16 mars 2017

René Guénon et la conspiration mondialiste en 1920

Par Nicolas Bonnal

On rappelle la phrase éternelle de Chateaubriand, extraite de la conclusion de ses Mémoires : « La folie du moment est d’arriver à l’unité des peuples et de ne faire qu’un seul homme de l’espèce entière… »

On pourrait croire que René Guénon, dans Le théosophisme, histoire d’une pseudo-religion, s’adresse à un aréopage d’apprentis-initiés en rupture de ban avec le monde moderne et en recherche d’une sûre spiritualité. Rien de plus erroné. Il a publié nombre de livres et de textes pratiques, informés contre le monde moderne et ses conspirations, ou contre le monde moderne et son abrutissement (sa dénonciation du courtisan moliéresque à perruque, ignorant du Moyen Âge, montre que ce monde moderne est apparu d’un coup, vers et après la Renaissance).

Les noms ont à peine changé, les méthodes et les objectifs restent les mêmes : conspiration, universalisme, gouvernement global, exotisme androïde, humanitarisme cool, régime alimentaire !

Parmi ces livres, celui sur le théosophisme. Il annonce la belle conspiration mondiale, multiraciale et occultiste sous l’égide anglo-saxonne et en particulier britannique. Ce livre devait attaquer la secte sur le plan spirituel, mais Guénon ne résiste pas dans les derniers chapitres de son livre à dévoiler ce qui se trame derrière la coulisse, comme disait notre bon Disraeli.

Et cela donne par exemple ces lignes sur l’orientation humaniste ou même végétarienne de la secte : «… il est facile de se rendre compte que le but déclaré de presque toutes ces associations, en mettant à part celles qui ont un caractère très spécial et ouvertement théosophiste, se rattache à peu près exclusivement à un certain nombre d’idées directrices à base sentimentale : humanitarisme, pacifisme, antialcoolisme, végétarisme, qui sont particulièrement chères à la mentalité essentiellement moraliste du protestantisme anglo-saxon. Certains mouvements actuels, certaines campagnes antialcooliques par exemple, ont des dessous fort curieux à étudier… »

Sur cette base humanitaire on déclare tout le temps la guerre, y compris à son système digestif.

Guénon remarque sur le végétarisme (cf. les interdits hitlériens à cet égard) : «… nous sommes les frères des animaux, disent-ils, et on ne doit pas dévorer ses frères, même s’ils sont moins “évolués” que nous ; on pourrait leur répondre que, de la façon dont ils comprennent l’évolution, nous sommes aussi les frères des végétaux, voire des minéraux, de sorte que leur raisonnement, rigoureusement poursuivi et appliqué, nous condamnerait à mourir de faim purement et simplement. »

Dans le chapitre clé, le XXIX, Guénon indique que la secte est à dominante anglaise et surtout impérialiste : «… si la Société prise dans son ensemble est en effet internationale, sa direction n’en est pas moins devenue purement anglaise ; aussi, quelles qu’aient pu être parfois les apparences, nous avons la conviction, nous pourrions même dire la certitude, que le théosophisme, envisagé sous ce rapport, est surtout un instrument au service de l’impérialisme britannique. »

La secte pensait garder le contrôle de l’Inde, qui n’a jamais su se libérer de l’emprise occidentale. Considérez cette abolition du cash, qui sent le sectiféré.

« Beaucoup de vieux Indiens et plusieurs livres sur la révolte de l’Inde parlent de la manière incompréhensible dont les nouvelles d’événements ayant lieu à distance pénétraient quelquefois dans les bazars des natifs avant qu’elles arrivassent aux Européens, dans les mêmes endroits, malgré l’emploi des moyens de communication les plus rapides dont ils pouvaient disposer. »

Un bon gouvernement mondial pour tout le monde – à dominante humanitaire. Pour GK Chesterton comme pour Jack London, il en va de même à la même époque.

