28 juin 2024

Didier Patte, incarnation du mouvement normand (1941-2023)

Par Franck Buleux

Né peu avant la « grande brulerie » de 1944 comme l’appelait le poète normand Louis Beuve (1869-1949) originaire de St-Lô, le 1er janvier 1941 à Rouen, le normand Didier Patte nous a quittés l’an passé, en février 2023. Le 5 février, un envoi d’oies sauvages s’évanouissait, de Lillebonne, où il est décédé, vers le Nord. Le 13 février à Vatteville-la-Rue, en Seine-Maritime, une cérémonie accompagna son départ lors d’un moment solennel au cours duquel se déployèrent les différentes bannières des pays de France et d’Europe. Les drapeaux normands aux deux léopards ou à la croix d’Olaf accompgnèrent le défunt dans cet ultime voyage. Son épouse, leurs sept enfants et leurs dix petits-enfants saluèrent le grand Normand. Une cérémonie chrétienne ornée de symboles runiques paîens…

Fondateur du MJN (Mouvement de la jeunesse de Normandie) le 29 septembre 1969, jour de la St-Michel,  à Lisieux avec le député gaulliste de Valognes, dans la Manche, Pierre Godefroy et le journaliste au journal Minute et écrivain Jean Mabire, devenu le MN (Mouvement normand) en 1971 à Bernay lors du 3e congrès du mouvement, il en deviendra président d’honneur en 2016, laissant Le leadership à Emmanuel Mauger. Concernant sa démission, outre l’âge, rappelons l’unification territoriale normande depuis le 1er janvier 2016 (loi relative à la délimitation des régions du 16 janvier 2015) qui semble marquer un terme à l’action du mouvement régionaliste dont la réunification normande était, avec la promotion d’un pouvoir régional dans le cadre français, l’un des deux objectifs principaux.

Mais avant d’évoquer cette réunification que nous devons à un autre natif de Rouen, revenons-en à Didier Patte.

Étudiant en histoire, se consacrant à l’enseignement, Didier Patte naît à la politique au début des années 1960 :  il dirige la FER dans les années 60 sur le campus de Mont-Saint-Aignan. La Fédérarion des étudiants de Rouen (FER), adhérente de la FNEF, dirigée par Didier Patte fusionna avec l’Union pour la région normande (URN) mouvement d’élus favorables à la majorité de l’époque, pour donner naissance le 29 septembre 1969 à Lisieux au Mouvement de la jeunesse de Normandie avant de prendre le nom de Mouvement normand en 1971. La FNEF (Fédération nationale des étudiants de France) était une scission de l’UNEF créée en 1962, issue d’étudiants qui ne souhaitaient pas la politisation (à gauche) du mouvement étudiant, mais une action purement corporatiste. Se déclarant apolitique, elle aura des relations avec le centre et la droite, notamment avec de nombreux partisans de l’Algérie française.Avec le développement, sur sa droite, de la FEN (Fédération des étudiants nationalistes), dont fit partie l’ancien député-maire de Rouen Pierre Albertini, né en 1944 à Batna  en Algérie française (alors étudiant à Aix-Marseille) la FNEF se recentre. Elle comprenait des fédérations locales comme la FER.

Didier Patte sympathisa aussi avec le Cercle Patrie et Progrès de Philippe Rossillon (1931-1997) qui développait une forme de national-gaullisme ancré à gauche mais favorable à l’Algérie française, auquel ne fut pas insensible l’ancien ministre de l’Intérieur et candidat à la présidentielle (celle de 2002) Jean-Pierre Chevènement. Philippe Rossillon s’est fait connaître pour son combat en faveur de la francophonie et des cultures latines. Il a également été maire de la commune de Beynac-et-Cazenac, en Périgord, de 1965 à 1984. Après l’indépendance de l’Algérie, Rossillon s’est également intéressé à la condition des communautés francophones minoritaires du Canada.

