Entretien avec Jean-Loup Izambert et Claude Janvier, auteurs de Le virus et le président (IS édition).
Vous dédiez ce livre à ceux qui ne se sont pas vendus à Big Pharma. Où en est-on de l’emprise de la corruption en France. Il ne s’agit encore que d’un mince verni de technocrates idéologisés ou tout est vermoulu ?
Claude Janvier : Nous évoquons le cas de ce que l’on désigne par Big Pharma car dans le cas d’une pandémie ce sont surtout les sociétés transnationales de la pharmacie qui sont concernées. En réalité, au-travers de Big Pharma c’est tout un système qui est en cause. C’est celui d’une oligarchie financière omniprésente dans les coulisses du pouvoir et qui se sert de l’État pour satisfaire ses objectifs d’appropriation de « nouveaux territoires économiques » par tous moyens, de la corruption de décideurs à la guerre.
Nous consacrons plusieurs chapitres à cette question pour expliquer comment des « assassins financiers » préparent le lit des sociétés transnationales et comment l’Union « européenne » leur sert de relais pour opérer la déréglementation financière, économique et sociale dont ces sociétés transnationales ont besoin. Un exemple pour illustrer les dégâts de cette politique : dans le secteur de la Santé, au nom de « la liberté des entreprises », entre 2011 et 2018, la Commission européenne a recommandé à 63 reprises aux États membres de privatiser des pans entiers du secteur de la santé publique et de réduire de plusieurs milliards d’euros les dépenses publiques en matière de santé.
Résultat de cette politique : aujourd’hui 7 Français sur 10 reportent des soins ou renoncent à se soigner soit par faute de moyens financiers, soit en raison de délais d’attente trop longs ou encore de pouvoir accéder à un spécialiste. On peut effectivement dire que tout est vermoulu par le fait que dès ses origines l’organisation des « États-Unis d’Europe » a été conçue pour favoriser l’hégémonie des États-Unis. Ce diktat de Washington pour imposer son système politique et économique se réalise de diverses manières. Mais c’est surtout l’intense activité des lobbies anglo-saxons dans les centres de pouvoir de l’Union « européenne » et des États qui permet à ces sociétés de prendre des positions hégémoniques.
Le cas des vaccins contre la Covid-19 en est un exemple dramatique. Ces sociétés savent que leurs vaccins pourraient présenter d’éventuels dangers. Elles n’ont pu encore identifier ceux-ci car, comme le rappelle le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), il faut plusieurs années d’observation pour avoir la preuve de l’efficacité du vaccin sur le terrain et bien connaître ses effets secondaires. Preuve en est qu’elles se gardent bien aujourd’hui d’en garantir l’efficacité complète comme la sûreté. Mais, comme elles veulent vendre massivement et rapidement ceux-ci pour réaliser des milliards de profits en profitant du climat de peur dans l’opinion publique, elles cherchent a être déresponsabilisées des effets secondaires qu’ils pourraient provoquer. Pour échapper à toute éventuelle poursuite judiciaire, elles ont traité avec la Commission européenne afin de dégager leur responsabilité des conséquences de ces possibles effets secondaires.
Ce seront les États de l’Union « européenne » qui prendront en charge à leur place les indemnisations financières de personnes qui seraient atteintes par ces effets secondaires susceptibles de causer, comme cela a été mis en évidence avec d’autres médicaments, de graves préjudices physiques et même la mort dans certains cas.
Pourquoi focaliser le titre sur le président français, n’est-ce pas réduire le problème à une personnalité qui ne semble pas forcément être plus qu’un acteur parmi d’autres ?
Jean-Loup Izambert : Le président Macron est le premier représentant de l’État français qui conduit sa politique avec son Premier ministre et son gouvernement. Il est présent au sein du premier cercle du pouvoir politique français depuis l’année 2012.
Il y a exercé différentes responsabilités comme Secrétaire général adjoint du cabinet du président Hollande, puis comme ministre de l’Économie du gouvernement Valls et a été à l’initiative de différentes lois avec d’autres ministres pour privatiser des pans entiers de l’économie. Par ailleurs, il est un partisan de l’Union « européenne » et un atlantiste qui engage la France dans les aventures militaires de Washington. Il continue aujourd’hui la politique atlantiste menée par ses prédécesseurs et est à ce double titre l’un des principaux responsables de la crise sanitaire qui s’ajoute à la crise économique et financière dans laquelle il a également une part de responsabilité.
Il est donc l’acteur essentiel de la politique que connaît la France en amont et au moment de la pandémie même s’il n’est pas le seul responsable, loin de là, des désastres provoqués par ses deux Premiers ministres, leurs ministres de la Santé et de l’Économie et de nombreux hauts fonctionnaires à la tête de diverses administrations. Cela étant dit, il a été élu en mai 2017 par une minorité de Français mais une majorité de votants. En conséquence ceux qui ont appelé à voter pour lui et voté pour lui sont mal placés pour le critiquer aujourd’hui d’autant que chacun pouvait alors juger de son action dans ses précédentes responsabilités. Il n’est bien sûr pas le seul en cause comme nous le montrons dans « Le virus et le président ».
De part les sources et les termes choisis, le livre a un souffle que je qualifierai presque de marxiste ? Ce livre a été écrit dans l’élan de cette « crise » sanitaire ou était-il déjà en gestation sous cette forme, cette crise n’étant que la dernière en date d’une situation déjà profondément enracinée et le prétexte pour vous pour cette critique de fond ?
Claude Janvier : Il n’est nul besoin d’être marxiste pour constater les faits que nous rapportons en cherchant à les expliquer et en montrant ce qui se cache derrière certains d’entre eux. Nous avions déjà procédé à l’analyse des conséquences de la crise économique et financière pour l’un des autres ouvrages auquel nous travaillons. Cette crise sanitaire ne résulte pas de la virulence du virus SRAS-CoV-2 mais de la situation catastrophique du système de santé publique. Elle vient se greffer sur la crise économique et financière en ajoutant du malheur au malheur. Comme nous le montrons dans le chapitre intitulé Camouflage, le pouvoir politique utilise la crise sanitaire dont il est responsable pour lui faire porter la responsabilité de la crise économique et financière dont il est également responsable par sa politique. Bien avant que n’apparaisse le SRAS-CoV-2, les grands propriétaires privés de la finance et de l’économie profitaient de plus de 200 milliards de dollars annuels de fonds publics et d’exonérations fiscales et sociales de toutes sortes pour moderniser l’outil de travail – qu’ils délocalisent –, préserver l’emploi – qu’ils assassinent –, fermant des entreprises rentables comme nous en donnons l’exemple.
Ce n’est pas la Covid-19 qui est responsable du fait que la France soit devenue l’un des pays les moins industrialisés d’Europe. Le secteur industriel ne représentait déjà plus que 11% de son activité économique bien avant la pandémie du SRAS-CoV-2. Comme vous le dites justement, la crise économique et financière était déjà « profondément enracinée ». C’est aussi pourquoi quand le président Macron déclare qu’il veut « reconstruire une économie forte et souveraine » après avoir contribué durant des années à la détruire et à la rendre dépendante nous disons que c’est un peu comme si une dinde voulait fêter Noël. Ou alors il doit faire procéder à la nationalisation de la société Alstom pour lui redonner sa splendeur déchue après qu’il l’ait abandonnée à la société US General Electric…
Le virus et le président, Jean-Loup Izambert et Claude Janvier, IS édition. Pour commander ce livre, cliquez ici.
CLAUDE JANVIER, ESSAYISTE, NOUS PARLE DU LIVRE « LE VIRUS ET LE PRÉSIDENT ».
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