29 mai 2021

La Suisse met fin aux négociations avec l’UE

Par article conseillé par EuroLibertés

Par Olivier Bault.

La question est posée par l’éditorialiste d’un grand journal anglais, le Telegraph, après la décision du gouvernement suisse de mettre fin à la négociation d’un accord-cadre institutionnel avec l’UE : est-il possible, quand on est un pays frontalier de l’UE, d’avoir de bonnes relations avec ce bloc ? Pour l’éditorialiste, Bruxelles n’a pas tiré la leçon du Brexit et a eu la même attitude arrogante et inflexible avec Berne qu’avec Londres. Le titre de l’éditorial en question, daté du 26 mai : « Le calvaire de la Suisse met fin à tout doute : l’UE empoisonne les relations avec chaque voisin ».

L’objectif de cet accord-cadre voulu au départ par l’UE et négocié depuis sept ans était d’intégrer dans un même accord les quelque 120 accords bilatéraux signés depuis des décennies. Il s’agissait d’avoir un cadre juridique homogène pour l’accès de la Suisse au marché unique et un mécanisme de règlement des différends. C’est mercredi que Berne a notifié à la Commission européenne sa décision de mettre fin à la négociation. Fidèle à sa méthode, Bruxelles ne s’est pas contentée d’exprimer ses regrets puisque les premières restrictions sur les produits suisses sont elles aussi entrées en vigueur mercredi.

Avec l’accord-cadre, l’UE voulait en effet que les nouvelles directives et autres textes européens ainsi que leurs évolutions futures s’appliquent automatiquement à la Suisse. Comme la directive sur les dispositifs médicaux a changé et que la Suisse refuse d’appliquer automatiquement les nouvelles règles décidées entre eux par les 27, les produits suisses de ce secteur n’auront plus un accès illimité au marché européen. Et comme Bruxelles refuse désormais de signer des accords séparés avec Berne en l’absence d’un accord-cadre, ce n’est que le début des tracasseries annoncées pour les Suisses. Or, en 2020, l’UE comptait pour 42 % des exportations suisses de biens et pour 50 % de ses importations.

Mais outre l’application par Berne de toutes les normes futures décidées par l’UE, Bruxelles exigeait aussi que les éventuels différends soient portés devant la Cour de justice de l’UE. C’était le deuxième point d’achoppement, car se soumettre aux verdicts de la CJUE, c’était de fait renoncer à la souveraineté nationale. Par ailleurs l’UE demandait que la libre circulation des personnes entre la Suisse et les 27 ne se limite pas aux travailleurs, alors que notre voisin alpin de 8,6 millions d’habitants compte déjà 1,4 million de résidents d’autres pays de l’UE et voit venir chaque jour environ 340 000 travailleurs non-résidents. Le quatrième point de blocage, c’était la question des travailleurs détachés : l’UE voulait absolument que la Suisse applique les règles européennes, ce à quoi s’opposaient les syndicats helvètes.

Rappelons que les Suisses ont rejeté en 1992, par référendum, l’idée d’adhérer à l’UE mais que les différents accords signés par la suite lui ont fait rejoindre l’espace Schengen et lui ont donné un libre accès au marché unique en échange d’un accès au marché suisse pour les entreprises de l’UE. Non-membre de l’Espace économique européen, la Suisse n’est toutefois pas dans l’Union douanière.

Face au refus des Suisses d’abandonner leur souveraineté aux Eurocrates bruxellois, les négociateurs de la Commission européenne sont même allés jusqu’à menacer de remettre en cause la coopération en matière de liaison entre réseaux électriques. L’arme serait toutefois à double tranchant, les centrales hydroélectriques suisses venant souvent au secours des réseaux des pays voisins en manque de soleil ou de vent.

Article publié dans les colonnes du quotidien Présent.

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