22 septembre 2024

TER, la discrimination organisée

Par Philippe Joutier

Lundi soir, gare de Cousance, village Jurassien. Gare fantôme où ceux qui envisagent d’utiliser un TER n’ont aucune billetterie à leur disposition puisqu’il s’agit d’un PANG ou « Point d’Accès non géré. »

 

Qu’à cela ne tienne, vous n’avez qu’à posséder un smartphone comme tout le monde ! Donc allons-y : chargeons sur notre téléphone « SNCF connect », puis tentons de nous repérer entre robots, codes secrets, horaires, âge du capitaine, réductions hypothétiques et mots de passe divers. Las ! le train souhaité est indiqué « train complet ». Donc réservation impossible. Notons que la semaine dernière, plus sibyllin, le message de refus était « réservation impossible ». Mais dans tous les cas, billet électronique inexécutable. Qu’à cela ne tienne : considérant que les robots sont trop illectronistes pour savoir ce qu’ils font, un ami vous emmène jusqu’à la gare suivante où à défaut d’un humain, existe du moins un distributeur de billets. Làs ! Le distributeur espéré est en panne ! Que faire ?

 

Sur place un employé compréhensif vous explique qu’il n’y peut rien. Toutefois, par bonté d’âme il veut bien prévenir le chef de train qu’effectivement le robot balbutie. Donc l’autorail s’arrête, vous montez, avec l’angoisse du fraudeur potentiel. L’autorail est celui du milieu de matinée. Affiché la veille « complet » ou « réservation impossible » il n’est plein qu’aux trois-quarts.

« Oh, c’est toujours ainsi », vous explique le contrôleur sympa.

Tellement sympa, même qu’il refuse de vous appliquer l’amende que vous encourrez pour être monté « sans titre de transport ». Mais vous n’allez pas vous en tirer comme ça. Il vous l’assure : il lui est tout simplement impossible de vous facturer le tarif normal. Il doit vous imposer un supplément. Vous protestez. Ah ! Il voudrait bien, mais ne peut pas ! Quand même, vous insistez : pourquoi les chefs de train, dans ces circonstances, ne peuvent-ils pas appliquer la tarification normale ? Il se noue les mains d’empathie. Bien sûr, il comprend. Mais lui ne fait qu’appliquer, etc. il faut s’adresser plus haut. Bien plus haut ! Beaucoup plus haut ! La direction ? La région ? Peut-être le Premier ministre ? Le Président ?

Tout à son merveilleux modernisme, la SNCF n’organise-t-elle pas sciemment l’élimination de toute une frange d’encombrants, ces usagers (pardon, ces clients (sic) !) ruraux ou âgés afin de les persuader que la solution la plus simple pour eux est bien d’oublier le train, les PANG et les smartphones et de prendre une voiture ?

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