national ou le sceau sont conservĂ©s. Personne ne dit que lâEurope fut lĂ©galement occupĂ©e par les Ătats-Unis, mais, en fait, ce sont les AmĂ©ricains qui la dirigent. Câest pourquoi je pense que quand quelquâun affirme que nous voulons inclure des territoires dans notre Ătat, il pense au siĂšcle dernier. Nous voulons rĂ©tablir notre influence sur ces territoires et mettre fin Ă lâinfluence de nos opposants gĂ©opolitiques, en lâoccurrence les Ătats-Unis, qui ont conduit Ă des conflits armĂ©s. Peut-ĂȘtre quâen Europe occidentale, tout le monde ne sait pas que lâUkraine, la Russie et la BiĂ©lorussie sont trois Ătats habitĂ©s en rĂ©alitĂ© par le mĂȘme peuple. LâUkraine nâa pas existĂ© dans lâhistoire. Câest un projet artificiel de lâEmpire austro-hongrois, et il a une date de naissance, la fin du XIXe siĂšcle. Aux Ătats-Unis, les immigrants de ces parties de lâEmpire austro-hongrois imprimaient des journaux. Si vous regardez dans un de ces journaux, vous verrez que jusquâĂ une certaine date, dans la seconde moitiĂ© du XIXe siĂšcle, ils sâappelaient eux-mĂȘmes ruthĂšnes ou russes. Soudainement, dans les mĂȘmes journaux le terme Ukrainiens est apparu. Donc, hier, ils Ă©taient des RuthĂšnes, aujourdâhui ils sont des Ukrainiens. Câest impossible. LâUkraine a Ă©tĂ© créée et elle a Ă©tĂ© approuvĂ©e jusquâĂ aujourdâhui par les AmĂ©ricains afin de devenir un Ătat anti-russe et russophobe. Imaginez quâaux frontiĂšres de la Hongrie, un nouvel Ătat, dont lâidĂ©ologie et le but de lâexistence serait la destruction de la Hongrie, apparaisse. Dans cet Ătat, les habitants seraient hongrois et la langue officielle serait un dialecte hongrois avec un grand nombre de mots allemands et roumains. La langue hongroise serait interdite. Le hongrois ne serait pas Ă©tudiĂ© dans les Ă©coles et son utilisation serait interdite Ă la radio et Ă la tĂ©lĂ©vision. Toute personne ayant le hongrois comme langue maternelle, soit 98% de la population, serait obligĂ©e dâĂ©crire tous les documents dans cette nouvelle langue avec beaucoup de mots Ă©trangers. Et tout cela au milieu dâune Ă©norme propagande qui dit aux gens quâils sont des Ukrainiens et non des Hongrois et que les Hongrois se sont moquĂ©s des Ukrainiens tout au long de leur Histoire. Câest la situation actuelle.
FA : Jâai compris, mais si des millions de personnes disent quâelles forment une nation, qui peut-il leur refuser ce droit ? Les nations aussi naissent et finissent par mourir. Peut-ĂȘtre, dâun certain point de vue, la naissance de la nation ukrainienne peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme artificielle, mais maintenant, elle existe. Et aprĂšs ? Niez-vous le droit des Ukrainiens dâavoir un Ătat ?
NikolaĂŻ Starikov : Ă notre Ă©poque, les gens dĂ©couvrent lâĂ©mergence de nouvelles nations Ă la tĂ©lĂ©vision. On leur dit ces choses. Câest un projet absolument artificiel et des millions de personnes nâont pas leur mot Ă dire. Par exemple, nous pourrions tirer la conclusion quâen 1933, 80 millions dâAllemands ont soudainement dĂ©cidĂ©, pour une raison inconnue, de tuer des Juifs et des communistes et dâoccuper toute lâEurope. Il est Ă©vident que cette dĂ©cision nâa pas Ă©tĂ© prise par des dizaines de millions dâAllemands, mais par un petit cercle de nazis qui sont arrivĂ©s au pouvoir. Câest pourquoi je dis que la dĂ©claration selon laquelle des millions de personnes participent au processus de construction de la nation nâest quâune spĂ©culation politique. Les gens simples sont intĂ©ressĂ©s par des choses simples : ils veulent un bon travail, un bon salaire, ils veulent Ă©lever leurs enfants et vivre en paix. Ils sont inoculĂ©s avec la rage, qui Ă la longue est censĂ©e mener Ă la guerre. Pendant six ans, les Allemands ont Ă©tĂ© inoculĂ©s avec la haine envers les Slaves, les Tsiganes, les Juifs et les communistes. Que sâest-il passĂ© aprĂšs? Les nazis ont amenĂ© les gens Ă tuer sans pitiĂ©. En Ukraine, une propagande similaire est en cours depuis deux dĂ©cennies. Une gĂ©nĂ©ration prĂȘte Ă tuer a Ă©tĂ© Ă©levĂ©e. Aujourdâhui, cette gĂ©nĂ©ration tue des gens dans le Donbass. Il nây a pas de pas combats entre Russes et Ukrainiens dans le Donbass. LĂ , des reprĂ©sentants du mĂȘme peuple se combattent. Il y a des personnes avec un prĂ©nom et un nom totalement russes qui combattent du cĂŽtĂ© de lâUkraine. De mĂȘme, il y a des personnes avec des noms de famille spĂ©cifiques aux rĂ©gions du sud de la Russie combattant pour le compte du Donbass. Ils parlent la mĂȘme langue. Dans la majoritĂ© des bataillons ukrainiens les plus brutaux, le russe est la langue parlĂ©e. Les politiciens ukrainiens parlent seulement ukrainien devant les camĂ©ras de tĂ©lĂ©vision. Une fois que les camĂ©ras sont Ă©teintes, ils recommencent Ă parler le russe, qui est leur langue maternelle.
