4 mars 2016

Zuckerberg et l’aveuglement numérique des Européens

Par Nicolas Bonnal

 

De Barcelone, la photo de Mark Zuckerberg cheminant en baskets au milieu de colonnes d’imbéciles dotés du masque numérique de Samsung a fait le tour de notre pauvre monde. Le triomphe des corporations sur ces idiots visuels déconnectés de toute réalité spirituelle devient intégral. On voit alors se manifester la dictature numérique : un milliard de quidams se plongeant nuit et jour dans le monde virtuel. Au Dr Faust bradant son âme succède le zombi.

Le citoyen n’est même plus soumis, il est froidement aspiré par l’écran. Et les benêts consentants de se ruer ensuite sur Facebook pour se plaindre du nouvel ordre mondial…

Dans son œuvre maîtresse rédigée vers 1545, le jeune Étienne de la Boétie se demande : « D’où a-t-il pris tant d’yeux, dont il vous épie, si vous ne les lui baillez ? Comment a-t-il tant de mains pour vous frapper, s’il ne les prend de vous ? Les pieds dont il foule vos cités, d’où les a-t-il, s’ils ne sont des vôtres ? Comment n’a-t-il aucun pouvoir sur vous, que par vous ? Comment vous oserait-il courir sus, s’il n’avait intelligence avec vous ? Que vous pourrait-il faire, si vous n’étiez receleurs du larron qui vous pille, complices du meurtrier qui vous tue et traîtres à vous-mêmes ? »

Les impôts, les contrôles, les guerres, le terrorisme, les nouvelles invasions, nous acceptons tout sans broncher – parce que tout est devenu virtuel – ou tout au moins nous le croyons.

Nous collaborons alors activement à notre esclavage par cette passivité. Ni les Allemands ni les Grecs ne réagissent aux vagues de réfugiés coordonnées sur Facebook, et nos râleurs de Français se préparent à adouber Alain Juppé et les Américains à revoter Clinton, parce que l’ordre nouveau et numérique leur sommera tel jour de le faire.

Le Personal Computer porte les initiales de notre Politiquement Correct. Sans effort, aujourd’hui, on maintient des myriades d’êtres dits humains devant des écrans dont ils ne s’arrachent plus. Neuf heures par jour, dit-on souvent en Amérique.

Internet réalise la société aliénée qui comme dans la tyrannie antique repose sur le spectacle, les jeux, la consommation. La Boétie toujours :

« Les théâtres, les jeux, les farces, les spectacles, les gladiateurs, les bêtes étranges, les médailles, les tableaux et autres telles drogueries, c’étaient aux peuples anciens les appâts de la servitude, le prix de leur liberté, les outils de la tyrannie. »

Voyez Youtube et la Lady Gaga dont chaque trémoussement désossé et baphométique suscite un million de commentaires, et vous saurez de qui vous êtes entourés, naïfs.

Il peut se déhancher de bonheur, le jeune Zuckerberg, dont la montagne de sucre numérique a mythifié et dépossédé de leur âme des milliards de crétins. Ce ne sont pas ceux-là qui descendront un jour dans la rue pour remettre en cause un système de plus en plus toqué ; ce ne sont pas ceux-là non plus qui adresseront une parole, trouveront un travail, fonderont une famille, défendront leur patrie.

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