L’Espagne, outre la Catalogne que nous analyserons prochainement, subit également une forte pression séparatiste du côté du Pays basque.
Il existe beaucoup de similitudes entre Catalogne et Pays basque. Région autonome (mais entité plus large également si l’on considère son territoire situé en France et la Navarre, située en Espagne), elle doit sa dénomination à une origine ethnique fondée, notamment, sur une unité linguistique spécifique.
Le Pays basque, ou Euskal Herria (soit le pays de la langue basque, l’euskara), est un territoire de tradition, de culture et d’histoire basque divisé en trois entités administratives : l’Euskadi et la Navarre situés sur le territoire espagnol et l’Iparralde, le Pays basque français situé au sein du département des Pyrénées-Atlantiques, partie de la région aquitaine. La Communauté autonome basque est strictement représentée par l’Euskadi, c’est uniquement de cette entité que nous parlerons ici.
En effet, au sortir du franquisme, lors de la transition démocratique, la question d’une communauté intégrant l’ensemble des provinces basques espagnoles fut posée. Cependant, l’UCD (Union du centre démocratique, le centre droit espagnol qui gouverna l’Espagne de 1977 à 1982, au sortir du franquisme) majoritaire en Navarre et la section Navarraise du PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol, la « gauche de gouvernement ») étaient opposés à cette communauté « basco-navarraise ».
Cependant, la Constitution espagnole de 1978 permet de prévoir un rattachement de la Navarre aux autres provinces basques espagnoles, par voie référendaire sur initiative du parlement navarrais.
Ainsi, notre étude, comme indiqué précédemment, se limitera au territoire basque de l’Euskadi, le plus souvent assimilé, à tort, à l’ensemble du Pays basque espagnol.
Ce territoire est le plus riche d’Espagne, devant la Communauté de Madrid et la Navarre, lorsque l’on considère le PIB par habitant.
Il bénéficie d’un large statut d’autonomie, proche de celui d’un État fédéré ; la région contrôle ainsi sa fiscalité, son éducation et sa police. Ce statut, issu d’un référendum adopté dès 1979, est appelé le statut, dit « de Guernica ».
Un mouvement séparatiste d’intérêt régional, le PNV
De la même façon, nous n’aborderons, qu’en l’évoquant brièvement, le mouvement politico-militaire ETA, fondé en 1959 par Julen de Madariaga, condamné en 1972 à la prison à vie par la justice hispanique, et une poignée de jeunes marxistes, dont les conceptions initiales, qui ont évolué, faisaient de l’identité basque, un berceau racial spécifique multimillénaire et originaire d’un berceau magnifié de l’humanité.
Plus prosaïquement, le parti Nationaliste Basque (PNV, en castillan : Partido Nacionalista Vasco) est le premier parti de la Communauté autonome basque depuis le retour de la démocratie en Espagne et dirige ainsi les principales institutions de la Communauté autonome basque depuis 2012, comme entre 1980 et 2009 (seule courte exception, entre 2009 et 2012, une coalition formée entre les socialistes espagnols du PSOE et les conservateurs du Parti Populaire ont dirigé, ensemble, la Communauté autonome).
Comme la CiU, le PNV est situé au centre droit de la vie politique européenne, ses élus au Parlement de l’Union, siégeant en compagnie des libéraux dans le même groupe que les Catalans.
Si, en octobre 2012, aux élections du Parlement basque, les nationalistes modérés du PNV constituaient la première force politique du pays, son succès fut limité, comme en Catalogne pour la CiU, par la très forte poussée des indépendantistes de gauche, avec 25 % des suffrages exprimés, la coalition Euskal Herria Bildu.
Ces deux partis, PNV et EH Bildu, représentent les deux tiers des sièges du Parlement régional, soit 48 sur 75. Le succès du mouvement EH Bildu est un véritable camouflet à l’État central, compte tenu de leur récent retour dans le jeu électoral démocratique ; en effet, ces mouvements avaient fait l’objet d’une interdiction légale, compte tenu de leur proximité idéologique avec l’ETA, groupe terroriste évoqué précédemment.
Une présidence modérée
Le PNV dirige la région en solitaire, mais en pratiquant des accords ponctuels avec les autres partis politiques représentatifs, du Parti Populaire (PP) espagnol aux indépendantistes d’EH Bildu en passant par les socialistes du PSOE. Seul le parti antinationaliste, l’UPyD, l’Union Progrès et Démocratie, d’inspiration social libérale, semble isolé, militant pour une stricte égalité entre les régions et privilégiant l’enseignement du castillan aux dépens des langues régionales.
De manière assez étonnante – magie de l’Union européenne, probablement –, le PNV siège au Parlement européen au sein du groupe des libéraux, Alliance des démocrates et des libéraux pour l’Europe (en France, le Modem de François Bayrou et l’UDI de Jean-Christophe Lagarde font partie de cette coalition hétéroclite) avec… l’UPyD.
Lors du débat d’investiture, en 2012, au Parlement régional basque, Inigo Urkullu, le président alors nouvellement élu du PNV a indiqué trois grands objectifs pour la législature à venir : limiter les effets de la crise économique en créant des emplois, la paix au Pays basque et un nouveau statut juridique en faveur de l’entité territoriale.
Les revendications purement séparatistes semblent se faire plus discrètes ici, cela est probablement lié à la conjonction de trois éléments : la modération du PNV qui n’a pas établi de coalition permanente électorale avec EH Bildu, malgré (ou à cause de) la progression de ce dernier et la large autonomie financière de cette Communauté, la plus riche du royaume, où tous les impôts sont levés par l’administration fiscale basque qui reverse uniquement 5 % des impôts à l’Espagne, ce dernier s’occupant alors de la redistribution en faveur des régions plus pauvres.
Enfin, la violence et les nombreuses victimes de l’ETA ont probablement eu, comme effet contraire, la volonté d’apaisement ; comme indiqué ci-dessus, le deuxième objectif du Président Inigo Urkullu, est « la paix ».
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Philippe Randa,
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Franck Buleux, 50 ans, chargé d’enseignement, est diplômé en histoire, en droit, en sciences politiques et en criminologie. Il a publié, chez L'Æncre, "L’Europe des peuples face à l’Union européenne", préfacé par Georges Feltin-Tracol ; chez Dualpha "La Guerre sociale qui vient" (D’Action directe aux Black Blocs, la violence des ultras), également préfacé par Georges Feltin-Tracol et a dirigé chez Synthèse éditions le n°20 des Cahiers d'Histoire du nationalisme "Pierre Poujade. Union et Fraternité française". Auteur d’un mémoire sur les séparatismes européens, il se passionne pour les mouvements politiques favorables à « L’Europe aux cent drapeaux. »