6 décembre 2018

Juin l’Africain, ausculté et « soigné » par la Faculté

Par Jean-Pierre Brun

Alors que dans les années soixante, jeune étudiant, je cherchais à me faire une religion sur l’ histoire de notre pays entre 1939 et 1945, un de mes maîtres de conférences me conseilla de consulter les travaux d’universitaires étrangers, anglo-saxons de préférence. Dans les amphis de nos facs, l’appellation « politiquement correct d’origine contrôlée » n’avait pas encore cours mais, de fait, son concept émergeait doucettement dans l’indifférence générale.

Au fond des locaux techniques des organes de presse et des maisons d’édition, les stations d’épuration des eaux troubles de la IIe guerre mondiale pompaient et filtraient déjà pour déverser une information certifiée potable, hautement recommandée pour abreuver les nourrissons de l’instruction publique et un cheptel électoral anémié (« Les Français sont des veaux ! »).

Georges Orwell avait déjà parfaitement décrypté ce qu’il appelait le langage idéologique : « Il est destiné à rendre vraisemblable les mensonges, respectables les meurtres, et à donner l’apparence de la solidité à ce qui n’est que du vent ».

2018, rien de nouveau sous le soleil, encore que…

Le temps ayant fait son œuvre, certains universitaires, contraints et forcés, admettent qu’il est devenu impossible de glisser les pavés de faits avérés sous le tapis, comme de vulgaires poussières de l’ histoire. Ils recourent alors à une méthode de contournement leur permettant de se prévaloir de l’objectivité qui sied à un historien digne de ce nom. À défaut de prouver, ils suggèrent. Le but est atteint, non pas en frappant la cible en son cœur, mais en l’abattant par une onde de choc astucieusement provoquée. L’effet domino en quelque sorte.

Le Juin, maréchal africain que vient de publier l’universitaire Guillaume Denglos met en évidence ces techniques. Selon ses propres termes, l’auteur s’est efforcé de traiter la biographie d’une personnalité « déroutante » qui a été « tour à tour lyautéen, maréchaliste, gaullien, sympathisant de l’OAS et des intégristes de la cité catholique ».

Cette énumération illustre le procédé utilisé pour donner du personnage étudié, une image suggestive, savamment floutée. Il s’agit en la circonstance de manipulations lexicales qui consistent à utiliser un mot dont l’acception, voisine du mot juste qu’il conviendrait d’utiliser, instille la confusion.

Lyautéen ! Juin vouait, il est vrai, une admiration quasi filiale au maréchal, faisant sien le but de son action : conduire le Maroc vers son indépendance en le dotant des structures d’un pays moderne tout en tenant compte d’une réalité ethno-sociologique lourde de turbulences déstabilisatrices. Il va sans dire que le contexte international des années cinquante n’était plus le même que celui du début du siècle. C’est pour Guillaume Denglos le moyen de faire de « Juin, un élève dévoyé de Lyautey ». Ni vu, ni connu, passez muscade ! « Dévoyé » tel un fils de famille indigne. Il fallait y penser.

Maréchaliste, un bien gros mot ! Aujourd’hui son amalgame avec le collaborationnisme est devenu inaltérable, et pourtant. Faut-il rappeler qu’un autre maréchaliste, Maxime Weygand, n’était pas pour autant collaborationniste. Son procès se termina d’ailleurs en 1948 par un non-lieu général. Que dire du colonel Rémy, résistant incontestable, compagnon de la Libération, qui osa rapporter la confidence du général de Gaulle portant sur la période de l’Occupation : « J’étais l’épée, Pétain le bouclier ».

Il en va de même avec le qualificatif de « gaullien » dont l’emploi, très subtil, joue sur une confusion quasi subliminale avec le mot « gaulliste » qui qualifie une appartenance à un courant politique. « Gaullien » ne doit s’appliquer qu’à la pensée du Général. En quoi d’ailleurs, la pensée d’Alphonse Juin serait-elle gaullienne ? Cela reste à démontrer. Gaulliste ? Le maréchal ne l’a jamais été. Qu’importe, dans l’esprit d’un lecteur non averti, s’insinue une analogie sournoise avec un retournement de veste des plus péjoratifs.

Sympathisant de l’OAS. Là encore ce fameux amalgame joue à plein. Comprendre les raisons de la révolte de centurions est une chose, la cautionner en est une autre. Le 22 avril 1961, prenant connaissance du putsch, Juin fait ainsi part de son désaccord : « Ils sont fous, c’est complètement idiot ».

Concernant les événements qui s’ensuivent, Il garde un silence lourd de signification. Mutisme que rien ne viendra troubler. Il est d’ailleurs à noter que nombreux seront les Pieds-noirs qui lui reprocheront son refus de s’engager dans les derniers combats de l’Algérie française. Ce n’est qu’une fois scellé le sort de cette dernière, qu’il sortira de sa réserve pour réclamer l’amnistie de ses défenseurs.

Dernière illustration de cette technique insinuante, le traitement infligé à la Cité Catholique. Cette œuvre est toujours restée fidèle à Rome. Elle a d’ailleurs refusé de s’engager derrière Monseigneur Lefèbvre et les authentiques mouvements intégristes. Néanmoins le fielleux lapsus permet de coller dans le dos de Juin, tel un « poisson d’avril », une étiquette qui se veut infamante, alors qu’on pourrait tout au plus le qualifier de traditionaliste.

En appliquant pareille méthode au général de Gaulle on serait en droit de qualifier de « déroutante » sa personnalité. N’a-t-il pas été, eu égard à ses affinités intellectuelles et à son parcours politique, tour à tour monarchiste, maurrassien, maréchaliste, rebelle (ce que Juin, officier républicain, a toujours refusé d’être) sympathisant des Soviétiques, partisan prétendu de l’Algérie française et catholique traditionaliste. Cocasse, non ?

C’est certainement ce qu’on appelle une drôle d’histoire.

Juin, marechal africain, Guillaume Denglos, Belin, 464 Pages 26,00 € )

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