Vous commencez Ă me pratiquer, non ? Vous nâignorez certainement pas mon addiction aux articles survitaminĂ©s du journal LâĂquipe. Il faut vous dire que mon pĂšre, quelque peu pervers jâen conviens, sâen est servi pour mâapprendre Ă lire. Bref, certains boivent, dâautres jouent ou courent le guilledou, moi je mâĂ©tourdis Ă visionner nâimporte quelle course cycliste ou rencontre de football voire de rugby. Je suis comme ça et les Ă©missions « en clair » de la chaĂźne LâĂquipe nâont fait quâaggraver mon triste Ă©tatâŠ
Figurez-vous que rĂ©cemment je dĂ©couvre trĂšs fortuitement la retransmission dâune rencontre de volley-ball fĂ©minin qui oppose Mulhouse Ă Venelles en finale de la Super coupe. Venelles ! OĂč donc peut se nicher cette commune ?
Mon inextinguible curiositĂ© est vite satisfaite. Venelles est une charmante bourgade de 7 535 habitants, nichĂ©e sur les premiers contreforts alpins, Ă une portĂ©e de smash de la vallĂ©e de la Durance et Ă une grosse trentaine de kilomĂštres de Manosque. Quand jâentends le nom de Manosque, Jean Giono, « le voyageur immobile », suscite immĂ©diatement en moi comme un regain de vitalitĂ© pastorale. Câest comme si un fantĂŽme oubliĂ© redescendait des collines pour hanter de nouveau Baumugnes.
Mais je mâĂ©gare⊠Allons, pourquoi ne pas dĂ©couvrir les charmes de ces demoiselles de Venelles qui, jâose lâespĂ©rer, sauront porter haut et fier les vertus du terroir provençal et apporter un parfum de lavande et un souffle de puretĂ© dans le grand bastringue du « sport business ».
Je prends lâantenne, si jâose dire, Ă la faveur dâun temps mort. Et lĂ , quelle nâest pas ma surprise : lâentraĂźneur donne ses consignes dans une langue que jâai du mal Ă comprendre dans le brouhaha de la salle. Serait-ce du provençal ? Une rafale de Mistral (pas FrĂ©dĂ©ric, lâautre) dĂ©gage le banc managĂ©rial pour me plonger dans un abĂźme de perplexitĂ©. Le « coach » sâexprime en anglais, du moins le croit-il. Il sâagit pourtant dâun autochtone, un certain FĂ©lix AndrĂ©. OĂč va se nicher le snobisme !
La rencontre reprend. Jâai tout loisir dâadmirer la fĂ©linitĂ© de ces demoiselles. Le fait est quâelles sont plutĂŽt Ă©lancĂ©es. Elles dĂ©passent presque toutes le mĂštre quatre-vingt et deux dâentre elles frĂŽlent le mĂštre quatre-vingt-dix. Comment une si petite citĂ© peut-elle compter autant de grandes perches ?
Oui mais voilĂ , foin des Magali et autres Mireille chĂšres aux fĂ©libres, nos biquettes portent des prĂ©noms inusitĂ©s sous le ciel pur de Provence. Jugez-en plutĂŽt : Tamara, Elena, Domenika, Jasna, Marija, Ana Maria, Ludmila, Lydia, ShirleyâŠ
ArrĂȘtez⊠le volley-ball ne se joue-t-il pas Ă six. Certes, mais le banc des remplaçantes permet Ă lâentraĂźneur de « faire tourner » son effectif pour varier les tactiques et dĂ©stabiliser lâadversaire.
Je comprends mieux pourquoi le sieur FĂ©lix AndrĂ© sâexprime en un globish mĂątinĂ© de pidgin pour donner ses consignes. Il faut dire que cette vaillante Ă©quipe, fleuron dâune province Ă lâhistoire combien Ă©difiante, compte en ses rangs trois BrĂ©siliennes, une Slovaque, une MontĂ©nĂ©grine, une Serbe et une AlgĂ©rienne. Sophie et Murielle, les petites indigĂšnes, ont dĂ» se mettre trĂšs vite au multilinguisme sous peine de ne plus rien comprendre Ă la rĂ©alitĂ© du sport français.
Et moi qui croyais bĂȘtement que la mondialisation des dieux du Stade nâinfectait pour lâinstant que les vestiaires des arĂšnes des capitales europĂ©ennes et des mĂ©tropoles rĂ©gionales ! Câest sans doute cela quâon appelle une accĂ©lĂ©ration de lâHistoire dans la pĂ©tulante Europe en marche.
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Philippe Randa,
Directeur dâEuroLibertĂ©s.