Après Mai 68, Didier Patte défile, à Rouen, le 30 mai 1968 à l’appel des adversaires de la « chienlit » (nom donné par De Gaulle aux agitateurs), permettant aux partisans de De Gaulle de se mobiliser, face à la gauche qui a tenu la rue durant le mois de mai,  de se maintenur au pouvoir gràce à la victoire électorale lors des législatives anticipées de juin. Il y défile sous la bannière syndicale de la CFTC, dont il est membre. C’est d’ailleurs à ce tirtre qu’il sera membre du CESER et qu’il présida, dans les années 1990, la CAF de l’Eure.  Toutefois, lors du référendum de 1969, il appelle à rejeter le projet gaulliste sur la régionalisation et visant notamment à la suppression du Sénat. Le « non » l’emporta avec 52.5 % entraînant le départ volontaire du Général et l’élection de Pompidou à la magistrature suprême.

En 1969, jeunes anti-marxistes de la FER et membres de l’URN (pour la plupart, élus gaullistes mais aussi centristes et Républicains indépendants ) fondent un mouvement régionaliste au-delà du mythe symbolique guerrier du Viking qui ne permit que l’éclosion éphémère de groupuscules dirigés par le petit-neveu du peintre Claude Monet, Jean-Claude Monet jusqu’au NNP, Nationalist Normandy Party dans les années 1980. L’imagerie viking n’a jamais donné plus que des groupuscules, le plus souvent manipulés par les services.

Le journal de la FER, L’Oeuf deviendra Haro-L’Oeuf en 1969 tout en conservant l’antériorité de la publication  en matière de numérotation.

À l’aube de sa vie professionnelle, il se détourne du militantisme politique pour préférer influencer les élus, être un aigullon au sein des partis politiques, de droite comme de gauche. Il considérait que le MN devait agir « en profondeur sur la mentalité normande ». Il se préoccupe de la réalité normande à une époque où l’ancien duché (911-1204) se trouve divisé en deux régions, cinq départements et même deux Etats, si l’on considère les îles anglo-normandes (Jersey, Guernesey, Sercq, Lihou, Herm et Jéthou) qui dépendent de la souveraineté de la Couronne britannique. Le droit coutumier normand s’y applique en matière civile.

Un mouvement métapolitique : le MN a effectivement peu participé aux joutes électorales et même s’il donnait des consignes de vote (en faveur ou contre tel ou tel), il eut rarement de candidat dédié et estampillé uniquement MN. François d’Harcourt fut élu MN-CNIP dans la circonscription de Bayeux en 1973, Paul German fut élu maire divers droite-MN de Falaise en 1977 et Fernand Le Rachinel candidat à une sénatoriale partielle en 1983 dans la Manche (30 % des grands électeurs tout de même) avant de rejoindre le FN, puis les dissidents du Parti de la France (PdF) après l’arrivée de Marine Le Pen. Didier Patte fut candidat « divers droite » en mars 1985 dans le canton de Montfort-sur-Risle où il capitalisa près de 4 % gràce à l’absence de candidat estampillé FN.

Mais l’essentiel ne fut pas politique mais métapolitique. Le culturel ne se doit-il pas de précéder l’accès au pouvoir politique… Le « gramscisme de droite » fut un des grands thèmes développés par la Nouvelle droite dans les années 1980, du nom du militant communiste italien, Antonio Gramsci,  qui termina dans les geôles de l’Italie fasciste. Cette aspiration renvoie aux années 1970 où la droite portait une vision économique et la gauche une volonté culturelle. Raymond Barre contre Jack Lang pourrait correspondre à cette période.

Le métapolitique permet d’inspirer les partis et d’éviter, aussi, de se mesurer. Le MN se voulait représenter la Normandie et non être le représentant d’un partie de celle-ci. Aussi, le MN préférait être une forme de dénominateur commun mais aussi de veille identitaire normande.

La politisation du Mouvement ne pouvait entrainer que sa limitation au sein de l’univers normand. La partitocratie est fille de division et d’altérité alors que l’esprit du MN se voulait inter-partisan. Le revers de ce choix est la faiblesse de la visibilité du MN : la double appartenance était possible (c’était indiqué noir sur blanc dans les statuts) et parmi certains cadres de rigueur.

Homme de convictions et de plume, historien avocat de la Normandie, amoureux de notre Moyen-Âge, il participa à une myriade de publications (il en fonda et dirigea certaines) dont les deux fleurons demeurent L’Unité normande et Culture normande, toujours animée par Michèle Le Flem, veuve de Didier Patte.  Il animait l’ODIN (Office de documentation et d’information de Normandie), s’investissait dans les éditions d’Héligoland et dans une Web-télé, TVNC. Sa seule ambition était le bien commun de la Normandie envers et contre le jacobinisme parisien et les administrations, ennemies du droit des peuples.

