Il y a quelques annĂ©es, dans le bimensuel Flash, codirigĂ© dans une belle et bonne humeur avec Philippe Randa et quelques autres camarades, nous avions consacrĂ© un plein numĂ©ro Ă lâidentitĂ© française. Et la question fut posĂ©e Ă une trentaine de journalistes, Ă©crivains et essayistes, tous plus ou moins issus de ce quâil est convenu de surnommer la « mouvance nationale. »
Trente intervenants ? Et autant de rĂ©ponses diffĂ©rentes Ă la question consistant Ă dĂ©finir sa propre « francitude ». Pour aller court, mĂȘme au sein du courant en question, pas un nâĂ©tait dâaccord avec lâautre. Quâaurait-ce Ă©tĂ© si nous avions interrogĂ© les patriotes de lâautre rive⊠Une chance de ne pas avoir Ă©voquĂ© une possible identitĂ© europĂ©enne, le boxon aurait atteint des sommets himalayens. Et pourtantâŠ
En des moments oĂč le problĂšme identitaire est au cĆur de tous les dĂ©bats, la question se pose plus que jamais, surtout en ces temps dâimmigration de masse. Racines chrĂ©tiennes de lâEurope ? NaguĂšre, Jacques Chirac a coupĂ© court au dĂ©bat, alors que tous les pays membres du Vieux continent Ă©taient plus ou moins dâaccord sur la question. Certes, avant les Ă©glises, il y eut lâAcropole. Mais il y eut des synagogues avant quâon y Ă©difie des cathĂ©drales, Ă©rigĂ©es sur des lieux⊠paĂŻens. Et quant au christianisme ayant largement contribuĂ© Ă façonner France et Europe, nâoublions pas, avec tout le respect quâon Lui doit, que le Christ est nĂ© de mĂšre juive et de PĂšre inconnu, soit un concept issu des dĂ©serts orientaux et pas forcĂ©ment compatible avec la religion des forĂȘts de BrocĂ©liande⊠Et, surtout, que la Sainte Russie fut polythĂ©iste et musulmane avant de devenir citadelle chrĂ©tienne dâobĂ©dience orthodoxe.
IdentitĂ©, donc⊠Lâhistoire nous enseigne quâelle est plus civilisationnelle quâethnique ou religieuse â un Noir chrĂ©tien sera toujours plus proche dâun Noir musulman quâil ne le sera dâun Arabe mahomĂ©tan. La mĂȘme histoire nous dit encore que lâEurope fut rĂ©ceptacle dâinnombrables invasions â flux migratoires dâalors, donc â venus de lâEst. Mais Ă©galement dâautant dâĂ©changes, parfois belliqueux et dâautres non, avec le sud de la MĂ©diterranĂ©e ; allez Ă Amalfi ou Assise, en Italie, pour vous en convaincre.
De mĂȘme, saint Augustin Ă©tait aussi « algĂ©rien » et les plus antiques monuments chrĂ©tiens seraient plutĂŽt du cĂŽtĂ© dâAlep, de Bagdad que de ChartresâŠ
Le problĂšme civilisationnel consiste aujourdâhui Ă faire sâaccorder toutes ces influences pour en faire autant de concordances. En ce sens, la France nâest pas la nation la plus mal placĂ©e. Nous sommes Ă la fois un pays celte, germain, grec et latin, maritime et continental, un peu Ă la croisĂ©e des chemins.
Les problĂšmes identitaires sont donc, par nature, des plus complexes. Nos compatriotes noirs des Antilles furent français avant les Niçois et les Savoyards ; un tel rappel historique peut agacer, mais demeure indubitable, car relevant du simple ordre factuel : lâĂąge dâor ethnique nâexiste pas. Cette mĂȘme identitĂ© française, voire europĂ©enne, relĂšve donc du temps long et non point du temps court.
Ă lâaune de ce dernier, elle paraĂźt Ă©videmment menacĂ©e, au vu des flux migratoires plus haut Ă©voquĂ©s, qui bousculent la vie des Français, quand ils ne pourrissent tout simplement pas leurs modes de vie. Ă celle du premier, il sâagit dâune tout autre histoire. Comment concilier lâun et lâautre ? Prendre en considĂ©ration les angoisses immĂ©diates autant que lĂ©gitimes de nos compatriotes et celles, toutes aussi lĂ©gitimes, de ceux prĂ©fĂ©rant anticiper lâavenir que de le subir ? La dĂ©funte acadĂ©micienne Jacqueline de Romilly assurait que pour faire la jointure entre les deux rives de notre Mare Nostrum, mieux valait enseigner Ă nos tĂȘtes plus ou moins blondes lâancestral hĂ©ritage dâHomĂšre, histoire commune Ă ce que fut le berceau de la Grande Europe, au sens le plus large qui soit, quâune sous-culture europĂ©enne de provenance amĂ©ricaine.
En cette histoire commune, elle incluait Ă©videmment lâislam, magnifique hĂ©rĂ©sie chrĂ©tienne, mĂȘme si aujourdâhui malmenĂ©e par certains de ses sectateurs les plus Ă©chevelĂ©s.
VĆux pieux, peut-ĂȘtre ; mais direction, sĂ»rement.
Mais pour cela, il faudrait Ă©videmment un gouvernement qui puisse ĂȘtre Ă la hauteur des enjeux, ce qui nâest pas forcĂ©ment gagnĂ© dâavance.
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Philippe Randa,
Directeur dâEuroLibertĂ©s.