27 avril 2023

Jean Picollec s’en est allé…

Par Philippe Randa

Il était le survivant d’une génération d’éditeurs français qu’il vient malheureusement de rejoindre… à deux jours de ses 85 ans ! En 2022, Philippe Randa a publié aux éditions Synthèse « Jean Picollec l’atypique », livre dans lequel il retrace sa carrière exceptionnelle dans le monde de l’édition : Jean Picollec n’aura jamais renié ses engagements politiques de jeunesse, tout en cultivant des amitiés de tout bord politique.

Nous reproduisons ci-après la conclusion de Philippe Randa paru dans le livre qu’il lui a consacré.

Plus têtus encore que Picollec !

Ai-je beaucoup à ajouter, personnellement, sur Jean Picollec qui n’ait été dit – et amplement confirmé – par les témoignages apportés à ce livre ?

Convaincu de longue date de son atypisme, d’où le titre de ce livre, on se doutera que je n’ai pas été surpris par les traits de caractères ou les anecdotes que les uns et les autres ont rapportés…

Inutile donc de répéter ce qu’on a pu lire précédemment… Quoique, si ! tout de même…

Comme bien d’autres, mon premier contact avec Jean Picollec ne s’était pas déroulé sous les meilleurs auspices…

C’était dans les années 80…

Alors jeune auteur de romans populaires, je lui adressais un roman policier… qu’il me retourna avec une lettre dans laquelle il m’expliqua que d’une part, cela ne rentrait pas dans sa politique éditoriale, soit ! mais ajoutant qu’il avait l’habitude de publier des textes de plus grande qualité. Oups ! Ambiance !

Qu’un éditeur ne publie pas un livre que je lui proposais, quelles qu’en soient les raisons, j’en avais certes l’habitude – comme l’immense (sinon la quasi-) majorité des écrivains, forcément ! – et loin de moi l’idée d’en avoir jamais tenu la moindre rancune à qui que ce soit, mais quelle vilaine mouche avait bien pu piquer ce Breton-là de me décocher un commentaire aussi peu diplomatique ?

Je me contentais évidemment de hausser les épaules en retenant (et à ma seule intention !), un qualificatif sec, énergique et définitif à son encontre…

Et puis, nous eûmes rapidement l’occasion de nous revoir pour cause de nombreux amis communs… et lui comme moi d’oublier, bien évidemment, l’incident de ce roman policier qui avait rapidement trouvé sa publication chez un autre éditeur…

Et puis… Et puis, je me rappelle très bien ce jour, quelques années plus tard, où Jean me demanda sur quoi j’écrivais alors.

— Je termine un Dictionnaire commenté sur la Collaboration française

— Ah ! Je voudrais bien le lire, si ça ne t’ennuie pas…

Je lui transmis aussitôt le manuscrit plus ou moins achevé sans penser un instant qu’il me le rendrait truffé d’observations plus pertinentes les unes que les autres. Un peu gêné du temps que lui avait pris son attentive lecture et du précieux travail qu’il avait effectué et dont j’allais bénéficier, je m’exclamais :

— Mais ça t’a pris un temps fou !

— Je ne suis pas capable de lire autrement qu’avec un crayon à la main. Et c’est un bon travail !(1)

Comme la question n’avait pas été abordée – et pour cause, ni lui, ni moi n’y avions sans doute jusque-là songé – je lui proposais :

— Je vais le diffuser par correspondance…(2) Tu ne veux pas le publier pour une édition en librairie ?

— Oui, pourquoi pas ! Bonne idée…

Je suis toujours persuadé qu’il l’avait auparavant lu et corrigé avec toute la minutie et cet œil d’éditeur à nul autre pareil – dont tous ses auteurs, comme on a pu le lire, lui sont reconnaissant… et moi donc ! – simplement de façon totalement désintéressée, par intérêt pour le sujet et pour m’aider à parfaire mon travail.(3)

Qu’ajouter encore, sur cet ami au caractère tellement… enfin, de caractère !… sinon insister sur un autre trait de celui-ci, assez touchant : Jean est toujours attentif à l’intérêt – quand il le juge évidemment nécessaire ou bénéfique pour eux – de présenter ses amis les uns aux autres ou de leur faire profiter d’un événement ; aussi est-il rare de le rencontrer sans qu’il ne vous propose de l’accompagner à telle inauguration, tel cocktail, remise de prix, conférence ou manifestation littéraire où l’on est alors frappé de voir la chaleur de l’accueil qui lui est réservé (et à vous aussi par ricochet) :

— Tu comprends, aime-t-il à répéter avec malice, cet « entris­me », c’est mon côté trotskyste.

Ce qui explique sans doute cette fidélité, cette reconnaissance, cette affection que j’ai ressenti chez tous ses amis, personnels ou professionnels, contactés pour ce livre et leur enthousiasme à apporter leur témoignage : tous auraient été contrariés, j’en suis certain, de manquer à l’appel…

En m’entretenant avec eux, j’ai été frappé par l’affection qu’ils lui portent tous ; affection mâtinée pour les uns de reconnaissance professionnelle, pour les autres d’une certaine fascination pour ce personnage chez qui sa vocation d’éditeur a toujours été telle qu’elle lui permit de survivre à tant d’aléas professionnels, certaines fois assez critiques, d’être, comme il s’auto-décrit – « toujours vivant, toujours indépendant, toujours sur le fil du rasoir », et pour ce « fils de marins » – comme d’autres le sont « de famille » –, d’éviter cent fois le naufrage en sortant de tempêtes qui en auraient – et en ont ! – emportés tant et tant d’autres…

Voilà, Jean ! Cette idée si « stupide » de te consacrer un livre – comme tu n’as cessé de nous le dire à Roland et à moi tous ces derniers mois – ne l’était pas tant que ça ! Et on peut être encore plus têtu que toi, la preuve !(4)

Notes

(1) Voir page 112 son commentaire élogieux… tout aussi exagéré, à mon avis, que celui, qui l’était beaucoup moins, sur mon roman policier ; mais Jean ne l’admettra évidemment pas.

(2) Devenu éditeur pour, suivant l’exemple de Jean, « m’enrichir outrageusement » (sic !), je ne disposais à l’époque que d’un réseau de diffusion par correspondance.

(3) Jean devait lire un autre de mes livres, écrit avec Roland Gaucher : Les « antisémites » de gauche… qu’il ne publia pas (le sujet l’inspirait moins), mais dont il me rendit le manuscrit tout autant couvert de justes observations et de précieuses corrections…

(4) Jean Picollec l’atypique, Philippe Randa, Éditions Synthèse nationale, 256 pages, 29 euros. Pour obtenir ce livre, cliquez ici.

 

Jean Picollec l’atypique, Philippe Randa,Éditions Synthèse nationale, 256 pages, 29 euros.

À lire également les hommages rendus (entre autres) à Jean Picollec sur les sites du Nouveau Présent et de Synthèse nationale.

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