Le Voyage du Graal
« On doit objectivement reconnaître que le christianisme
a permis de transmettre un héritage
qui se serait autrement perdu.
Mais il y a eu des récupérations, des aménagements »
Entretien avec Bruno Favrit auteur de Le Voyage du Graal (éditions Dualpha), publié sur le site de la réinformation européenne Eurolibertés (Propos recueillis par Fabrice Dutilleul).
Dans Le Voyage du Graal, vous abordez le thème du Graal à travers de hauts lieux de notre mémoire. Vous en faites une quête personnelle. Qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
Il y a dans ma démarche une importante part d’intuition. Mais aussi la profonde conscience d’appartenir à une histoire, à une culture, à une civilisation qui a encore beaucoup à dire. Cette mémoire, je suis parti à sa rencontre. Je ne voulais pas me confronter à la seule herméneutique des textes. J’avais besoin d’évoluer librement, de comprendre par moi-même. Je me suis dirigé vers des lieux dont le nom résonnait en moi de manière significative. Je suis demeuré attentif à ce qu’ils avaient à m’apprendre. Bien souvent, j’ai progressé hors des sentiers battus, avec une certaine persévérance et aidé, il faut le dire, par d’heureuses conjonctions. J’aurais pu me limiter aux seuls univers celte et chrétien, mais le champ d’investigation s’est révélé bien plus vaste : la Provence, l’Occitanie, la Bourgogne…
On sent que vous êtes en effet parti explorer les paysages (et les « géographies sidérales »), interroger la pierre, décrypter les œuvres d’art, interpréter les signes…
Ce livre n’aurait pu s’écrire autrement. Le contenu de mes carnets, rédigés au jour le jour, au gré de mes pérégrinations, en a constitué la matière première. À quoi s’est superposé un travail de recoupements avec le mythe du Graal. Je parle bien de mythe. Qu’il soit matériel ou spirituel, objet ou concept, le Graal renvoie à une interprétation du monde possible, ramenée à la mesure de l’homme, sans pour autant se figer dans une réalité appauvrie où ne serait considéré que ce qui est immédiatement compréhensible ou conditionné par un dogme.
Le Graal, vous en donnez de nombreuses interprétations…
Dans l’imaginaire collectif, le Graal c’est la coupe qui a recueilli le sang du Christ. Mais il est avant tout une recherche de sens et de vérité. Dans mon livre, j’ai abordé les représentations que l’on a pu s’en faire, qu’elles soient ou non fantasmées. Car même les fantasmes et les superstitions ne sont pas à rejeter totalement. Je serais tenté de dire sur ce point : « Pas de fumée sans feu ». Ce qui n’interdit pas de faire la part des choses. Il y a de la mauvaise herbe, il y a du brouhaha, il y a des illuminés et beaucoup d’imposteurs. De mon côté, je n’ai pas mis un point final à ce Voyage. Je reste conscient que de larges territoires doivent encore être « défrichés ». C’est d’ailleurs tout ce qui fait l’intérêt de la quête.
Donc, pas de positionnement précis par rapport au Graal. Faudrait-il y voir plutôt un concept païen que chrétien ?
La contribution du christianisme à la construction du mythe ne peut évidemment être ignorée, mais elle n’est pas sans lien avec le paganisme (le polythéisme des saints en est l’éclatante illustration). Elle pourrait même en être le « continuum ». On doit objectivement reconnaître que le christianisme a permis de transmettre un héritage qui se serait autrement perdu. Mais il y a eu des récupérations, des aménagements. Le Graal n’a pas été laissé de côté. Seulement, il s’est déployé dans un domaine où il savait pouvoir conserver son caractère sacré. Il ne s’est pas laissé enfermer… L’architecture et l’art chrétiens sont saturés de sens allant bien au-delà du message diffusé par l’Église.
Qu’en est-il du Graal païen, peut-être moins connu ?….
Je n’ai pas négligé cet aspect de la question, loin de là. Je montre le fond de religiosité qui anime le paganisme, trop souvent ignoré ou nié par ses détracteurs. Ce qui fait surtout la différence, c’est la prééminence de la nature. La « religion » de la nature place l’homme entre la terre et le cosmos, tel un arbre qui en même temps s’enracine et grandit vers le ciel. En arpentant les lieux de mémoire, je n’ai jamais perdu de vue ce côté « cosmotellurique ». Le Graal païen n’est ni hors-sol ni enfoui dans des nébulosités souterraines, mais pour espérer saisir un peu de sa substance il faut commencer par se délester de beaucoup de certitudes et d’idées reçues.
Le Voyage du Graal de Bruno Favrit, 144 pages, 21 euros, éditions Dualpha, collection « Patrimoine des religions », dirigée par Philippe Randa. Pour commander ce livre, cliquez ici.
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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.