Détournement de populismes
L’électorat petit blanc des États-Unis risque de se réveiller avec une effroyable gueule de bois. Sa désillusion politique peut être immense avec l’entrée en fonction de l’administration Trump. Passe encore que cette équipe rassemble des multimillionnaires, ce qui se comprend dans un pays qui s’imagine que gérer une entreprise équivaut à diriger un État. Constitué de plusieurs responsables issus de Goldman Sachs, le nouveau gouvernement envisagerait d’annuler toutes les restrictions prises au lendemain de la crise financière de 2008 contre l’hypertrophie bancaire et pourrait déjà exaspérer une population largement surendettée.
Si Donald Trump n’applique pas ses promesses contre le financement illimité des campagnes électorales et l’indispensable séparation des banques, il prouvera qu’il a canalisé, instrumentalisé et neutralisé le formidable désarroi populaire. Il a déjà désavoué l’Alt Right (cette « Droite alternative » révélée par la récente présidentielle). Mais Trump et son entourage peuvent-ils agir autrement tant leur affligeante constitution les ligote ?
Trump n’est pas le seul à pouvoir ainsi détourner la juste colère des électeurs. Pensons à la Grèce martyrisée avec le consentement du gouvernement croupion des souverainistes de l’ANEL et de la gauche radicale Syriza de l’infâme Tsipras qui a transformé la victoire référendaire du non en une soumission totale à la Troïka. Mentionnons aussi les nationaux-libéraux de l’AfD en Allemagne, le parti néerlandais de Geert Wilders, le FPÖ autrichien qui s’entend avec le parti Russie unie et se distancie de son allié français, ou l’UKIP national-mondialiste britannique.
Le summum est cependant atteint avec les Italiens du Mouvement Cinq Étoiles. L’administration de la ville de Rome depuis juin dernier vire à la catastrophe. La mairesse Cinq Étoiles de Turin s’appuie, elle, sur les banques et le politiquement correct… Et passons sur sa dernière bouffonnerie au Parlement européen : la tentative avortée de Beppe Grillo de rejoindre le groupe libéral centriste. Tous ces partis troquent volontiers leur radicalité supposée pour une fumeuse respectabilité politico-médiatique.
En France, le parti de la Rose bleue poursuit la même démarche d’affadissement avec l’espoir bien illusoire d’emporter les prochaines échéances électorales…
Comme l’a démontré le troisième tour de la présidentielle autrichienne de décembre dernier, les concessions incessantes démobilisent surtout un électorat très remonté sans pour autant attirer des électeurs hésitants. Les succès du premier tour préparent les défaites du second tour. Les formations dites « populistes » d’Europe occidentale devraient se pencher sur la fin du national-populisme en Roumanie où l’excès et la caricature se mêlaient à un esprit de compromission permanente avec le Pouvoir.
Fort heureusement échappent à cette tendance CasaPound en Italie, le NPD qui vient d’échapper à la dissolution en Allemagne, Aube Dorée en Grèce, l’ELAM (ou Front populaire national) à Chypre, le mouvement Kukiz’15 en Pologne et le Parti Populaire – Notre Slovaquie. Malgré l’adversité et une répression impitoyable, ces forces vives gardent leur tonalité révolutionnaire, leur intransigeance doctrinale et une fantastique rigueur militante.
Cette chronique hebdomadaire du Village planétaire a été diffusé sur Radio Liberté le 10 février 2017.
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