Amoureux des patries charnelles, et d’abord de la sienne, à la tête du MN depuis près d’un demi-siècle, il fut enseignant, journaliste, syndicaliste, militant politique au sein du métapolitique. Au-delà de toutes ces activités, il aura oeuvré toute sa vie à la réunification des deux régions croupions normandes.

De 1969 à 2015, il combat avec tenacité contre le division administrative de la Normandie, mise en place en 1956 par des technocrates de la IVe République, fustigeant les jacobins mais aussi les « localistes » qui préfèrent deux régions pour conserver leurs prébendes et développer les pouvoirs des grandes villes, Caen et Rouen aux dépends d’une grande région. Face à cette division, Didier Patte propose une répartition équitable et raisonnée des institutions régionales (la préfecture régionale à Rouen, capitale historique depuis Rollon, le conseil régional et son exécutif à Caen, l’union des ports du Havre, de Rouen et de Paris, la Chambre régionale de commerce et d’industrie et la Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement au Havre).

Ami de l’actuel président du conseil régional Hervé Morin, il siégea à plusieurs reprises, au titre de la CFTC puis en tant que personnalité qualifiée, au Conseil économique, social et environnemental régional de Haute-Normandie puis de la Normandie.

Partisan d’un « régionalisme tranquille », la réforme administrative de 2015 qui réduit les 22 régions métropolitaines en 13 est, malgré des imperfections telles le Grand Est ou la Nouvelle-Aquitaine, l’une des réalisations positives du quiquennat de François Hollande. Didier Patte a eu la chance d’assister à la réunification de la Normandie. Il se félicitait de cette réunion et dénonçait certains responsables politiques locaux favorables à l’intégration de la vallée de la Seine dans une Ile-de-France élargie et au rattachement des déparetements de l’Ouest (ex-Basse-Normandie) à la Bretagne. D’autres possibilités faisaient été d’un rapprochement entre les deux départements de Haute-Normandie avec l’ancienne Picardie ou une partie de celle-ci. Bien entendu, il soutenait l’unité des patries charnelles, notamment le rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne et etait favorable à la réunion du Nord, du Pas-de-Calais et de la Picardie, malgré une dénomination eu appréciée. Didier Patte préférait « Pays-Bas français » à « Hauts-de-France ». Il dépassait la querelle entre « régionalistes » et « départementalistes » estimant que si le département avait une vocation sociale, la région devait s’occuper des transports et de l’économie.

Didier Patte réalisait des revues de presse précises en épluchant les différentes éditions locales (dont il nous diffusait la substantifique moelle) et en faisait de nombreuses synthèses. Il y dénonçait la Normandie traitée comme un territoire « périphérique », reléguée dans la désertification et la marginalité face à un axe « utile » Paris-Rouen-Le Havre, sorte de « grand Paris » dont Le Havre serait le port.

Fondateur et premier président des Amis de Jean Mabire de 2001 à 2007, Didier Patte souhaitait amplifier la décentralisation vers une France régionalisée. Cette organisation, visible en Corse et dans les collectivités d’Outre-Mer, impliquerait le transfert de certaines compétences comme la santé, l’éducation et la culture vers les régions qui bénéficieraient d’une redistribution équitable en matière fiscale. Il ne pensait pas le fédéralisme comme une solution viable en France mais il pourfendait le centralisme parisien aussi bien que les (quelquesà) séparatistes, ne cessant de revendiquer la Normandie comme « Terre de France ». Par son histoire, son peuple, ses parlers locaux, ses paysagesn la Normandie offre aux horsains la faculté d’acquérir l’état d’esprit normand. On devient normand par l’héritage du pays. C’est la Normandie qui fait le Normand. Le premier président du Sénégal, Léopold Sédar Senghor (1906-2001) n’a t-il pas vécu, avec une épouse normande, ses dernières années à Verson, dans le Calvados, où il évoquait la « normannité » ?

Concernat la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, Didier Patte distinguait les langues régionales et les langues minoritaires, les premières enracinées et les secondes, communautaires. Qu’elles soient d’origine romane, germanique, basque ou celtique, les premières sont des langues de France.

