23 janvier 2017

Davos n’est plus ce qu’il était ?

Par Olivier Pichon

Certains le regretteront, d’autres s’en féliciteront sans doute : a-t-on fait trop grand cas de Davos, cette petite cité helvétique, tout à tour expression du diable et de tous ses diablotins réunis pour le malheur de l’humanité ou au contraire petit nuage peuplé d’anges tout disposés à faire le bonheur de la dite l’humanité ?

En réalité, il s’agit ni plus ni moins d’une oligarchie de 3 000 « Sachants et possédants » (19 000 euros d’inscription et 50 000 FS de cotisation au club) dont le fondateur Klaus Schwab (World economic forum) a établi un ordre du jour très branché, comme la station des Grisons : les inégalités, l’exclusion et le réchauffement climatique.

Ces considérations, un rien démagogiques, méritent examen, mais, en attendant, force est de constater que c’est le monde à l’envers, sauf si l’on veut bien se souvenir que le capitalisme dans sa nature est protéiforme et qu’il a une force de récupération à nul autre pareil.
Xi Jinping défenseur de la mondialisation marchande

Le maître du Parti communiste chinois joue à fronts renversés et tout le monde se félicite de sa défense du libre-échange et de la globalisation dont il voudrait bien qu’elle continue comme avant : « Ne pas fermer la porte au monde ! », dit-il. Fort bien ! Mais si le monde s’avisait (droit d’ingérence oblige !) de s’intéresser au fonctionnement du Parti unique, aux institutions et aux libertés en Chine, gageons que l’habile homme se ferait moins demandeur.

Aussi bien, chacun, dans ces déclarations libre échangistes, se félicite d’une communauté de pensée. Il ne s’agit pas du tout de cela. Xi Jinping et la Chine sont dans la position de la Grande Bretagne au XIXe siècle : atelier du monde, ils ne veulent pas que les débouchés se ferment. Voilà pour le côté british. Au surplus, l’attitude des dirigeants chinois relève de la bonne vieille stratégie mercantiliste qui doit servir la puissance du souverain ; là c’est plutôt le côté frenchie avec Colbert, sauf qu’aujourd’hui, le souverain c’est le parti.

À rebours, en effet, de l’autre côté de l’Atlantique, Donald Trump affiche plutôt des positions protectionnistes et le Brexit constitue quand même une inversion tout à fait inédite du « sens de l’histoire » : voilà les Anglo-saxons inventeurs de ce qu’était le Nouvel Ordre Mondial économique prétendant maintenant s’en affranchir !

Ce basculement est d’une parfaite lisibilité : il est le symétrique exact des performances chinoises à l’export et des coûts américains, à l’instar de la Grande-Bretagne victorienne dont le niveau de vie élevé eut pour conséquence l’apparition d’un déficit commercial extérieur, alors qu’elle restait la grande dispensatrice de capitaux comme aujourd’hui la Chine commence à le faire (voir les Investissements directs à l’étranger [IDE] chinois en France).

Finalement rien de très nouveau, chacun voit midi à sa porte, seule peut-être la France et l’Europe raisonnent sur la question en termes idéologiques et moraux alors qu’il s’agit avant tout d’intérêts pragmatiques.

Les « valeurs » de Davos

En politique, les valeurs c’est comme la culture et la confiture : moins on en a, plus on l’étale. La république finissante en sait quelque chose, elle qui ne cesse de nous parler de ses valeurs sans jamais les définir.

En économie, on sait ce que sont les valeurs, mais le Forum économique veut se préoccuper des inégalités et des exclusions. Vaste programme qui ne relève certes pas tout à fait de l’économie puisque celle-ci, par le mécanisme de la propriété, de la concurrence, de l’innovation, est intrinsèquement un mécanisme d’exclusion lequel est le plus souvent d’ailleurs d’une grande fécondité économique.

Ont-ils aussi songé que la seule cotisation à payer, pour parler de l’exclusion, exclut des milliers d’intervenants possibles.

Donc, le forum fait dans le social, pourquoi pas ! mais cela sent plutôt l’alibi… Prenons l’Europe, par exemple, et le mécanisme mis en œuvre par Mario Draghi : les fameux assouplissements monétaires. Ils ne sont rien d’autre qu’une cuisine interne entre possédants, banquiers centraux et oligarques politiques pour sauver les banques commerciales et priver les épargnants de la rémunération de leurs efforts et les consommateurs de disposer librement du cash qu’on est en train de leur interdire. N’est-ce pas là une exclusion et une inégalité flagrantes ? Voilà qui ne sera pas débattu là-haut sur la montagne !

Réchauffement climatique

Là aussi, on peut s’interroger : que veulent les hommes de Davos ? Le retour sur investissement. Le réchauffisme n’est pas qu’un corpus scientifique, il représente maintenant des intérêts considérables. Et sur le plan scientifique, l’essentiel des travaux sur la question reçoit des financements publics ou privés impliqués dans l’économie du réchauffisme. La question n’est pas de nier systématiquement l’idée du réchauffement, mais de s’interroger sur son origine anthropique laquelle semble de faible contribution à ce qui pourrait être un cycle comme le fut le refroidissement, la petite glaciation moderne de la fin du Moyen Âge au XVIIIe siècle, magnifiquement décrite par Emmanuel Leroy-Ladurie dans son histoire du climat.

Toutes les études scientifiques contradictoires avec la doxa réchauffiste ne sont accessibles qu’aux internautes très avisés et rares.

Bref, le forum de Davos est en définitive toujours Davos et tombe toujours du côté où il penche (pense ?).

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