FA : Je comprends votre opinion sur lâUkraine, mais ne pensez-vous pas que lâEurope centrale, que vous aimeriez voir neutre, est devenue membre de lâOTAN (et lâUkraine veut faire de mĂȘme) parce que la Russie nâa pas bien gĂ©rĂ© fin de lâUnion soviĂ©tique et nâa pas Ă©tĂ© en mesure de dĂ©velopper de nouvelles relations avec ces pays ?
NikolaĂŻ Starikov : Nous avons Ă©tabli de nouveaux types de relations avec ces pays au cours des deux derniĂšres dĂ©cennies. Nous nâavons pas interfĂ©rĂ© dans la politique interne et, sous la pression de Washington, nous avons subi des pertes commerciales en vendant du gaz Ă lâUkraine Ă un trĂšs petit prix. Ă la fin, nous avons obtenu un Ătat ennemi Ă nos frontiĂšres et des missiles de lâOTAN qui peuvent atteindre notre capitale en quelques minutes. Nous ne pouvons pas et ne voulons pas continuer une telle politique.
FA : Que pourrait-on faire sur le plan diplomatique, ainsi quâĂ dâautres niveaux, pour aider lâEurope centrale Ă redevenir neutre ? Comment pouvons-nous avoir un nouveau dĂ©part entre la Russie et lâEurope centrale ? Que devrait faire la partie russe ?
NikolaĂŻ Starikov : En tant que rĂ©aliste politique, je dirai que la Russie doit sâentendre avec les Ătats-Unis. Et les Ătats-Unis ne peuvent pas et ne parviendront pas Ă un accord avec nous parce que le but final des politiciens amĂ©ricains nâest pas la paix du monde mais le maintien de la domination Ă nâimporte quel prix, y compris par les conflits militaires.
FA : Avez-vous une opinion concernant lâInitiative des Trois Mers, un projet qui envisage un rĂ©seau de gazoducs et de terminaux GNL pour relier les trois mers â la mer Baltique, lâAdriatique et la mer Noire ?
NikolaĂŻ Starikov : Aujourdâhui, les gazoducs sont des instruments politiques. Nous serions heureux quâils soient construits uniquement pour acheminer du gaz du point A au point B. Mais, Ă©tant donnĂ© quâils sont construits dans un but gĂ©opolitique, nous appuierons les gazoducs qui sont Ă notre avantage et Ă lâavantage de lâEurope. Nous nous opposerons Ă©galement aux tentatives des AmĂ©ricains de construire des gazoducs dont le but est de nous exclure du processus politique europĂ©en. En passant, les AmĂ©ricains agissent de la mĂȘme maniĂšre. Câest la raison pour laquelle la Russie et lâEurope ne peuvent pas construire la deuxiĂšme ramification du Nord Stream 2 ou du South Stream, initialement arrĂȘtĂ© par la Bulgarie, suivi par la MacĂ©doine, oĂč des Ă©meutes «inattendues» ont Ă©clatĂ©. Ă lâheure actuelle, il y a une intention de construire ces gazoducs Ă travers la Turquie.
FA : Une derniĂšre question : ne pensez-vous pas que le monde devient multipolaire et que lâEurope centrale pourrait ĂȘtre lâun de ces pĂŽles ? Ne serait-il pas bon que la Russie cautionne de tels efforts afin de libĂ©rer cette rĂ©gion de la domination occidentale et de devenir un voisin et un partenaire indĂ©pendant ?
NikolaĂŻ Starikov : Nous exprimons notre dĂ©sir dâun monde multipolaire parce que ce serait un monde beaucoup plus stable. Ă mon avis, nous devons soutenir le processus qui a pour but final la crĂ©ation dâun nouveau centre de pouvoir mondial, sur lâensemble du continent europĂ©en (ou des parties de celui-ci).
Article paru sur le site VPost.
Vous avez aimé cet article ?
EuroLibertĂ©s nâest pas quâun simple blog qui pourra se contenter ad vitam aeternam de bonnes volontĂ©s aussi dĂ©vouĂ©es soient elles⊠Sa promotion, son dĂ©veloppement, sa gestion, les contacts avec les auteurs nĂ©cessitent une Ă©quipe de collaborateurs compĂ©tents et disponibles et donc des ressources financiĂšres, mĂȘme si EuroLibertĂ©s nâa pas de vocation commerciale⊠Câest pourquoi, je lance un appel Ă nos lecteurs : NOUS AVONS BESOIN DE VOUS DĂS MAINTENANT car je doute que George Soros, David Rockefeller, la Carnegie Corporation, la Fondation Ford et autres Goldman-Sachs ne soient prĂȘts Ă nous aider ; il faut dire quâils sont trĂšs sollicitĂ©s par les medias institutionnels⊠et, comment dire, jâai comme lâimpression quâEuroLibertĂ©s et eux, câest assez incompatible !⊠En revanche, avec vous, chers lecteurs, je prends le pari contraire ! Trois solutions pour nous soutenir : cliquez ici.
Philippe Randa,
Directeur dâEuroLibertĂ©s.