15 mai 1891 : Rerum novarum (02)
De son vivant, Léon XIII est un peu entendu en Allemagne et en Autriche, en Belgique et aux Pays-Bas, et pratiquement pas en France. Les chefs des officines marxistes ont immédiatement perçu le risque, comme les adorateurs de Mammon. Il leur faut impérativement réduire l’influence du clergé catholique sur le bon peuple.
Pour les dévots de la lutte des classes, la doctrine pontificale est une concurrence potentiellement catastrophique. Tenter d’obtenir la justice sociale par des négociations courtoises et consoler la misère spirituelle de ceux qui, par sectarisme ou par tradition familiale, ont abandonné la quête du divin, cela risque de détourner le bon peuple des joies saines et ineffables de la haine des classes, de l’ivrognerie et de la surenchère démagogique.
Quant au monde de l’argent, il n’a évidemment aucun intérêt à répondre à l’appel du pape, du moins dans l’immédiat, car si les membres de la sainte trinité capitaliste avaient été moins stupides dans leur égoïsme étroit, ils auraient évité à leurs héritiers un siècle de luttes sociales acharnées. Si un financier, un négociant, un entrepreneur sont généralement de bons techniciens dans leur spécialité, parfois même des as de la spéculation commerciale ou financière, ils ne sont guère, sauf exception (tel le populiste Henry Ford), des génies de la réflexion sociale. Pourtant, la guerre des classes sociales n’est une fatalité que dans les élucubrations des auteurs marxistes. Le merveilleux utopiste Jésus de Nazareth l’avait dit en son temps : « Il est dur à un riche d’entrer au royaume des Cieux », mais il avait ajouté ces conseils générateurs de paix sociale : « Aimez-vous les uns les autres » et « Faites-vous des amis avec cet argent maudit ».
L’étrange alliance des capitalistes et des marxistes s’est nouée immédiatement contre « le pape devenu socialiste » (c’est le Leitmotiv du convent de 1897 du Grand Orient). Le premier acte de cette alliance fut de déclarer la guerre aux rares catholiques qui suivirent leur pape. Mais c’est en pure perte que la non-sainte alliance capitalo-marxiste a déclaré cette guerre : la masse des catholiques ne suivait pas son chef spirituel.
En France, la très curieuse affaire Dreyfus, bien exploitée par des professionnels de l’agitation politique et journalistique, aboutit au divorce entre la République et la religion dominante de la nation, alors même que les deux forces en présence étaient d’accord sur l’essentiel : le conservatisme social. Le haut clergé de France savait fort bien que ce sont les plus riches des fidèles qui remplissent les caisses paroissiales et diocésaines et qui alimentent les bonnes œuvres : Pie X sera le grand homme des évêques de France.
Effectivement, en France, Léon XIII n’a enthousiasmé que de rares âmes d’élite, comme le jeune polytechnicien Marc Sangnier, le créateur du Sillon, qui marquera l’adolescence du général de Gaulle. Les députés Albert de Mun et Jacques Piou, avec leur Action libérale et Populaire, restent très en deçà de l’esprit réformateur de Rerum novarum. En revanche, René de la Tour du Pin, qui rejette la politique de ralliement à la République, diffuse la doctrine sociale de Léon XIII et crée des cercles catholiques d’ouvriers.
En mai 1896, quelques prêtres de paroisse organisent à Reims un Congrès des ouvriers catholiques, qui déchaîne la haine des marxistes et n’intéresse guère la presse parisienne. L’expérience ne sera pas renouvelée avant la Grande Guerre. C’est peu dire que « l’esprit public français était aveugle au problème social », à la jonction des XIXe et XXe siècles. Même chez quelques catholiques violemment anticapitalistes, tel Édouard Drumont (il n’est venu à l’antijudaïsme que par haine du « libéralisme économique »), l’autorité pontificale est rejetée. Les articles de La Libre Parole le répéteront d’année en année : le problème social français doit être réglé par les seuls Français.
Que reste-t-il de Rerum novarum ? Léon XIII n’aurait assurément pas approuvé la globalo-mondialisation de l’économie, telle qu’elle est pratiquée depuis les années 1980-1990, soit la désindustrialisation massive des pays à haut niveau salarial et à bonne protection sociale, par délocalisation des entreprises vers les pays où la main-d’œuvre est sous-payée et la protection sociale inexistante, mais aussi le mépris flagrant des administrateurs pour leurs salariés même fort méritants, enfin la gestion des entreprises dans le but exclusif d’accroître les profits à court terme des grands actionnaires.
La généralisation à l’ensemble de la planète de l’injustice sociale fondamentale, qui est de ne pas rétribuer le travail à sa juste valeur et de mépriser ouvertement les salariés, lui aurait semblé une façon expérimentale quasi infaillible de préparer un nouveau cataclysme social. Par leur cynisme, leur soif inextinguible de richesses, leur absence pathologique de conscience sociale, les « super riches » ouvrent la carrière aux fous furieux de la révolution sociale et menacent l’ensemble des peuples d’une nouvelle expérience collectiviste effroyable, en comparaison de laquelle les expériences de Messieurs « Staline » et Mao Tse-toung, les deux plus sanguinaires dictateurs du XXe siècle, paraîtront des badineries.
On ferme cette parenthèse absurde, puisque selon l’estimable George Schwartz, dit Soros, les maîtres des multinationales et leurs fidèles employés du milieu de la politique de la gamelle et des médias œuvrent pour le bien de l’humanité.
Quel curieux pape fut Léon XIII ! Il réclama une véritable redistribution des profits au bénéfice des travailleurs, au lieu de flatter les bailleurs de fonds traditionnels de la Sainte Église catholique, apostolique et romaine. Il discuta avec les orthodoxes et les anglicans, au lieu d’anathématiser les schismatiques comme le faisaient ses prédécesseurs.
Son successeur – saint Pie X – reviendra aux saines traditions, si rentables et si reposantes pour les bons esprits. Léon XIII n’a pas été canonisé et n’est même pas inscrit sur les listes d’attente. Ce fin humoriste, cet ironiste subtil n’aurait probablement pas aimé qu’on lui attribue des miracles.
Texte tiré, pour l’essentiel, du volume 1 :, paru en 2010 chez Dualpha. Pour commander ce livre, cliquez ici.
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