Dette grecque : l’ardoise est toujours là
Il y a comme ça des questions récurrentes dans la marche du monde comme il va… ou plutôt, on le sait bien ! Comme il ne va pas !
Par exemple : « Qu’est-ce que c’est devenu ? »… Au fait, oui ! On en a tant parlé… et brusquement, plus du tout !
C’est le cas de la dette grecque. Un pays au bord du dépôt de bilan, en proie aux émeutes urbaines et menaçant – car pour les dirigeants d’Athènes, il s’agissait bien d’une menace – de quitter l’Union européenne et sa zone euro, faute de pouvoir honorer le remboursement d’une dette nationale colossale… Un remboursement que par ailleurs, tous les experts jugent la Grèce parfaitement incapable de faire un jour !
Et bien, après quelques mois de silence médiatique, l’ancien pays des Dieux, comme on aimait l’appeler, toujours ruiné et étranglé par ses créanciers, revient sur le devant de la scène économique européenne. Il doit toujours 320 milliards à ses créanciers et on ne voit toujours pas par quelle opération du Saint-Esprit, il réussirait un jour à régler l’ardoise.
Alors, pourquoi défraie-t-il à nouveau l’actualité ? Parce que l’actualité, trop pauvre, obligerait les médias à puiser dans les vieilles affaires européennes non résolues, un peu à la manière de cette série policière américaine « Cold Case », soit en français Affaires classées ou Victimes du passé ?
Non, victime sans doute, mais aujourd’hui comme hier, la Grèce est toujours débitrice et Jeroen Dijsselbloem, président de l’Eurogroupe, vient de le lui rappeler en annonçant ce mercredi 14 décembre, que « le minuscule allégement de dette accordé au pays était suspendu. »
La cause ? Simplement, un élan de générosité du gouvernement d’Athènes pour les retraités modestes : au vu d’un excédent budgétaire au-dessus des objectifs, le Premier ministre Aléxis Tsípras avait décidé d’augmenter leurs pensions. Mal lui en prit ! Aussitôt, le Mécanisme européen de stabilité (MES) chargé de la mise en œuvre de l’allégement de la dette grecque y a mis son veto… et bien que l’allégement en question fût pour le moins symbolique, ne portant que sur l’automaticité d’une hausse l’année prochaine des taux d’intérêt et d’un énième allongement des délais de remboursement.
Mais Athènes, parce que sous perfusion financière du Fonds monétaire international (FMI), se doit d’obtenir l’autorisation de ses créanciers pour toute dépense budgétaire supplémentaire… et même si le pays a réussi à dégager un excédent budgétaire, comme c’est le cas en 2016, une fois remboursée la charge de la dette.
Cet excédent est pourtant d’environ 1,1 % du PIB, soit « très au-dessus de l’objectif de 0,75 % fixé avec les créanciers européens » et Vittorio De Filippis rapporte dans les colonnes du quotidien Libération : « Les institutions que sont le FMI, la Commission européenne, la BCE et le Mécanisme européen de stabilité (MES) se sont rappelées au bon souvenir d’Aléxis Tsípras, qui avait imaginé qu’il pourrait utiliser à son goût ce surplus budgétaire acquis par un violent tour de vis des dépenses publiques. »
Violent camouflet donc pour Aléxis Tsípras qui n’est guère récompensé d’avoir trahi ses engagements électoraux d’antan pour complaire aux Maîtres de la finance internationale… Rappelons que son mouvement Syriza, coalition de 13 partis et mouvement de gauche et d’extrême gauche, avait remporté les élections législatives en janvier 2015, ce qui lui avait permis d’accéder au Poste de Premier ministre, sur un programme d’opposition radicale aux mesures d’austérité exigées par l’Union européenne.
Aléxis Tsípras avait alors organisé en juillet de la même année un référendum pour que le peuple grec confirme son refus des mesures envisagées contre la Grèce… et c’est ce qu’il fit : 61,31 % des suffrages pour le Non.
Aussitôt, Aléxis Tsípras accéda à toutes les demandes des créanciers de la Grèce, ce qui ne l’empêcha pas d’obtenir à nouveau la confiance d’une majorité d’électeurs. Ce fut à n’y rien comprendre, mais ce fut la vox populi, n’est-ce pas ?
Le Premier ministre grec espérait sans doute désormais quelque mansuétude des maîtres du FMI qu’il sert pourtant avec tant de servilité depuis deux ans… mais ce n’est pas le cas et le diable en rit encore.
Un diable que Jacques Brel a si bien chanté :
Rien ne se vend mais tout s’achète
L’honneur et même la sainteté ça va
Les États se muent en cachette
En anonymes sociétés ça va
Les grands s’arrachent les dollars
Venus du pays des enfants
L’Europe répète l’Avare
Dans un décor de mil neuf cent
Ça fait des morts d’inanition
Et l’inanition des nations ça va…
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Philippe Randa,
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