31 décembre 2016

Vers l’alittérature contemporaine

Par Nicolas Bonnal

 

« Le public ne peut pas comprendre cette arme, et donc ne peut pas croire qu’il est attaqué et soumis par une arme » (Silent weapons for quiet wars).

Alexandre Soljenitsyne avait fini par reconnaître qu’en Union soviétique « on donnait une culture classique au peuple ». Et en occident ? Ne lui donne-t-on pas au contraire une inculture classique, au peuple ou ce qu’il en reste ?

La culture de masse planétaire se fait à coups de cinéma puéril en 3D, de livres d’ésotérisme déments, de jeux vidéo sadiques bons pour tueurs de masse, de soap opéras pour sourdes-muettes, de drugstores bourrés de sucreries et de best-sellers sélectionnés par le NYT et tous ses clones. Partout les mêmes effets sur des masses sans nations ni idéaux. Comme disait déjà le sociologue marxiste Adorno : « La répétitivité, la redondance et l’ubiquité qui caractérisent la culture de masse moderne tendent à automatiser les réactions et à affaiblir les forces de résistance de l’individu. »

La culture contemporaine postérieure à mettons 1950 m’a toujours répugné sous sa forme élitiste ou de masse ; je n’ai jamais été bien seul à le penser, précédé par Céline, Soljenitsyne ou par Huxley, mais il était trop tard…

La culture dans laquelle nous vivons, et qui a tourné le dos à notre patrimoine, qu’il s’agisse de Lady Gaga, du bouquin Millenium, du jazz, du rap, de « la peinture contemporaine » ou du film Avatar, n’est pas fortuite, elle n’est pas le fruit des goûts du public et du génie naïf de ses initiateurs. Cette culture, remarquait déjà le comte Tolstoï, n’est plus chrétienne, n’est plus enracinée dans l’histoire d’un peuple ou dans un sol ; elle est liée au conditionnement de masse, elle est abstraite et massifiée, elle a des buts abscons et des objectifs précis, mondialisés, qu’on peut aussi retracer à travers l’histoire de « l’alittérature contemporaine » ou du cinéma post-classique. La musique moderne doit rendre fou, disait déjà Adorno. La pollution sonore sert à détruire la personnalité humaine. Cela s’est du reste toujours su avant la bataille, même du temps des Grecs et des Romains…

Par exemple, on sait que le jazz, imposé partout au milieu du siècle passé, a été fabriqué à l’époque de Gershwin et il a sciemment remplacé les negro-spirituals traduits par la grande Marguerite Yourcenar. Il a contribué à la déchristianisation des Noirs américains, chose visible aussi dans le très beau biopic de Taylor Hackford sur Ray Charles. Ces Noirs US ont été rendus teigneux et ressentis par le système dans les années soixante, et je me souviens qu’Alain Daniélou, musicologue de l’UNESCO, l’observait déjà dans ses mémoires.

Quant aux rappeurs, ils ont accompagné le million de jeunes Noirs américains tués pour quelques trottoirs de drogue… À chacun ses vices : le cinéma classique hollywoodien lui-même devient pénible pour qui observe que tout le temps on voit des personnages fumer des Marlboro (dans chaque scène pour John Wayne ou Errol Flynn) ou absorber le whisky Seagram des Bronfman, les financiers de l’ADL…

On sait depuis longtemps que, comme le rock, la culture beatnik a été lancée et encouragée pour détourner les activités des plus entreprenants de la politique.

Le marxisme-léninisme a été court-circuité de cette manière par la CIA qui promotionnait des agents d’influence et des artistes abstraits comme Pollock (l’art soviétique faisait ainsi vieillot…).

L’intronisation des drogues et de la contre-culture correspond à un projet policier et politique : on peut citer les projets MK-Ultra, Cointelpro, Artichoke dont Hollywood s’inspira peu et mal à une époque plus contestataire.

Ken Kesey, l’auteur du Vol au-dessus d’un nid de coucous, essayait les drogues pour les programmes de contrôle mental. Les univers parallèles ont été plus faciles à contrôler que les partis politiques à noyauter.

Quant à la révolution sexuelle, elle était déjà perçue comme un remède à l’esprit contestataire par Huxley… ou par les tyrans antiques ! Elle a débouché sur une pornographie de masse accessible à tous sur le réseau, mais aussi sur les meutes hargneuses du politiquement correct.

Mais le sexe n’est pas la seule arme de destruction massive du monde anglo-saxon. L’œil du voyeur fusionne avec celui du délateur. Le corps du petit monstre des Télétubbies, émission emblématique chargée de conditionner… les bébés (antiracisme, héliotropisme, sociabilité de bonobo, animalisation, consumérisme) est déjà orné d’un énorme écran blanc. L’enfant est un hardware qui marche et qu’on programme jusqu’à l’âge adulte. Si vous lui demandez plus tard un dessin, il vous dessinera tous les canons laser du monde destructeur de ses jeux vidéo.

