La libéralisation des visas en faveur des Turcs
Dans une interview au journal brésilien Fohla de Sao Paolo, en date du 21 août, le Premier ministre hongrois, a estimé impossible d’autoriser les ressortissants turcs à voyager dans l’Union européenne (UE) sans visa, contrairement à la promesse faite par l’UE à la Turquie. Il estime en effet que les pays européens ne sont pas capables de tenir la promesse faite à la Turquie.
L’accord du mois de mars, entre l’UE et Ankara, prévoit que la Turquie reprenne les migrants arrivant en Grèce depuis ses côtes, ceci en échange de la suppression des visas pour les Turcs voyageant en Europe, et ce dès le mois d’octobre.
Pour mémoire, rappelons quelques faits : La frontière hongroise est le seul accès à l’espace Schengen dans la région. La Bulgarie et la Roumanie ne sont en effet pas encore membres de Schengen et la Grèce n’est pas en mesure de fermer ses frontières, notamment sur les îles. Tout comme les autres membres du groupe de Visegrád, la Hongrie estime que la Grèce devrait donc être exclue de Schengen et qu’une vraie frontière devrait être établie plus au nord. Il faut savoir aussi que toute décision à venir dépendra du respect de l’accord sur les migrants et des conditions préalables prévues par l’UE, mais aussi de l’approbation unanime de la mesure au Conseil de l’Union européenne et au Parlement européen. Si la Hongrie annonçait son veto, cela signerait l’arrêt de mort de l’accord.
Au mois de mai de cette année, un conseiller du président turc, Recep Tayyip Erdoğan, a menacé l’UE de lui envoyer des réfugiés si le Parlement européen n’approuvait pas la levée de l’obligation de visas pour les Turcs, alors que le Parlement européen s’apprêtait à discuter du rapport sur la libéralisation des visas vers l’Europe pour les citoyens turcs.
La menace n’était pas nouvelle, mais elle était cette fois adressée au Parlement européen, qui avait peu avant envoyé un message clair : la Turquie ne doit pas s’attendre à la suppression du régime de visa tant qu’elle ne remplit pas toutes les conditions prévues. Le rôle du Parlement européen est essentiel ici, dans la mesure où l’entrée en vigueur de l’accord est soumise à son approbation, ainsi qu’à celle de certains parlements nationaux.
Le Premier ministre hongrois considère dans la même interview que la libération des visas en faveur des citoyens turcs est « un énorme problème et un sujet très sensible », mais qu’il n’est pour sa part pas inquiet des menaces d’Ankara, en ce sens que la Turquie est incapable de mettre ces menaces à exécution parce que la frontière hongroise est également l’entrée vers l’Europe et que celle-ci est protégée à 100 % par la frontière du pays.
Cette déclaration de Viktor Orban est à resituer dans un contexte particulier, à savoir la volonté affirmée des pays de Visegràd, de revoir les frontières de l’Union européenne. Le groupe de Visegrád estime en effet que les frontières grecques avec la Bulgarie et la Macédoine devraient devenir la nouvelle frontière de l’UE, parce que la Grèce ne parvient pas à limiter le nombre d’arrivées sur ses îles. Athènes a récemment dénoncé la Hongrie, qui fait pression sur la Grèce pour qu’elle cesse de secourir les migrants en mer Égée, ce qui, selon Athènes, constituerait une violation du droit international.
Viktor Orbán a aussi commenté la situation en Turquie après le coup d’État manqué du 15 juillet : « S’il n’y a plus de stabilité en Turquie, cela causera un problème pour toute la région. Nous devons soutenir le gouvernement turc », a-t-il dit, avant de souligner que la peine de mort, dont le rétablissement est envisagé par Ankara, éloignerait la Turquie d’une adhésion à l’UE.
Le quotidien brésilien a confirmé que le Premier ministre avait également assuré qu’en termes de politique étrangère, il serait meilleur pour l’UE que Donald Trump l’emporte sur Hillary Clinton aux élections américaines.
À la question de savoir s’il soutenait réellement le candidat républicain, il aurait répondu : « Oui. La politique étrangère de Donald Trump serait meilleure [pour l’Europe]. Les démocrates estiment que l’arrivée de migrants en Europe ne doit pas être contrôlée, ce qui est très dangereux. Donald Trump est favorable au contrôle des migrants. Il est en outre opposé à la construction de la démocratie dans d’autres pays, et je suis d’accord sur ce point. »
Il ne faut pas oublier que la Turquie, pays d’Asie à la démographie galopante, se présente comme pays candidat à l’adhésion à l’UE, tout en occupant militairement, depuis 1974, un état membre de l’Union européenne, victime de l’agression ottomane la même année, qu’elle exerce des menaces et des pressions inadmissibles sur l’Europe et pratique le chantage à la démocratie après la récente tentative de coup d’état. Aujourd’hui des milliers de journalistes, avocats, juges, militaires et personnalités de la société civile sont mis en examen ou arrêtés, le pays est de plus en plus islamisé et nombre de Turcs laïcs se considèrent désormais comme menacés. Enfin, l’invasion turque en Syrie, en violation du droit international public, vise bien plus à combattre le peuple kurde, que l’État islamique…
La position de Victor Orban, majoritaire dans l’opinion de l’Union européenne, paraît frappée au coin du bon sens.
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Philippe Randa,
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