La cour constitutionnelle allemande bloque le plan de relance de l’UE
Par article conseillé par EuroLibertésPar Olivier Bault.
Saisie par des économistes, dont Bernd Lucke, un des fondateurs de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), la Cour constitutionnelle allemande a interdit vendredi au président allemand de signer la ratification du plan de relance Next Generation UE qui venait d’être approuvée par le Parlement (sans les voix de l’AfD et de Die Linke – La Gauche). Le président Frank-Walter Steinmeier va donc devoir attendre l’examen sur le fond de la plainte des économistes pour qui la dette commune que doit contracter la Commission européenne au nom des 27 est contraire aux traités, et notamment à l’article 310 (« Le budget doit être équilibré en recettes et en dépenses ») et à l’article 311 (« Le budget est intégralement financé par des ressources propres ») du traité sur le fonctionnement de l’UE. Les dettes, argumentent ces économistes, ne sont pas des ressources propres, et c’est donc à chaque Etat membre de les contracter en son nom.
Sur les 750 milliards d’euros qui seraient mis à disposition des 27 dans le cadre de ce plan de relance, 390 milliards le seront sous forme de subventions et 360 milliards correspondront à des prêts. Le tout sera financé par des dettes contractées par la Commission européenne au nom des 27, le but étant à la fois de gonfler provisoirement les fonds européens alloués aux Etats membres et, pour la partie prêtée par l’UE à ces États, de faire bénéficier des pays comme l’Italie ou la Grèce de taux d’intérêt moins élevés. En cas de défaillance d’un pays, ce sont les 26 autres qui devront rembourser sa dette au prorata de leur contribution au budget de l’Union. L’Allemagne, qui bénéficie le moins de cette dette commune, puisqu’elle peut emprunter aux meilleurs taux sans passer par l’UE, aura donc le plus à rembourser les dettes de ceux qui manqueraient à leurs obligations. Concrètement, elle pourra percevoir 23 milliards d’euros de subventions du plan de relance mais aura à garantir près de 100 milliards d’euros de prêts.
L’autre défaut du plan de relance Next Generation EU, c’est qu’il impose aux pays membres comment ces fonds doivent être utilisés : 37 % doivent être affectés à la lutte contre le réchauffement climatique et 20 % au développement de l’économie numérique. En outre, chaque pays doit faire approuver son propre plan de relance par la Commission européenne, ce qui constitue de fait un transfert de souveraineté supplémentaire au bénéfice d’une institution sans légitimité démocratique.
Pour que la Commission puisse lancer des emprunts, il faut d’abord que les 27 parlements nationaux aient ratifié le plan de relance. Parmi les onze pays qui ne l’ont pas encore fait, il y a les quatre pays dits « frugaux », c’est-à-dire ceux qui respectaient la discipline budgétaire avant la crise et étaient réticents à l’idée de mutualiser la dette. Il s’agit de l’Autriche, des Pays-Bas, du Danemark et de la Suède. En Pologne, qui n’a pas non plus ratifié, la coalition gouvernementale dirigée par le PiS est divisée sur la question en raison du mécanisme conditionnant le versement des fonds européens au respect d’un « état de droit » défini de manière vague, car ce sera un puissant instrument de chantage entre les mains des institutions européennes. Le ministre de la Justice, opposé à la fois à la mutualisation de la dette et à ce nouveau mécanisme accompagnant le nouveau budget et le plan de relance, avait promis en janvier de saisir le Tribunal constitutionnel polonais mais il ne l’a pas encore fait. Il a en revanche applaudi la suspension de la ratification du plan de relance par la Cour constitutionnelle allemande.
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