Le lait de vache est le produit le plus commun pour tous les pays d’Europe. Et les contrées ukrainiennes savaient en faire un bon usage. Ici, nous devons remarquer que la culture du fromage si répandue en Europe occidentale, n’existait pas en Ukraine à l’époque des princes de Kiev et des cosaques. Mais le lait pur et tous ses dérivés, si !
Les produits lactés principaux ukrainiens sont le lait, le beurre, la riajanka, le varenetz, le syr, un fromage blanc, et la smetana, une espèce de crème fraîche, douée d’un goût aigrelet et spécifique, propre uniquement à ce type de fermentation. Les deux derniers sont bien appréciés parmi tous les Slaves orientaux. Sans ces produits, la cuisine populaire ukrainienne est impensable : ils servent de bouillon et de farce, de sauce et de base pour la pâte, sucrés et salés, piquants et doux ! Aucune recette des anciens livres culinaires ne se passait de smétana !
Citons ici quelques lignes de notre écrivain romantique Grygoriy Kvitka-Osnovyanenko où il décrit la belle vie et l’enfance de son héros pantagruélique du XVIIIe siècle : « Nous étions élevés avec tout le zèle et toute la sollicitude possibles, on ne manquait de rien. Le matin la bouillie au lait nous attendait déjà, ou les nouilles au lait, et une omelette…
Ensuite, en laissant les autres enfants partir, ma mère me retenait auprès d’elle et amenait de son petit garde-manger une portion spéciale et très bien préparée des blinis ou des pirojkis avec abondance de beurre, de smétana et d’autres bonnes mangeailles. »
Et je ne vous dis pas la somptuosité du déjeuner, où le bortsch était bien arrosé par la smétana, et de nombreux desserts ; mais je vais directement au goûter : « Au goûter on nous servait du lait, de la smétana, du fromage blanc frais, des omelettes des sortes différentes – le tout en abondance. Vers le soir on se « réconfortait » : d’habitude on nous donnait les restes froids du rôti du déjeuner ou un cochon de lait fraîchement préparé, ou quelque chose d’approchant. Et au coucher du soleil on allait dîner : les galouchkis au beurre dans le lait, le « kvasok » (c’était un mets particulier de viande avec des oignons sautés. Et quelle saveur appétissante ! Dans les meilleures maisons, sur les meilleures tables, on ne le voit plus !), le saucisson grésillant sur la poêle – et toujours – les varenikis (raviolis) au beurre et inondés de la smétana ! » (Pour les varenikis et la galouchkis, nous promettons d’assigner un chapitre à part dans nos chroniques culinaires !)
Gogol lui-même, dans ses célèbres Soirées de Dikanka, évoque des dizaines de fois ce bon produit de smétana.
À l’époque, seule la cuisine française pratiquait l’usage de la crème fraîche fermentée, mais après la IIe Guerre mondiale, la crème fraîche slave – la smétana – a gagné les cœurs et les estomacs de l’Europe centrale et de l’Amérique où elle se trouve sous des noms différents.
Le dérivé du lait – le lait caillé ou le kysliak – était et reste une boisson très populaire parmi les Ukrainiens. Pour sa préparation, il ne faut que laisser tourner le lait frais, mais ce n’est pas si simple de nos jours, car on ne trait plus nos vaches et on achète des paquets de produits lactés bien pasteurisés ou trop stérilisés sans une seule bonne bactérie vivante, enfermés dans des boîtes dont les dates d’expiration peuvent nous faire peur !
Ce lait caillé nous donne à son tour deux produits bons et différents : le petit-lait (oui, oui ! Buvez-le comme le petit-lait et il renforcera vos muscles et vos os !) qu’on utilisait pour « blanchir » les bortschs et les soupes, pour faire cuire les bouillies, pour préparer le pain, les gâteaux, les crêpes. Deuxième produit – c’est le syr – ou le fromage frais qui se sépare tout seul (ou avec un petit réchauffement) du petit-lait. L’usage de ce fromage est presque infini dans la cuisine ukrainienne : évoquons ici les varenikis, les gâteaux, les pirojkis, les sablés rituels pour les fêtes des pasteurs (la Saint Pierre et la Saint Paul) – les mandrykis, etc.
Et enfin, le produit le plus typique que l’on consomme sous la forme d’une boisson fraîche : c’est la riajenka ou le varenets. Elle se prépare avec du lait frais bien crémeux, mis à l’étuvée dans le four toute la nuit, jusqu’à ce qu’il prenne une couleur dorée et soit recouvert d’une croûte bien consistante et délicieuse.
Ce lait cuit au four est déjà un plat à part, mais pour compléter la recette, on ajoute une ou deux cuillers de smétana – et on laisse ce lait « s’épaissir » ou se fermenter pendant 12 heures dans un endroit assez chaud. Et voilà, votre riajenka est prête !
On la boit fraîche et accompagnée par des gâteaux, des raviolis, des galettes, des blinis, du pain, pour le goûter, pour se rafraîchir l’été, comme un plat quotidien ou bien comme un plat de fête ! Tout ceci sans parler des qualités médicales et cosmétiques de cette bonne boisson : dans la médecine populaire on l’appelait « l’antibiotique naturel ». Elle est indiquée pour améliorer l’appétit, elle est bonne pour le foie, les reins et l’intestin, elle combat l’athérosclérose et les migraines. La riajenka améliore l’état de vos cheveux et votre peau, elle est bonne pour préparer avec elle des bains ou des masques pour le visage.
Il faut préparer ces bonnes choses à la maison, et pour cela il suffit de trouver du bon lait entier !
Vous avez aimé cet article ?
EuroLibertés n’est pas qu’un simple blog qui pourra se contenter ad vitam aeternam de bonnes volontés aussi dévouées soient elles… Sa promotion, son développement, sa gestion, les contacts avec les auteurs nécessitent une équipe de collaborateurs compétents et disponibles et donc des ressources financières, même si EuroLibertés n’a pas de vocation commerciale… C’est pourquoi, je lance un appel à nos lecteurs : NOUS AVONS BESOIN DE VOUS DÈS MAINTENANT car je doute que George Soros, David Rockefeller, la Carnegie Corporation, la Fondation Ford et autres Goldman-Sachs ne soient prêts à nous aider ; il faut dire qu’ils sont très sollicités par les medias institutionnels… et, comment dire, j’ai comme l’impression qu’EuroLibertés et eux, c’est assez incompatible !… En revanche, avec vous, chers lecteurs, je prends le pari contraire ! Trois solutions pour nous soutenir : cliquez ici.
Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.
Navigation de l’article
Tetyana Popova-Bonnal, née à Dniepropetrovsk, Ukraine, master en philologie et doctorat en littérature, musicienne et passionnée de cuisine. Ancienne chef des chœurs à l’Alliance française et à la cathédrale de la Sainte Croix de Dniepropetrovsk. Traductrice de l’œuvre de Nicolas Bonnal en russe et en ukrainien, traductions des « Chevaux de feu » de Kotsubinskiy et des contes de fée de Pouchkine.