L’automne arrive et, avec la chute des feuilles d’arbre, les referenda se ramassent à la pelle. Après le référendum de septembre 2014 sur l’indépendance de l’Écosse marquée par la nette victoire du non, deux referenda d’autodétermination se sont respectivement déroulés le 25 septembre au Kurdistan irakien et le 1er octobre en Catalogne. Ces deux consultations n’avaient aucun caractère officiel légal pour être entérinées par les autres États.
Même si les Catalans ne sont pas des Kurdes et les contextes politiques, culturels, historiques, sociaux et économiques très différents, on demeure frappé par le parallélisme des démarches. Depuis 1991, le Kurdistan du nord de l’Irak dispose d’une très large autonomie interne. La Catalogne bénéficie, quant à elle, d’un puissant gouvernement régional grâce à la Constitution de 1978. Cette liberté politique est toutefois entravée par la rivalité politico-tribale entre le PDK (Parti démocratique du Kurdistan) du clan Barzani et l’UPK (Union patriotique du Kurdistan) de Talabani (qui vient de disparaître) ainsi que d’une dette colossale et d’un état déplorable des finances publiques pour la Généralité de Catalogne.
L’initiative kurde s’inscrit dans l’affirmation militaire de ses forces dans la région : reprise des hostilités entre les Turcs et le PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), constitution en Syrie du Rajova socialiste-libertaire aux portes de la Turquie, volonté d’émancipation des Kurdes d’Irak. Entre un « Arc chiite » presque réalisé, le magistère russe au Proche-Orient et une « réaction sunnite » éclatée entre Ankara – Doha et Riyad – Abou Dabi, Washington et Tel-Aviv préfèrent désormais encourager les ambitions kurdes historiquement sensibles au sionisme, pensant ainsi contrarier toute hégémonie régionale perso-russe, voire sunnite.
La Catalogne réclame pour sa part son indépendance, ce que refuse le gouvernement central conservateur minoritaire et corrompu de Madrid au nom de l’ordre constitutionnel. Or ce même gouvernement a quand même approuvé le pseudo-scrutin de l’opposition au Venezuela et dénie toute légitimité à l’Assemblée constituante à Caracas. Madrid fait en outre pression sur Barcelone, quitte à recourir à des dispositions liberticides.
Il ne faut cependant pas se réjouir de ce réveil tardif des peuples. Les séparatistes catalans ne se disent pas nationalistes et les Kurdes se veulent d’excellents démocrates selon le pseudo-philosophe Botul-Henri Lévy. Les partis en pointe dans la revendication catalane proviennent de la démocratie chrétienne affairiste, de la gauche républicaine et de l’extrême gauche radicale. Ces formations ne se préoccupent jamais des ravages de l’immigration extra-européenne, ni de l’expansion de l’islam ; elles rejettent plutôt le non-Catalan hispanophone et rêvent d’une nation contractuelle multiculturaliste, féministe et « gendériste ».
Alors que la puissance s’exprime désormais en grands espaces continentaux organisés, à quoi bon qu’il y ait une Catalogne et/ou un Kurdistan indépendants si cette souveraineté ne sert que les minables intérêts d’une clique politicienne toujours prête à se répartir la manne pétrolière (ou commerciale) et à suivre les injonctions du « Bloc occidental atlantiste » ? Pour la circonstance, autant les nationalismes étatiques que les indépendantismes régionaux sont les alliés objectifs zélés du mondialisme.
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Cette chronique hebdomadaire du Village planétaire a été diffusée le 13 octobre 2017 sur Radio-Libertés.
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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.
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Georges Feltin-Tracol, écrivain et collaborateur de nombreuses revues (notamment "Réfléchir & Agir") et site internet ; chroniqueur sur "Radio Libertés". Il se désigne aussi parfois comme un traditionaliste post-moderne ou un archéo-futuriste. Dernier livre paru : "Pour la troisième voie solidariste. Une autre approche de la question sociale" (Éd. Synthèse)