6 novembre 2020

Hommage à « notre » Algérie française

Par Fabrice Dutilleul

« Dans ma famille, comme dans tant d’autres,
les funestes accords d’Évian (18 mars 1962)
ont été vécus comme la perte de l’Alsace-Lorraine
après la défaite de Sedan »

Entretien avec Éric De Verdelhan, auteur dHommage à « notre » Algérie française

(Propos recueillis par Fabrice Dutilleul)

Éric De Verdelhan

Hommage à « notre » Algérie française : pourquoi ce titre un brin provocateur ?

Ce livre m’a été inspiré par… Emmanuel Macron. Préalablement j’avais déjà écrit trois livres qui traitaient – partiellement – du drame qu’a été la fin de l’Algérie française et je pensais sincèrement avoir épuisé le sujet. Mais en février 2017, alors qu’il postulait à la présidence de la république, Emmanuel Macron a qualifié l’œuvre française en Algérie de « crime contre l’humanité », puis, devant le tollé provoqué par cette accusation, il rectifiait le tir en parlant de « crime contre l’humain », ce qui, soit dit en passant, ne veut strictement rien dire.

J’ai aussitôt réagi en publiant sur des sites et blogs amis une réponse énumérant, de façon froide et comptable, tout ce que la France a construit en Algérie de 1830 à 1962.

À la suite de cette lettre, j’ai reçu de très nombreux courriers me remerciant d’avoir remis les pendules à l’heure. Ils émanaient de Pieds-noirs, de Harkis ou d’anciens combattants d’AFN. Plusieurs d’entre eux me suggéraient d’aller plus loin dans ma défense du rôle de la France en Algérie. C’est ainsi que ma lettre de sept pages est devenue l’introduction d’un livre qui ne vise qu’à contrebalancer les mensonges écrits par les Stora et autres « Pieds roses ».

D’où vous vient cette passion pour l’Algérie ? Vous n’êtes pas vous-même Pieds noirs ?

Non, j’aurais pu naître à Philippeville et j’ai été longtemps un « Pieds noirs de cœur », mais au début des années quatre-vingt, mon vieil ami Marcel Bouyer, ancien député de Charente-Maritime (et fondateur du réseau Résurrection-Patrie de l’OAS) m’a présenté au général Edmond Jouhaud lors d’un méchoui. En riant, le général putschiste – le seul Pieds noirs du quarteron de généraux – m’a nommé « Pieds noirs d’honneur » en raison de mes prises de position sur l’Algérie. J’en suis très fier !

Plus sérieusement, mon intérêt pour l’Algérie est né lorsque j’avais… 11 ans : j’étais enfant de troupe au Prytanée militaire d’Aix-en-Provence au moment du putsch des généraux d’avril 1961. Mon père, officier parachutiste que je croyais encore en Algérie (alors qu’il était hospitalisé au Val-de-Grâce) était un partisan de l’Algérie française. Après l’échec du putsch, le garçon que j’étais a senti qu’il se passait quelque chose de grave. Dans ma famille, comme dans tant d’autres, les funestes accords d’Évian (18 mars 1962) ont été vécus comme la perte de l’Alsace-Lorraine après la défaite de Sedan.

Un de mes frères repose dans le cimetière de Philippeville, mon père a sacrifié sa carrière à l’Algérie française, je me sens donc « de là-bas » avec un devoir de mémoire.

Par la suite, j’ai souvent sillonné le Maghreb et j’en suis tombé amoureux.

Dans votre livre, vous rendez hommage à certains combattants de l’OAS ; c’est pourtant, encore aujourd’hui, un sujet qui sent le soufre ?

J’ai eu la chance – car c’en est une – de connaître plusieurs résistants de l’Algérie française : Pierre Sergent, le colonel Château-Jobert, Marcel Bouyer (déjà cité) et quelques autres moins connus.

J’ai lu les livres du commandant Hélie Denoix de Saint-Marc et, durant un demi-siècle, j’ai potassé énormément d’études, d’analyses, de récits historiques voire de simples romans parlant de nos départements d’Algérie. Il faut avoir lu l’œuvre de Jean Brune pour comprendre la « Nostalgérie ». Dans mon livre, je parle du Bachaga Boualem, ce grand français, et du lieutenant Roger Degueldre qui a choisi les voies de l’honneur jusqu’au sacrifice… J’ai de l’admiration et du respect pour cette race d’hommes debout.

Mais vous n’êtes pas historien ? On peut vous le reprocher.

Depuis que je suis en retraite (2010), j’ai écrit 8 livres et quelques centaines d’articles. Je ne suis pas historien mais, en homme libre, je m’arroge le droit de dénoncer les oublis volontaires et les mensonges éhontés véhiculés par les « historiens officiels » du système, les Stora et consorts. Il y a peu de chance pour que je sois invité un jour à débattre de l’Algérie avec des anciens fellaghas ou des « porteurs de valises » sur un plateau télé. Mais j’ai le droit d’écrire pour dire MA vérité.

À la suite de ma lettre de sept pages à Emmanuel Macron, j’ai reçu un mail d’un militant de LaREM qui me disait : « Monsieur, vous n’êtes donc pas capable de tourner le page de l’Algérie ? »

Je lui ai répondu : « Monsieur, il m’est difficile de tourner la page sachant que Monsieur Macron vient de se torcher avec ».

Hommage à « notre » Algérie française d’Éric De Verdelhan, éditions Dualpha, collection « Vérités pour l’Histoire », dirigée par Philippe Randa, 280 pages, 31 euros. Pour commander ce livre, cliquez ici.

Éric de Verdelhan est né en 1949, dans une famille de la petite aristocratie cévenole. « Enfant de troupe » à 11 ans, il « paie sa dette à la nation » en servant chez les parachutistes et s’initie au parachutisme sportif. En retraite depuis janvier 2010, il a déjà publié de nombreux livres par « devoir de mémoire ».

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