Quand s’allonge la nuit. Anthologie poétique (entretien avec Philippe Pichon)
Après une trilogie parue chez Prolégomènes[1] en partie lue sur France Inter ; après un diptyque chez Siloë[2] qui a obtenu le prix Baudelaire en 2023 ; après un recueil de larges versets « à la manière de » Saint-John Perse, le très remarqué Cieux défunts, ciels défaits,[3] préfacé par James Sacré, Philippe Pichon publie chez Dualpha Quand s’allonge la nuit. Anthologie poétique (1984-2024), une anthologie de textes poétiques (1984-2024). Cette publication est née de l’obtention du Grand prix de poésie du Liban, Prix Naji Naaman 2024.
Dépêche Prix Naji Naaman 2024 Philippe Pichon (cliquez ici)
(propos recueillis par Fabrice Dutilleul)
Pourquoi cet éditeur ?
Les éditeurs Clairisse Frontin (pour Prolégomènes) et Laurent Hor (pour Siloë) ont jeté l’éponge ; leur travail éditorial était merveilleux, mais la rentabilité n’était pas là ; ces maisons n’existent plus… hélas. Le directeur de la collection « La Bleu-Turquin », chez Douro, le peintre-écrivain Jacques Cauda, est un homme chaleureux et lettré, c’est devenu un ami, mais il n’a pas les coudées franches pour un travail éditorial approprié et une diffusion suffisante.
Je connais bien et depuis longtemps Philippe Randa des éditions Dualpha et Dutan. Chez lui, ont paru quelques-uns de mes textes de prose, très exactement un roman et un récit, et quelques recueils de poèmes. Mais c’est surtout Le Cas Céline. Coupable, mais de quoi ?, un essai sur le Maudit de Meudon, qui nous a valu, à lui un beau succès de librairie, à moi une forme de reconnaissance littéraire. Nous en sommes à la deuxième ou troisième réédition, chaque fois revue et augmentée. Alors quand Philippe Randa a appris l’obtention du Prix Naji Naaman à l’été dernier, je crois par une dépêche d’agence de presse, il m’a téléphoné et très délicatement proposé cette idée d’anthologie poétique : quarante ans en territoires poétiques. Cela ne se refuse pas !
Ce recueil déjà à peine paru, que la presse semble au rendez-vous pour le célébrer, non ?
Ce n’est pas à moi de le dire, mais oui. Par exemple, le critique Pascal Payen-Azenmuller a consacré à mon travail d’écriture l’une de ces « Promenades et flâneries » littéraires, sur Radio Courtoisie. Une heure d’entretien où nous avons également balayé nos goûts qui sont aussi nos humeurs. Il y a eu une recension un peu taquine par les progressistes de France Culture de cette anthologie, et le site en ligne Le Littéraire, sous la plume de Jean-Paul Gavard-Perret, a également permis aux lecteurs de se familiariser avec des extraits (commentés) des poèmes. C’est un bon début !
Il y a beaucoup d’inédits dans cette anthologie : pourquoi ce choix ?
D’abord, je dois préciser qu’aucun des textes de la trilogie parue chez Prolégomènes, aucun des fragments de J’ai laissé fuir le soir ou de Tout est plus vaste que les mots (parus chez Siloe), ou encore aucun des versets de Cieux défunts, ciels défaits, n’a été repris. Je n’ai pas voulu « casser » ces recueils qui forment, en eux-mêmes, un tout.
L’éditeur et moi avons donc choisi des poèmes parmi les autres recueils, mais c’est un florilège de textes publiés à côté desquels se sont imposés presque naturellement des inédits de toute époque, retrouvés dans une malle à Saragosse… Le premier poème est daté de 1978… Le dernier a été achevé alors que le texte partait à la mise en page… L’idée était d’un work in progess, comme disent les d’jeunes, mais dans un même souci de sonorité littéraire – du moins je l’espère.
