Cauchemar psychédélique en pleine nuit de canicule
J’aurais dû écouter mon médecin… Pourquoi me suis-je entêté à fumer n’importe quoi, du lard de porcu nustrale corse au saumon de l’Adour, en n’omettant pas pour autant le scamorza des Abruzzes ?
Dans leurs délires hallucinogènes d’aucuns affrontent les éléphants roses d’Annibelle sur les pentes escarpées du Mont des Cats point culminant de la Flandre subsaharienne.
D’autres sont victimes des charges furieuses de roll-mops perforant la Trouée de Belfort sous le regard absent du Lion de Bartholdi.
Quant à moi, victime de mon vice fumigène, je me retrouve en plein mélodrame onirique… Je ne voudrais surtout pas vous importuner mais permettez-moi de vous faire partager mon trouble.
Un sommeil malsain me plonge dans une réunion de famille décomposée (recomposée toutefois avec des éléments d’occasion interchangeables, récupérés sur les décharges échangistes les plus improbables).
Elle célèbre le pacs conclu entre la fille aînée et un lévrier afghan (j’apprends ainsi que les pratiques zoophiles ne constituent plus un crime contre nature depuis de longues années… la SPA aurait pu nous prévenir mais passons). Totalement étranger à cette parentèle, me voilà pourtant témoin d’échanges intimes que l’on aurait qualifiés naguère de surréalistes (André Breton a été ravalé depuis longtemps au rang de disciple de José Maria de Hérédia, par un viol de gerfauts hors du charnier natal).
Courageux, mais pas téméraire, avant de compatir aux malheurs des uns et des autres je consulte subrepticement un livret de famille qui traîne providentiellement sur une étagère. Heureuse initiative de ma part. Eu égard à la complexité de sa composition « gendrique », elle devrait m’empêcher d’endosser le pull infamant de Gaston Lagaffe. Mais qui se souvient encore de Jacques Prévert et de sa famille tuyau de poêle ?
La mère, victime de longue date d’éjaculations précoces vient de découvrir qu’elle souffrait d’un cancer de la prostate. Le père, affecté cycliquement de contractions abdominales refuse néanmoins d’admettre souffrir de règles douloureuses. L’ami de la famille, une ancienne gloire de la Pédale française, doté d’un humour carabin, rappelle finement que si naguère il a notamment franchi en tête des cols alpins et pyrénéens ainsi que le mythique col du fémur, il n’a jamais pu franchir celui de l’Utérus, à l’époque réservé exclusivement à une catégorie qu’on qualifiait encore de « féminine ».
Résolument réconfortant, l’oncle Geneviève affirme que les actes chirurgicaux peuvent avoir des effets secondaires bénéfiques. Ainsi la double mastectomie qu’il vient de subir lui permet des économies substantielles de soutien-gorge.
Quant à la tante Robert, elle est curieusement frappée de priapisme alors que, à sa connaissance, aucun membre de son ascendance n’en avait été affecté. C’est alors que dans cette atmosphère surchauffée, Sandrine, le frère aîné, la face soudainement érubescente et ruisselante de sueur s’affale sur le canapé. Alors que le nouveau pacsé se met à hurler à la mort, je me précipite pour venir en aide au – à – la malheureu(x) – se – (je suis titulaire du brevet de secouriste PSC1 et, accessoirement, d’un certificat d’orthographe inclusive) lorsque Geneviève tempère mon inquiétude en affirmant que ce ne sont là que les symptômes d’une androménopause on ne peut plus normale à son âge.
À mon réveil je revois une scène de l’excellente comédie américaine Confidences sur l’oreiller. Pour des raisons vaudevillesques le héros de l’histoire, Rock Hudson, se réfugie dans la salle d’attente d’un gynécologue et s’y installe comme une patiente ordinaire sous le regard éberlué sinon choqué de futures mamans. Demain une telle scène sera-t-elle courante ?
Demain ? Allons donc… Je viens d’être témoin à l’instant d’une algarade « édifiante ». Une jeune fille, du moins le pensais-je à première vue, a rabroué un garçon par un inattendu : « Arrête de me casser les couilles ! »
Ouille ! Ouille ! Ouille !
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