26 février 2023

Knock en chnoque

Par Euro Libertes

La chaîne publique « France télévision », garante de qualité comme de coutume, programme le lundi 13 février 2023 le Knock de Lorraine Lévy qui « revisite » l’œuvre de Jules Romains. Certes l’indigence du jeu de Louis Jouvet pouvait justifier le remplacement de ce cabotin sans talent dont la postérité ignore même l’existence.

En son temps l’auteur se méfiait déjà des adaptations cinématographiques de son œuvre, en raison justement des trop grandes facultés d’adaptation des metteurs en scène allant jusqu’à charcuter ses textes au nom d’une curieuse chirurgie esthétique.

La version projetée ce mois-ci, maintient non seulement le Vercors comme lieu d’implantation de ce cabinet médical surprenant mais aussi la période initiale dans laquelle se situe l’action. Il se trouve que mes grands-parents en sont originaires. J’ai peine à croire que dans ces années que j’ai vécues enfant, un médecin d’origine africaine ait pu y exercer son art. On pourrait déjà évoquer un malencontreux anachronisme.

Mais le droit de revisite permet toutes les fantaisies. Ainsi une rumeur circule concernant un nouveau tournage du Petit monde de Don Camillo avec Jamel Debbouze dans le rôle-titre et de Muriel Robin dans celui de Peppone.

Un regrettable conformisme explique mon opposition aux adaptations d’œuvres anciennes. J’admets néanmoins que des esprits éclairés puissent rajeunir le Cyrano d’Edmond Rostand en le transposant quelque part au-delà de la boucle du Niger sous l’autorité du débonnaire Béhanzin ou le Dialogue des carmélites de Bernanos dans un ksar d’un émirat arabe. L’art n’a pas de frontières et le financement public de notre cinéma n’a pas de limites surtout quand il s’agit de sortir de son « Marais-cage » le Bobo parisien.

M’efforçant toutefois d’une impartialité compatible avec ma nature de ronchon, j’ai recherché les critiques formulées dans la presse lors de la sortie de ce film.

Pour Le Figaro, « Omar Sy dans le rôle du médecin immortalisé par Louis Jouvet, peine à convaincre dans cette adaptation très, trop libre de la pièce de Jules Romains publiée en 1923. »

Le critique du Monde déplore « ce que la réalisatrice a infligé à cette pièce. C’est à la fois incompréhensible et déplaisant. »

La Croix n’est pas plus bienveillante : « Ce Knock version 2017 est un film rongé par la bêtise, sa laideur amidonnée, ses bons sentiments. On plaint la brochette d’excellents acteurs de cachetonner sans conviction, d’être allés se commettre dans pareil nanar. »

Quelqu’un pourrait-il m’expliquer la véritable raison de programmation d’un tel navet par nos censeurs émérites de la qualité télévisuelle ?

Étonnamment c’est, indirectement faut-il le préciser, que Télérama a esquissé un début de réponse à cette question impertinente : « C’est de prime abord l’une des bonnes nouvelles apportées par cette grosse production : un acteur noir tient, tout naturellement, un rôle du répertoire, jusqu’ici identifié à un blanc. »

Si c’est écrit dans ce conservatoire de la bien-pensance, que dire de plus, sinon de suggérer à un metteur en scène américain de confier le rôle de Sitting Bull à Bilal Hassani. Ce serait une autre bonne nouvelle.

Et si un producteur me proposait d’incarner l’oncle Tom ? Franchement, j’hésiterais à répondre favorablement, malgré l’immense talent que je déploie lorsqu’il s’agit d’interpréter un rôle de composition (je me suis glissé brillamment dans la peau du cheval de corbillard de Cent dollars pour un shérif, et j’en hennis encore de fierté). Mais non, je ne trahirais pas Harriet Beecher-Stowe.

Comme l’affirmait une voix aujourd’hui disparue : « Noir, c’est noir ! Il n’y a plus d’espoir… Brun c’est Brun ! Y’a bon le sens commun… »

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