Le transhumanisme et l’homme augmenté
Le transhumanisme est un courant de pensée selon lequel les capacités physiques et intellectuelles de l’être humain pourraient être accrues grâce au progrès scientifique et technologique.
Le penseur Ray Kurzweil considéré comme le « pape » du transhumanisme, ingénieur et professeur au Massachusetts Institute of Technology, écrit : « Les machines deviendront équivalentes à nos capacités biologiques et les dépasseront ».
Ces innovations vont permettre d’augmenter les capacités humaines et de créer un nouvel homme : un homme bionique.
La problématique que l’on pourrait construire est la suivante : le transhumanisme est-il une idéologie du progrès comme pouvait le penser Condorcet ou au contraire une idéologie de la rupture, à savoir que l’homme a fait son temps et que l’on doit passer au posthumanisme ?
Est-ce que l’homme doit laisser sa place pour en faire advenir autre chose ? L’humain a-t-il une limite ? Est-ce que le fait de modifier une partie de son corps ou mieux de la remplacer le transforme-t-il au point qu’il soit encore le même ?
Peut-on changer une partie de l’homme sans changer l’homme ?
Lorsque l’on change les planches du bateau de Thésée, est-il essentiellement le même ?
Le clivage que le transhumanisme génère est celui des conservateurs qui préfèrent résister à ces changements artéfactuels face aux transhumanistes qui désirent que la technologie accroisse leurs capacités physiques, mentales ou reproductives.
Pourtant il semblerait que les bioconservateurs soient d’une certaine façon plus révolutionnaires que les transhumanistes dans la mesure où ils pensent que la biodiversité assure une floraison de possibles alors que les technologies formateraient, canaliseraient les possibles et en réduiraient les effets du hasard jusqu’à les faire disparaître.
Le transhumanisme renoncerait à la reproduction humaine pour lui substituer le clonage. Ce serait une façon de renoncer à l’aventure du vivant, plus précisément au hasard pour préférer la nécessité du clonage.
L’homme bionique est né avec les prothèses de nouvelles générations, truffées de capteurs, biomimétiques, sensitives. Ces prothèses sont aux ordres du cerveau. En 2016, avec une puce implantée dans le cerveau, un quadraplégique a pu se servir de ses mains.
Plus besoin d’apprendre les langues, les mathématiques, toutes les disciplines, des puces peuvent être introduites dans le cerveau pour pouvoir assurer un excellent niveau culturel sans rien avoir appris. Le transhumanisme va permettre d’augmenter le QI. Mais l’intelligence d’une personne a des formes complexes et ce serait une simplification de réduire son intelligence à des paramètres mesurables et déterminés.
Toutefois, cet idéal de l’être humain parfait, éloigné des handicaps, des maladies, de la laideur, de la bêtise, de la mort, n’est-il pas un eugénisme technologique consistant à ne retenir que ce qui est beau, jeune, intelligent et à refuser l’inverse ?
Quels seraient alors les critères selon lesquels on pourrait décider de ce qui est acceptable pour exister ?
On se souvient qu’en 2018 le scientifique He Jian Qui avait révélé à Hong Kong qu’il avait modifié des embryons, dans le cadre d’une fécondation in vitro pour un couple, afin de tenter de créer une mutation de leurs génomes. Cette procédure leur conférait une immunité naturelle contre le virus du sida, procédure qui n’avait aucune justification médicale, car des techniques existent pour empêcher leur contamination par le père séropositif. Nées l’an dernier, des jumelles étaient donc nées d’embryons génétiquement modifiés par les ciseaux moléculaires Crispr.
Alors si les technologies sont au service de l’homme et mieux le remplacent pour la reproduction humaine, pour gommer les souffrances, le vieillissement et supprimer la mort, peut-on encore parler d’humain ? Quel serait un monde constitué d’entités immortelles ? Il n’y aurait plus de sociétés puisque les êtres seraient parfaits. Ces individus seraient autosuffisants autant dire qu’ils seraient les dieux de l’Olympe !
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