Oukase européen contre les médias russes ?
La défense de la liberté d’expression pour les journalistes ne saurait être à sens unique. La preuve par une récente résolution adoptée par le Parlement européen. Et son immédiate réponse russe…
La preuve en est que cette histoire, sur laquelle nos médias ont fait montre d’une pudeur de jeune fille, a été dévoilée par un quotidien qui, longtemps, n’a pas été donné pour héraut de libre pensée : L’Humanité.
Ainsi, la résolution en question, intitulée Communication stratégique de l’Union visant à contrer la propagande dirigée par des tiers, entend-elle, dans le même élan, lutter « contre la guerre de l’information menée par la Russie et les terroristes islamistes ». Là, pour le coup, le vocable « d’amalgame » visant à « stigmatiser » tel ou tel porte bien son nom : mettre sur le même plan armée russe en Syrie et islamistes de Daech, il fallait l’oser. En tout cas, c’est ainsi que les Russes de Saint-Pétersbourg, interrogés par les reporters du quotidien d’un Parti communiste français – de moins en moins communiste et surtout de moins en moins français – l’ont entendu : « Vous ne nous aimez décidément pas ? Vous parlez de démocratie, mais vous souhaitez fermer nos médias… »
Car c’est bel et bien de cela dont il s’agit : d’une énième tentative de censure des médias alternatifs sur Internet. Au-delà de l’aspect technique, pas forcément évident à mettre en œuvre, demeure cette contradiction majeure : un Occident qui ne cesse de se servir de ces nouveaux médias pour pousser ses pions tout en interdisant qu’on puisse éventuellement lui rendre la pareille. Et les mêmes de reprocher à de potentiels informaticiens russes d’avoir influé sur l’élection de Donald Trump, alors qu’ils ont aidé à truquer, de plus ample manière, la majeure partie des élections en Ukraine depuis quelques années, sans compter sur d’autres manipulations plus ou moins avérées…
Là où l’on sent bien que cette résolution toute de guingois gêne aux entournures les plus atlantistes de nos députés européens, c’est lorsque l’on fait le décompte de leurs votes respectifs. 304 députés ont voté pour ce texte des plus baroques. 179 contre, tandis que 208 se réfugiaient en une prudente abstention. Bref, ce texte n’aurait jamais dû être adopté, étant structurellement minoritaire si nos parlementaires européens avaient subi une greffe de testicules durant la nuit. Il n’empêche qu’il l’a été. La personnalité de l’élue l’ayant porté sur les fonts baptismaux n’y est probablement pas étrangère, s’agissant d’une certaine Anna Etzbieta Fotyga. Laquelle, tel qu’opportunément rappelé par le député communiste européen Francis Wurtz, « n’est autre que l’ancienne chef de la Chancellerie du Président polonais ultranationaliste Lech Kaczynski » et fait partie de la « délégation permanente pour les relations avec l’OTAN »…
Que Lech Kaczynski soit « nationaliste », la cause est entendue. Qu’il puisse être « nationaliste polonais », nul n’en doutera. Qu’il soit « nationaliste européen », il s’agit là d’une tout autre affaire. Et que Etzbieta Fotyga, sa femme lige puisse dépenser sa sueur au profit d’intérêts bien compris du Vieux continent, voilà qui prête à rire, surtout en ces temps plus que troublés.
La preuve en est l’immédiate réaction de Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères : « Nous espérons que cette résolution ne portera pas atteinte au travail des médias russes. Car fermer des chaînes de télévision ou des journaux demeure un acte intolérable. » Il est un fait que…
Et la même Maria Zakharova de prévenir que si de telles mesures étaient mises en œuvre, « Moscou prendrait des mesures de représailles. » De son côté, Nadezhda Azhgikhina, vice-présidente du syndicat des journalistes russes, tente de tempérer : « Il est important de discuter afin d’éviter ces surenchères et faire tomber les préjugés. »
Certes, il nous est quotidiennement asséné que les médias russes ne sont pas libres. Parce que vous trouvez qu’ils le sont tant que ça, ici, en France ?
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