La poésie semble très présente dans votre vie d’écrivain…
La poésie, je l’ai choisie comme une voie privilégiée sur laquelle on s’engage pour une navigation au long cours, une ascension au long souffle. Avec cette idée que l’aventure humaine n’a d’intérêt que si elle se fonde sur la Parole.
Le « qui suis-je pour l’autre » des premiers poèmes publiés en revue (et certains inédits que l’on retrouve dans cette anthologie) est progressivement devenu le « puis-je être sans l’autre » (les textes parus chez Prolégomènes) pour arriver au « pouvons-nous être sans l’Être, sans Dieu, sans la Nature » de S’approcher du silence, et mourir comme l’on se tait (à paraître).
L’écriture est en effet une démarche intime : une recherche de soi d’abord, une quête de l’autre ensuite, mais davantage, sans doute, une quête de l’Être (au sens de créateur de la Nature).
Telles sont les interrogations que le poète est amené à se poser selon un questionnement qui lui est propre, se plaisant davantage à restituer quelque chose qui n’est plus, qu’à prouver ou démontrer quoi que ce soit.
Le contact déchirant avec ce qui ne cesse de s’abîmer dans l’oubli l’érige en guetteur passionné d’une impossible survie, en champion d’un combat contre le temps qui engloutit tout, en chantre d’une épopée où l’homme en peine de cieux défunts, ciels défaits, cherche à traduire ce qu’il ressent au moyen d’une expression qui se veut quelque chose à servir.
C’est la raison pour laquelle le poète emprunte un itinéraire – une balade en ballades – qui n’est pas habituel, afin que les mots du poème s’agencent de façon telle que ce qu’ils signifient les dépasse.
D’autres ambitions littéraires ? D’autres projets ?
Ce n’est pas une coquetterie d’auteur : je n’ai aucune ambition littéraire…
En ce qui concerne les projets… Je ne suis pas inactif.
Côté poésie : une réédition de mes deux volumes de sonnets, Tous nos silences ont leurs secrets, chez le Lérot (dont chacun sait la qualité du travail éditorial : des livrets cousus !) ; un recueil de versets d’inspiration spirituelle, S’approcher du silence, et mourir comme l’on se tait, que j’ai soumis aux Frères de Taizé, car il me tient à cœur de rendre hommage à l’un d’eux ; un projet totalement fou, des Cahiers de solitude blanche, une sorte d’Odyssée de plus de 7 500 vers, dédié à Christian-Gabrielle Guez-Ricord dont le Maison Dieu est depuis les années 80 un livre-chevet de mon intimité. Mais qui sera l’éditeur capable de soutenir une telle démarche ?
Côté prose narrative : en mars prochain sort mon premier recueil de nouvelles, Court-lettrages, chez l’éditeur Philippe Sarr (Sans Crispation), dont quelques textes ont été primés ici ou là.
Pour les essais : à l’automne paraît un essai sur l’art dramatique, Théâtre [In]complet, chez l’éditeur Jean-Marc Collet (Vibrations) et je travaille actuellement à un volume deux d’À hue et à dia. Carnet de lectures d’un nomade sédentaire, que je vais soumettre à France-Univers.
Et, à très long terme, un gros pavé, une RMC Story… Racine Molière Corneille… dans leurs plus bels atours pour fêter leurs plus belles amours !
Notes
[1] Aux basaltes de l’âge, 2021, L’Éphémère en héritage, 2021, et La joue pas rasée de la solitude, 2022.
[2] Entre deux échos de Villon… suivi de …et dix absinthes de Verlaine, 2022.
[3]Cieux défunts, ciels défaits, coll. « La Bleu-Turquin », présenté par James Sacré, illustré par Jacques Cauda, Douro, 2023. « Coup de cœur » des libraires indépendants (Livre Hebdo, avril 2023). Prix de la découverte poétique Simone de Carfort (Fondation de France), Paris, 2023.
Quand s’allonge la nuit (Anthologie 1984-2024), de Philippe Pichon, Dualpha, Collection « Patrimoine des Lettres », 232 pages, 29 €. Pour commander ce livre, cliquez ici.
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