Tiens ! un peu de Jack London pour la piqûre de rappel. Il parle déjà de nos élites dans Le Talon de fer : « Ils se croyaient les sauveurs du genre humain, et se considéraient comme des travailleurs héroïques se sacrifiant pour son plus grand bien. »

Jack London rajoute : « Ils étaient convaincus que leur classe était l’unique soutien de la civilisation… Sans eux, l’anarchie régnerait et l’humanité retomberait dans la nuit primordiale d’où elle eut tant de peine à émerger. »

Et l’élite finit alors par haïr le peuple : « Telle était la bête (le peuple) qu’il fallait fouler aux pieds, et son écrasement constituait le suprême devoir de l’aristocrate. »

Retour à René Guénon qui va préciser une autre fois les objectifs mondiaux de la bonne vieille secte impériale (tout empire est par essence multiracial ; et plus une république est multiraciale plus elle devient impériale – ou l’inverse).

Voici le texte de ce serment, dont le début ne laisse place à aucune équivoque : « Estimant que l’intérêt primordial de l’Inde est de se développer librement sous le pavillon britannique, de s’affranchir de toute coutume qui puisse nuire à l’union de tous les habitants, et de rendre à l’hindouisme un peu de flexibilité sociale et de fraternisme vécu, je promets […] : 5° de ne tenir aucun compte, dans la vie sociale et politique, des différences de couleur et de race ; de faire ce que je pourrai pour favoriser l’entrée libre des races de couleur dans tous les pays, sur le même pied que les émigrants blancs ; 6° de combattre activement tout ostracisme social en ce qui concerne les veuves qui se remarient ; 7° d’encourager l’union des travailleurs dans tous les domaines de progrès spirituel, éducatif, social et politique, sous la direction du Congrès National Hindou. »

Annulation des nations et création d’un réseau de frères ! Guénon précise : « Ce prétendu « Congrès National Hindou », il est bon de le dire, fut créé par l’administration Anglaise avec la coopération des théosophistes… »

Et il rappelle que l’on a fait mine d’arrêter alors l’agent (pardon, la grande initiée) Annie Besant : « On a bien essayé, en 1916, pour la réhabiliter aux yeux des Hindous et donner à ceux-ci quelque confiance en elle, d’un simulacre d’internement dans sa propre villa de Gulistan, ce qui ne l’empêcha d’ailleurs nullement d’y tenir des réunions ; mais cette ruse assez grossière ne put tromper personne, et il n’y a qu’en Europe que quelques-uns ont cru que cette mesure avait été motivée par un changement réel dans l’attitude politique de Besant. »

Et Guénon termine par les buts messianiques de l’époque.

«… l’Angleterre est appelée à dicter ses lois au monde entier (le rôle essentiel du Manou est, en effet, le rôle de législateur). Ce sera bien la réalisation des “États-Unis du Monde”, mais sous l’égide de la nation dirigeante et à son profit exclusif ; ainsi, l’internationalisme des chefs du théosophisme, c’est bien, tout simplement, l’impérialisme britannique porté à son degré le plus extrême… »

Un autre qui avait bien décrit la méthode impériale est cet auteur : « Sous peine de mort, elle force toutes les nations à adopter le mode bourgeois de production ; elle les force à introduire chez elles ce qu’elle appelle civilisation, c’est-à-dire à devenir bourgeoises. En un mot, elle se façonne un monde à son image. »

Sous peine de mort : Marx a tout dit. Quand vous calculerez le nombre de civilisations que les Anglo-saxons – ou les Occidentaux – ont détruites dans le monde entier…

Bibliographie

Chateaubriand – Mémoires d’Outre-tombe (conclusion)

Chesterton – Un nommé jeudi – Hérétiques – le retour de Don Quichotte

Mgr Henri Delassus – La conjuration antichrétienne

René Guénon – Le théosophisme, histoire d’une pseudo-religion – Le règne de la quantité – L’erreur spirite – La Crise du monde moderne

Jack London – Le Talon de fer

Marx – Manifeste du parti communiste

Nicolas Bonnal – Littérature et conspiration : les grand auteurs à l’âge des complots (Dualpha) – Chroniques sur la Fin de l’Histoire (Amazon-Kindle)

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