Dans le même esprit, bien sûr, toute la culture « sexe drogue et rock’n’roll » de la génération du Baby-Boom a eu un seul but : abrutir la jeunesse et pour plusieurs générations, répandre le consumérisme, l’hédonisme et le nihilisme, détourner et canaliser ainsi toutes ses énergies : il faut se transformer en canal, en iPod (cosse de l’oignon, en anglais), en tube (you… tube ?).

Cette possession – ou connexion – induit bien sûr la référence au satanisme, qui a été évidente dans la musique heavy metal, puis dans la littérature pour enfants (Harry Potter, War Craft, et tout le reste) et la culture pop contemporaine via des bourriques comme Rihanna, Gaga ou Beyoncé qu’un œil expert nous invite sur Youtube à voir d’un autre œil avec leur symbolisme maçonnique de bazar.

Dans son discours de Harvard, Soljenitsyne parle d’ailleurs des « musiques insupportables » qui nous envahissent et nous abêtissent de tous côtés. L’auteur du Petit Prince, Antoine de Saint-Exupéry, s’était fait insulter pour avoir écrit que l’on pouvait écouter du Mozart à l’usine… mais en Union soviétique.

Ce n’est pas un hasard d’ailleurs si, dans les films hollywoodiens, les assassins et les tortionnaires sont toujours présentés comme des hommes cultivés. Pour être bien vu en occident, il faut être un crétin. Le cinéma intelligent et artistique est d’ailleurs depuis longtemps réservé aux maîtres russes comme Tarkovsky, Kravtchouk ou Sokurov !

Le désarmement moral de la culture de masse américaine est allé de pair avec les délocalisations et la désindustrialisation forcée. On a ainsi liquidé avec les syndicats les risques de mobilisation populaire et on a dispersé tout le monde avec l’automobile.

Mais le grand outil de l’arme silencieuse est bien sûr la télévision, avec sa propagande et ses pseudo-événements qui sont décrits par le lucide et courageux Daniel Boorstin (le sport, les élections, la météo, la mode, le people,…).

Comme le cinéma, mais en permanence, la télévision fournit un modèle mimétique. Il faut créer le troupeau d’animaux bien dociles, comme disait le génial Céline. L’offensive philosophique a été menée en Amérique par la publicité, issue de la propagande de guerre (Edouard Bernays), puis par l’école de Francfort et par exemple sa chasse systématique à la figure autoritaire.

On a ainsi promu comme le prévoyait l’irréprochable Adorno la figure de l’homosexuel, on a diabolisé le père de famille autoritaire, on a transformé la femme en petite madame Bovary de série, éternellement endettée, stressée et divorcée, on a créé l’ado rebelle insatisfait et demeuré avec sa casquette retournée ; revoyez L’Équipée sauvage avec Marlon Brando qui remplace dès 1953, avec le suicidaire James Dean, les héros traditionnels comme John Wayne et James Stewart.

On a détruit la famille (l’individu doit être nu devant le marché), puis l’idée de nation, jugée fascisante par les multinationales et l’impérialisme, et, bien sûr, celle de civilisation ; on ne parlera pas de la race puisqu’elle n’existe pas !

Pour liquider la contestation de type communiste, il fallait inciter à une perte de temps et à un grand désordre mental. On a alors créé le modèle du « jeune voyageur qui veut et doit découvrir le monde », ses plages, ses drogues, ses bières et ses excursions érotiques !

Pensez à Kerouac et la génération très crétine du routard qui gesticulait pour rien (revoir la balade des deux bikers débiles du film Easy rider). Cette bougeotte sans but ne vaut pas mieux finalement que la geste du touriste de masse (voir la fin géniale du film Casino) qui évolue tout gras dans un paysage recyclé et plastifié.

La culture comme arme de destruction massive est plus redoutable que n’importe quel bombardement. Elle nous sépare de notre histoire, de notre terre, de notre prochain, de nos compatriotes. Elle crée un « avatar » d’individu en marge de ce monde et prêt à être capté par la matrice du commerce américain qui peut ainsi imposer ses projets et ses jouets (pensez aux monstrueux Transformers).

L’usine à rêve a alors préparé le camp de concentration painless (indolore) dont parlait l’étonnant Huxley. Et la matrice virale américaine est difficile à substituer aujourd’hui car elle a envahi tous les cerveaux. Ce n’est qu’en étant armé moralement et culturellement contre elle que l’on peut s’en défendre avec sa famille et sa nation.

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Philippe Randa,
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