La présence de la Normandie impliquait une présence de notre région sur l’ensemble du « monde normand » : anglo-normande, scandinave, baltique, sicilienne, sud-italienne, nord-américaine, est-européenne (avec l’aventure varègue sur le Dniepr, la Volga et le Dniestr). Le médiéviste se souvient de la Reconquista de Robert Guiscard et de son frère Roger de Hauteville qui s’emparèrent au XIe siècle de la Sicile où ils batiront un royaume toléranr envers les juifs et les musulmans, véritable contre-exemple à l’Andalousie, sous la coupe mahométane. Faut-il rappeler que le dernier descendant des Hauteville sera l’Empereur Frédéric II de Hohenstaufen ? L’esprit normand est européen.

Proche du GRECE (Groupement de recherches et d’études pour la civilisation européenne), il participa à son 34e colloque, en 2001, consacré à « L’Europe et les régions ». Il avait publié une tribune dans la revue Eléments en septembre 1975 (n°12) sur la question du régionalisme normand. Il publia aussi « Réforme territoriale, le grand ratage » dans Eléments en août 2016 (aôut 2016)

Son article « Confession d’un futur embastillé » est la conséquence de l’activisme breton du Front de libération de la Bretagne (FLB) qui entraîna une perquisition et une garde à vue pour Didier Patte, en qualité d’ami des séparatistes bretons. Rappelons qu’à cette période, une bombe explosa et détruisit une partie du château de Versailles. Didier Patte se révolte : « Me conduira-t-elle (son action) dans les geôles du pouvoir central ? » dénonçant déjà l’ethnocide dont se rend coupable l’État français à l’égard de la Normandie. Il ressent « une immense révolte ». Et pourtant, loin de tout séparatisme, Didier Patte se revendique « Normand et Français » dès le début de l’article et en majuscules. Dans le même numéro d’Eléments, Alain de Benoist, sous le pseudonyme de Robert de Herte, développe ce même double rejet, du séparatisme comme du jacobinisme lui préférant l’existence de régions au sein d’une nation et non des « petites enclaves rousseauistes soumises au contrôle des superpuissances ». Le nationaliqme régional n’est-il pas un « jacobinisme aux petits pieds ?

Un mouvement régionaliste non localiste

Longtemps, la Basse-Normandie fut marquée à droite et la Haute, à gauche. La division permettait à chacun de se constituer une « baronnie » en évitant de devoir se retirer face à l’autre. Même au sein de la même majorité, le localisme permet de mettre en avant son propre territoire, son département, sa ville. L’opposition entre Le Havre, Caen et Rouen va au-delà de l’aspect politique. Cette situation a toujours été condamnée par le MN, qui préfère raisonner régional plutôt que local.

Un mouvement non séparatiste

Le MN n’a jamais contesté la nation française, préférant une autonomie conférée qu’une aventure à la Corse ou présente chez certains Bretons ou autres. La tendance « nationaliste » des régionalistes fut très souvent marquée à gauche, dénonçant le colonialisme national, selon une vision très « algérienne » du conflit entre l’État et le peuple colonisé. Les évènements d’Algérie furent à l’origine de cette distinction entre les régionalistes de gauche et les autres.

La possibilité de « double carte » est, à cet égard, emblématique : on pouvait avoir une carte politique et celle du MN, sans exclusive. La question de la gauche normande peut être évoquée du co-auteur d’Histoire de la Normandie, qui vient du PSU avant d’être élu maire-adjoint PS de Rouen en 1995 jusqu’à la proximimité avec le député Alain Touret, radical de gauche élu député de Vire en 1997 puis macroniste. Au-delà de ces deux exemples, le MN n’hésitait pas à soutenir des candidats de gauche s’ils se prononçaient en faveur de la réunification. Ceci était d’autant plus facile que le MN pouvait soutenir plusieurs candidats dans une même circonscription.

Concernant les écologistes, le MN participa à des campagnes avec des membres du Mouvement écologiste indépendant (MEI) d’Antoine Waechter lors d’élections régionales dans les années 2000.

Pour Les Verts, la tête de liste écologiste lors des élections régionales dans l’Eure en 1992, Eric Pinel fut membre du MN. Mais bon, il devint par la suite député européen élu sur la liste de Philippe de Villiers et il est maintenant cadre du PdF.

