Entretien avec Jean-Claude Rolinat, auteur de Porto-Rico, 51e étoile ou dernière colonie américaine ? (éditions de l’atelier Fol’Fer)
(Propos recueillis par Fabrice Dutilleul, publiés sur le site de la réinformation européenne Eurolibertés).
« Porto-Rico est tout à la fois anglo-saxonne et afro-Caraïbe,
c’est un curieux cocktail de tous ces mondes.
Une préfiguration, sans doute, de ce que seront les États-Unis
au milieu de ce siècle,
où les minorités hispaniques deviendront, probablement,
la communauté dominante du pays après la minorité blanche »
On connait assez bien Cuba, la République Dominicaine et les Antilles en général, mais, curieusement, Porto Rico semble passer sous les radars des touristes ?
C’est vrai que les deux destinations que vous venez de citer, ainsi que la Jamaïque pour sa musique ou les Antilles françaises, sont bien plus connues que cette île qui est un véritable « porte-avion » américain dans les caraïbes. On ne la connait souvent que par l’opéra West Side Story, et c’est peu pour l’appréhender.
Quelle est son originalité par rapport à ses voisines ?
Géographiquement, elle leur ressemble : plages de sable fin, cocotiers, petite jungle aseptisée si je puis dire. Mais son ambiance hispanique dans un monde américain – curieux mélange – en fait son originalité, tout son charme.
Votre livre mélange les genres ; c’est à la fois un guide touristique, un ouvrage géographique, historique et politique ?
Pays à multiples facettes, je le fais découvrir depuis l’ère précolombienne en passant par l’arrivée des Américains après la guerre hispano-américaine, jusqu’au statut actuel « d’État libre associé ». Je n’évacue pas les ingérences cubaines. Je survole l’économie, l’histoire, le tourisme, la gastronomie. Il y a aussi la situation politique d’un État très endetté. C’est un digest qui pourrait servir au voyageur, car les guides sur cette destination ne sont pas nombreux.
Alors, Porto Rico, est-elle « latino » ou américaine ?
« Les deux mon général », comme je l’ai souligné plus haut. Elle est comme une chauve-souris : « Voyez mes ailes, je suis oiseau ; voyez mes pattes, je suis souris »… Elle est tout à la fois anglo-saxonne et afro-Caraïbe, c’est un curieux cocktail de tous ces mondes. Une préfiguration, sans doute, de ce que seront les États-Unis au milieu de ce siècle, où les minorités hispaniques deviendront, probablement, la communauté dominante du pays après la minorité blanche.
Quel est le statut exact de ce pays ? On s’y perd : est-ce un État comme les 50 autres sur le continent ou quelque chose de spécial, à part ?
Estado libre associado, « État libre associé ». Vous avez là, la définition du statut juridique de cette île de 8 870 km² et de, tout de même, 3 700 000 habitants. Il y a d’ailleurs davantage de Porto-Ricains aux USA proprement dit, que dans l’île même ! Les habitants ont la nationalité US, mais ils s’autogouvernent comme n’importe quel autre État américain en ayant la possibilité, toutefois, d’avoir une présence internationale spécifique, comme aux jeux olympiques par exemple. Drapeau, armoiries, constitution, police, garde nationale, gouverneur, congrès, tous les symboles étatiques sont là. Longtemps, les citoyens ont eu le choix entre trois options : devenir un État américain comme les 50 autres, statu quo ou indépendance. Ce dernier choix a toujours été rejeté jusqu’à présent. Pour que Porto-Rico devienne le 51e membre de l’union, il faudrait non seulement qu’une majorité s’exprime en sa faveur avec le quorum, mais que le Congrès de Washington entérine le choix de cette votation. Pour l’instant, toutes ces conditions n’ont pas été réunies. Ce statut, un peu bâtard il faut bien l’avouer – pas tout à fait l’indépendance, mais pas la colonisation non plus –, pourrait très bien convenir à nos possessions du Pacifique, Polynésie et Nouvelle-Calédonie.
Vos conclusions ?
Porto Rico ? Très peu anglo-saxonne, mais pas complètement, non plus, afro-caraïbe comme le sont la Jamaïque, Trinidad et Tobago ou la Barbade. C’est un peu un cocktail de tout cela, l’Amérique latine, l’Afrique et l’Amérique : « trois en un ».
Porto Rico : 51e étoile ou dernière colonie américaine ?, Jean-Claude Rolinat, éditions de l’Atelier Fol’Fer, collection « Go West », Préface d’Alain Sanders, 151 pages, 16 euros. Pour commander de livre, cliquez ici.
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Collaborateur du site Francephi.com, spécialisé dans les entretiens politiques, historiques et littéraires.