Le Jacobinisme et la puissance de l’État
C’est devenu une scie depuis la période soixante-huitarde et sa contestation tous azimuts que de dénoncer le « jacobinisme »… et, généralement, les polémistes semblent ignorer ce que fut réellement la lubie des Jacobins d’octobre 1789, lors des premiers débats d’idées au sein du Club, jusqu’à sa fermeture en novembre 1794.
L’unique doctrine constante des Jacobins – car il y eut foule d’avis contradictoires entre divas – fut la soumission de l’Exécutif au Législatif ; si l’on préfère : placer les ministres (et, de 1790 à 1792, le roi) sous la tutelle de l’Assemblée Nationale.
Les institutions de la Ve République ont tranché sur les éditions précédentes qui étaient effectivement ce que les savants nomment une ochlocratie : un pouvoir partagé par une foule, en l’occurrence celle des parlementaires, soumis en principe à la foule des électeurs. En réalité, les électeurs ont systématiquement été dupés par leurs élus.
Notre République actuelle, qui n’est plus du tout « jacobine », est comme les précédentes soumise aux décisions des maîtres de l’économie et de la finance. Et cela dure depuis la monarchie de Juillet, qui n’était nullement « jacobine », le Roi-Bourgeois ne tenant que rarement compte des avis, d’ailleurs très divergents, des ténors des assemblées.
Démocratie, depuis les années 1830, est devenue un synonyme de capitalisme, à l’exception de l’État français, tant vilipendé.
La mauvaise acception du terme « jacobinisme » est : centralisation. C’est ce que presque tout le monde croit comprendre, quand on ressort le terme pour impressionner l’auditoire, puisque après avoir été glorifié (jusqu’en 1958), il est devenu une appellation « maudite ».
Encore faut-il comprendre pourquoi cette centralisation administrative, politique, économique et financière est devenue « mauvaise », poussant les orateurs et les manifestants à la grogne.
D’abord, les vrais maîtres sont toujours centralisés. Les directions des banques, des grandes entreprises et de la filiale française des multinationales sont parisiennes, comme sont présents à Paris tous les preneurs de décisions.
Il est, en effet, plus simple de s’activer dans la même métropole pour se concerter (avec ou sans fâcherie), d’autant qu’il est vite devenu évident que les télécommunications – qui semblaient le meilleur argument en faveur de la décentralisation – sont très aisément espionnées voire piratées. Pour les « gens qui comptent », se voir et se parler discrètement reste essentiel et, pour ce faire, on n’a rien inventé de mieux que d’œuvrer dans un même lieu géographique.
Depuis la fin de la Grande Guerre, on a réclamé en France la décentralisation administrative et une certaine autonomie des régions (créées par l’État français du maréchal Pétain). L’ennui est que pour toute décision régionale importante, on se réfère « à Paris ». Et cette disposition d’esprit relève d’une logique historique.
Les débuts de l’unification administrative continue en France remontent au XIVe siècle – certes, Charlemagne avait tenté la chose dans son Empire, mais tout avait disparu dans les vingt années suivant sa mort. Les Allemagne sont restées divisées jusqu’en 1871. On comprend qu’en Allemagne, les Länder aient leur autonomie pour tout ce qui n’est pas régalien (monnaie, affaires étrangères, armée).
Quand l’on connaît le particularisme des extrémistes régionaux et des écologistes de France, l’on ne peut qu’approuver une centralisation administrative… à condition qu’elle soit vouée au seul bien de la Nation et nullement aux maîtres de la Finance ou aux envahisseurs.
De fait, le parisianisme actuel, qu’il ait été fluctuant et grotesque sous le règne des nullités chiraquienne et hollandienne, ou qu’il soit celui du très directif Emmanuel Macron, est parfaitement illégitime parce que la Nation n’y trouve pas son compte, à la différence des maîtres de l’économie et de la cohorte de leurs féodaux.
Dans l’actuelle réalité géopolitique, où s’affrontent des blocs de taille et de puissance monstrueuses, la concentration dans un pays est utile, à l’unique condition d’être au service de la Nation, elle-même appelée à se fondre dans un vaste empire (européen, pour l’exemple français), où les affaires courantes seraient traitées dans chaque sous-ensemble ethniquement homogène.
En notre époque de périls monstrueux, la décentralisation est une absurdité, car elle aboutit à éparpiller les forces. En revanche, le Pouvoir central doit être au service des autochtones et conserver les deux critères de la véritable démocratie : l’égalité de tous – gouvernés et gouvernants – devant la loi et l’attribution au seul mérite – donc par concours anonyme – des postes payés par l’argent public.
La véritable Démocratie est parfaitement compatible avec la concentration géographique du Pouvoir. La Démocratie exige uniquement le respect d’un tout petit nombre de principes dans la gestion du Bien Commun. On le sait depuis vingt-cinq siècles en Europe. Plutôt que d’aller butiner des vérités premières exotiques, il est important d’en revenir aux fondamentaux de notre Mère, la Grèce antique, et de notre Père, la Rome antique… en n’oubliant pas que dès la pratique des élections, tricheries, corruption et achat des votes sont apparues.
La Démocratie véritable exige une lutte de tous les instants contre la corruption et le favoritisme… les deux mamelles de la vie politique européenne actuelle.
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