Ce portrait d’Antonietta Gonzales (1580-1640) peint vers 1595 par Lavinia Fontana (1552-1614) que l’on peut voir à Blois (faisant partie des collections du Musée des Beaux-arts dans le château de Blois) dévoile une représentation de cette jeune fille de 15 ans dont la postérité retient la pilosité abondante, fruit d’une maladie baptisée « hypertrichose ». Antonietta est poilue comme un animal, mi-ange à la collerette blanche, mi-bête à poils de loup.
Cette maladie congénitale du nom d’hypertrichose (grec : hyper = avec excès, trix : poils) est appelée également syndrome d’ambras. Ce type de phénomène fascine les princes d’Europe, avides de réunir dans leur cabinet de curiosités les manifestations les plus extraordinaires de ce que peut produire la nature.
Une autre version du tableau a été vendue aux enchères en juin 2023 pour 1,25 million d’euros, et acquise en 2024 par le Musée National de l’Art Occidental à Tokyo au Japon, c’est pourquoi le sujet a passionné toutes les époques et tous les continents.
En effet, cette anomalie génétique, qu’Antonietta prénommée Tognina partageait avec son père, Pedro Gonzales, né vers 1537, et la plupart de ses frères et sœurs.
Cette pilosité abondante qui recouvrait le visage était une source de curiosité pour la Renaissance, c’est ainsi que la famille s’attira les faveurs de la cour.
Né à Tenerife, dans les îles Canaries, Pedro Gonzales considéré d’abord comme un singe familier fut offert à l’âge de 10 ans au roi de France Henri II (1519-1559) qui, au lendemain de son sacre en 1547, confia son éducation à des précepteurs royaux, de telle sorte que “l’homme sauvage”, désormais appelé Petrus Gonsalvus, devint un modèle d’instruction et de raffinement.
Henri II mit à la disposition de cette famille une partie du parc de Fontainebleau avec l’intention de lui offrir environnement naturel et protection.
Ces “hommes-singes” participaient régulièrement aux manifestations sociales, habillés de vêtements de cour, la petite Antonietta était elle-même affublée comme une poupée.
À la mort d’Henri II (en juillet 1559), Catherine de Médicis (1519-1589) lui choisit une épouse Catherine Raffelin, laquelle découvre son futur époux le jour de son mariage. Cette jeune fille, issue de la bourgeoisie, naturellement blonde, célébrée pour sa beauté, aura sept enfants avec Pedro – un mariage heureux qui aurait inspiré la légende du conte La Belle et la Bête –sous la plume de Gabrielle-Suzanne de Villeneuve en 1740.
Pourtant Ambroise Paré avait dit que Catherine Raffelin serait stérile. La suite prouvera le contraire. Des 7 enfants, 4 des enfants sont atteints de la même maladie que le père, Antonietta en fait partie. Antonietta grandit à Fontainebleau où elle fait partie de la cour du roi Henri II.
Pouvons-nous y percevoir une forme d’expérience génétique sans consentement ? La théorie est possible car la famille avait le statut « d’objet ».
Au décès de Catherine de Médicis en 1589, la famille Gonsalvus plongée en disgrâce, est envoyée en Italie, où elle est accueillie par différents membres de la noblesse, à l’instar d’Isabella Pallavicina, marquise de Soragna qui les reçoit. C’est à cette époque que le portrait d’Antonietta a été exécuté avec sa rencontre avec l’artiste Lavinia Fontana un après-midi de l’année 1594. Ce jour-là, le médecin et collectionneur italien Ulisse Aldrovandi étudie en détail la jeune fille, livrant une description qui sera incluse dans un catalogue d’anomalies humaines et animales publié à titre posthume en 1642.
Lavinia Fontana parvient à capturer avec virtuosité la psychologie de son jeune modèle qui, loin d’être réduit à un simple objet de curiosité, est décrit avec une douceur toute maternelle, affichant un visage innocent, mais déjà teinté d’inquiétude, bien que son regard en effet soit plein de tendresse.
Avec cette œuvre, on voit Antonietta vêtue d’une jolie robe brodée et coiffée d’une parure élégante, qui sont les signes de la culture de la Renaissance.
Dans ses mains, Antonietta tient une lettre manuscrite où elle raconte une partie de son histoire.
Ici, on est loin de l’exhibition de cette jeune fille comme un objet de curiosité, c’est-à-dire une humaine sauvage, autant dire un singe, une bête.
Antonietta est éduquée, parée de perles et de dentelles, mais ce n’est plus sous le pinceau de Lavinia Fontana une fille-singe déguisée comme une princesse.
Le roman L’infante sauvage paru en 2023 de Mario Pasa se propose de brosser le portrait psychologique de cette enfant du XVIe siècle, frappée d’hyperpilosité, regardée comme un monstre avec les yeux d’un homme de la Renaissance tout en abordant des questions actuelles, comme l’ostracisme, notre rapport à la nature et le pouvoir des images.
La question de la frontière entre l’humain et l’animal a toujours été animée par des observations, des recherches. Déjà le 15 août 1550 débute en Espagne la controverse de Valladolid qui oppose deux thèses celle de Sepulveda qui pensait que les Indiens étaient des hommes privés d’âme donc des bêtes, alors que Las Casas qui avait vécu parmi les Indiens, les défendaient comme des êtres humains ayant les mêmes droits que les Européens.
Plus proche de nous, le roman Les animaux dénaturés de Vercors (1902-1991), paru en 1952, interroge la notion de “plus ou moins homme”. L’histoire raconte que des anthropologues cherchent “le chaînon manquant” (intermédiaire entre l’être humain et le singe).
Si l’homme est un animal comme les autres, peut-on dire sans faire outrage à l’espèce humaine que l’animal est un homme comme les autres ?
Que la question de la pilosité ou plus exactement de l’hyperpilosité n’entrave pas la reconnaissance de ce qu’est un être humain !
Mais, au fait, est-ce une question de nature ou de degré qui sépare finalement l’homme de l’animal ? Serait-ce une question de poils ou au poil ?
EuroLibertés : toujours mieux vous ré-informer … GRÂCE À VOUS !
Ne financez pas le système ! Financez EuroLibertés !
EuroLibertés ré-informe parce qu’EuroLibertés est un média qui ne dépend ni du Système, ni des banques, ni des lobbies et qui est dégagé de tout politiquement correct.
Fort d’une audience grandissante avec 60 000 visiteurs uniques par mois, EuroLibertés est un acteur incontournable de dissection des politiques européennes menées dans les États européens membres ou non de l’Union européenne.
Ne bénéficiant d’aucune subvention, à la différence des médias du système, et intégralement animé par des bénévoles, EuroLibertés a néanmoins un coût qui englobe les frais de création et d’administration du site, les mailings de promotion et enfin les déplacements indispensables pour la réalisation d’interviews.
EuroLibertés est un organe de presse d’intérêt général. Chaque don ouvre droit à une déduction fiscale à hauteur de 66 %. À titre d’exemple, un don de 100 euros offre une déduction fiscale de 66 euros. Ainsi, votre don ne vous coûte en réalité que 34 euros.
Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.
Quatre solutions pour nous soutenir :
1 : Faire un don par paypal (paiement sécurisé SSL)
Sur le site EuroLibertés (www.eurolibertes.com), en cliquant, vous serez alors redirigé vers le site de paiement en ligne PayPal. Transaction 100 % sécurisée.
2 : Faire un don par chèque bancaire à l’ordre d’EuroLibertés
à retourner à : EuroLibertés
BP 400 35 – 94271 Le Kremlin-Bicêtre cedex – France