Un mouvement conservateur

Au-delà des clivages politiques, le MN est un mouvement qui souhaite une société apaisée dans un cadre historique. Pragmatique, c’est la Normandie qui fait le Normand. Il n’y a pas de volonté ethnique dans ses propos ou son programme. Il s’agit de mettre en perspectives des femmes et des hommes qui souhaitent mettre en harmonie un territoire plus que millénaire en en adoptant les traditions.

Il n’y a aucun projet révolutionnaire et l’iconographie viking utilisée reste une volonté d’identification historique plus qu’une vélléité guerrière et une apologie d’une race nordique au demeurant difficile à mettre en valeur s’agissant, pour les Scandinaves du Xe siècle, d’une colonisation d’encadrement et non de peuplement. Effectivement, des traces scandinaves ont été recensées, de manière scientifique, au sein des populations du pays de Caux, en Seine-Maritime et du Cotentin, au nord de la Manche. Cette étude a été réalisée par une université britannique, moins chétive que nous sur les origines de nos concitoyens.

La question religieuse…

C’est une grande question ! Didier Patte sera un cadre syndical à la CFTC dès les années 1960, inhumé religieusement, il ne manquait jamais d’exhiber un Marteau de Thor autour de son cou. Ses revues sont parsemées d’évocations de la religion des anciens Scandinaves, celle dont est issu Rollon, notre premier duc. La conversion de Rollon au christiannisme en 912 à la cathédrale de Rouen (Rollon francise son nom par le baptème et devient Robert, du nom de son parrain) indique l’assimilation des conquérants à la population locale de Neustrie. Dois-je vous rappeler, aux alentours de l’an Mille, le passage des chefs Scandinaves du paganisme au christiannisme, d’Erik le Rouge à son fils Leif Erikson.

Sans comparer Didier Patte à Rollon, ou à Leif Erikson, ne ressent-on pas ce difficile choix entre cette tradition païenne issue de la nuit des temps et ce conservatisme catholique (ou chrétien) qui permet d’opter pour une Normandie des clochers et des terroirs face à l’athéisme communiste, le modernisme parisien ou la haine du sabre comme ferment d’une religion du désert.

D’abord clairement, Didier Patte était un Normand de la Terre, la nôtre et n’avait pas d’états d’âme métaphysiques. Il ne versait pas dans l’au-delà, en tout cas dans les échanges publics. Si on retient un double attachement, pour la Sainte Trinité comme pour les dieux du Nord, on peut parler d’un christiannisme « sociologique », ce sentiment issu d’une famille catholique et d’une forme de savoir-être. Entre un christiannisme social et un paganisme de pensée, le Normand a toute sa place. On peut aussi évoquer l’influence de Mabire pour les symboles païens.

A titre personnel, je lui dois ce magnifique séjour à Hastings en octobre 2000 lors de la reconstitution de la victoire normande sur les troupes d’Harold Godwinson mais aussi, et surtout, nos fructueux échanges avant la soutenance de mon mémoire en histoire soutenu à l’université de Caen, mémoire qui obtint, sous une forme d’essai, le prix André Maurois décerné par les écrivains normands en 2016.

Demain…

Le Mouvement normand n’a plus d’activité militante, même métapolitique. On peut le regretter. Alliances Normandie a été créée en janvier par certains anciens membres du MN mais tout reste à construire au sein d’une région extrèmement identifiée à l’extérieur mais si peu à l’intérieur. C’est le paradoxe normand….

La Normandie n’est pas la Corse et manque de marqueurs identitaires. Certes, la Corse est une île, permettant ainsi de se singulariser mais l’Alsace, la Bretagne, l’Occitanie, la Flandre disposent de mouvements régionaux, y compris politiques.

Le jacobinisme français reste un frein à tout développement régional. Les modèles fédéralistes belge, allemand, espagnol sont éloignés de notre conception. Didier Patte l’avait compris : il revendiquait l’unité régionale puis des compétences permettant d’exercer des prérogatives.

Didier Patte a réellement influencé les partis politiques, y compris à gauche. Il était à la fois rebelle et parfaitement intégré au système, catholique et païen, modéré et revendicatif. Il était Normand.

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