Angela Merkel contre le FN
« Je vais essayer de contribuer à ce qu’évidemment d’autres forces politiques soient plus fortes que le Front national pour autant qu’on puisse le faire de l’étranger », a annoncé Angela Merkel, ce 3 mai, devant les élèves du lycée français de Berlin.
Visiblement surprise de cette saillie teutonne, la présidente du Front national n’a évidemment pas manqué de fustiger ces propos qui « témoignent d’une ingérence dans nos affaires intérieures aussi outrancière qu’humiliante pour la France, et marquent une cruelle vérité : celle de la soumission de notre pays à l’Allemagne. »
Contrairement à certains poncifs hémiplégiques ou paresseux, la « francophobie » est un sentiment tenace dans la mentalité allemande et la germanophobie imputée à sa sœur voisine, la « Francia occidentalis » (bien que cette dénomination soit tout à fait anachronique, elle rend compte, nonobstant, de l’ancienneté des liens qui unissent ces deux nations depuis les Serments de Strasbourg), doit surtout s’analyser comme une réaction viscérale à la première, notamment au lendemain de la cuisante défaite infligée par l’armée prussienne, alors sous le commandement du futur Kaiser, le roi Guillaume Ier de Prusse à l’Empereur Napoléon III à Sedan, le 1er septembre 1870.
Outre les sourds ressentiments de nature religieuse (protestants contre catholiques) qui eussent pu éclore de part et d’autre des rives du Rhin, la majorité des historiens atteste la réalité de cet antagonisme atavique à compter de la mise à sac du Palatinat par Louis XIV, durant l’hiver 1689. Dix ans plus tard, la Guerre de succession d’Espagne enfoncera le clou, la France se trouvant aux prises avec la Grande alliance formée de la Grande-Bretagne, des Provinces-Unies, de la Prusse et du Saint Empire Romain germanique. L’historien Jacques Droz relève que « c’est à partir de la guerre de succession d’Espagne que les libellistes allemands appliquent [à la France] la dénomination « d’ennemi héréditaire » jusque-là réservée aux Turcs. »
Faut-il considérer comme Charles Maurras que « tout ce qui sort authentiquement des profondeurs de l’Allemagne [porte] le même caractère d’outrance rude et vaine, signe d’une ambition véritablement sans objet parce qu’elle est toujours sans mesure » (L’Action française, 13 août 1914) ? Assurément, le propos du Martégal était chauffé au fer rouge de l’hubris à l’encontre de cette Germania honnie. Ô tempora, ô mores ! Angela Merkel n’a désormais plus, pour son pays, que la funeste ambition de l’immoler sur le bûcher propitiatoire de la repentance et de la fin de son histoire.
La Chancelière a clairement opté pour que l’Allemagne apparaisse comme l’avant-garde du Grand Remplacement. Inféodée à la Turquie, elle ne cesse de lui donner des gages, comme elle le fit, récemment, en déférant à la demande d’Ankara de poursuivre un humoriste allemand ayant trivialement plaisanté sur les prétendus penchants zoo-pédophiliques du grand Sultan Erdogan. Comme le soulignait l’essayiste Roland Hureaux, « on peut s’interroger sur les relations étonnantes entre Recep Erdogan et Angela Merkel, l’un Frère musulman, l’autre protestante libérale influencée par le marxisme. La chancelière aurait-elle trouvé son maître ? Tout indique que, à la différence du ‘‘couple’’ franco-allemand, ce n’est pas elle qui tient les rênes » (Causeur, 18 avril).
En outre, la convergence d’intérêts entre les deux nations (toutes deux membres de l’OTAN) sert le dessein américain consistant à encourager la submersion migratoire du continent européen, de façon à introduire un chaos d’où naîtra l’ordre mondial voulu par le Grand Sam dont le soft power d’une redoutable efficacité n’a d’égal, à cet égard, que son activisme numérique en lien avec les holdings mondialistes du « big data » (cf. M. Dugain et Ch. Labbé, L’homme nu. La dictature invisible du numérique, Plon-Robert Laffont, 2016).