Les discussions des chefs d’Etat et de gouvernement réunis jeudi en Conseil européen pour parler d’immigration illégale ont duré une bonne partie de la nuit pour accoucher au petit matin d’un accord a minima formulé de manière suffisamment vague pour que tout le monde puisse crier victoire. Hier soir, même cet accord semblait hors de portée, en raison du veto de l’Italie qui exigeait d’inscrire dans le texte le principe de solidarité dans l’accueil des immigrants clandestins débarqués en Italie. Il fallait concilier cela, et aussi la position du président français qui aurait souhaité des sanctions financières pour les pays qui refuseraient de prendre leur part de « migrants », avec les positions de l’Autriche et du groupe de Visegrád, résumées ainsi par le Premier ministre hongrois à son arrivée : « Faire enfin ce que les peuples nous demandent : premièrement, plus d’arrivées de migrants, et deuxièmement, il faut renvoyer ceux qui sont déjà arrivés. » Sur ce point l’Italie est avec eux contre l’Allemagne, la France et l’Espagne.
L’Autriche et le V4 ont obtenu satisfaction : le projet de relocalisations obligatoires défendu par la Commission et les sanctions financières voulues par Macron sont définitivement abandonnés ; la prise en charge solidaire des immigrants se fera sur la base du volontariat. Le Premier ministre italien Conte s’est toutefois dit satisfait, le texte signé par les 28 reprenant le principe général selon lequel les immigrants arrivant en Italie arrivent en fait dans l’UE. Ce n’est pas pour autant qu’il oblige la France et l’Autriche à suspendre leurs contrôles à leurs frontières avec l’Italie.
Il est question dans l’accord signé hier d’établir des « centres contrôlés » où l’on fera le tri entre demandeurs d’asile légitimes et immigrants économiques. Ce n’est pas une nouveauté, d’autant que le texte ne stipule pas qu’il s’agira de centres fermés. Il s’agit donc des fameux hotspots qui n’ont pas vraiment fonctionné jusqu’ici. La décision de mettre les immigrants illégaux en centres de détention en attendant de leur donner l’asile ou de les renvoyer chez eux reviendra donc aux pays. C’est ce que fait déjà la Hongrie et ce que veut faire Matteo Salvini en Italie.
La seule véritable nouveauté de l’accord de jeudi, c’est qu’il est question de créer en Afrique du Nord, en coopération avec la Libye, la Tunisie et le Maroc, des plateformes de débarquement gérées par le HCR et l’Organisation internationale pour les migrations. Il s’agirait de reproduire ce qui a été fait avec la Turquie, et les 28 ont décidé jeudi de débloquer trois milliards d’euros pour continuer le financement du maintien des réfugiés et immigrants dans ce pays. En revanche, le Maroc a déjà fait connaître son refus clair et net de toute « plateforme de débarquement » sur son territoire. En réalité, cette idée désormais défendue par l’Italie depuis l’avènement du gouvernement de Giuseppe Conte n’est pas nouvelle : c’est ce que demandaient le V4 et l’Autriche depuis déjà longtemps et c’est ce que pratique avec succès l’Australie depuis 2013.
Article paru dans les colonnes du quotidien Présent.
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