Italia si fa da sè ! Enfin presque…
par Jacques Borde.
L’arrivée au pouvoir des triumviri Conte, Di Maio & Salvini, aura été la surprise de l’été. Bonne pour les uns, catastrophique pour les autres. Il a semblé utile à Jean Cuny de nous éclairer sur la chose. D’autant que, contrairement aux fantasmes de certains, l’arrivée au pouvoir de 5Stelle, de la Lega & de leurs alliés s’est nécessairement faite dans un environnement géostratégique où l’ami américain, n’est, par habitude & poids de l’Histoire, jamais bien loin…
Quelque part, l’arrivée au pouvoir du nouveau gouvernement italien – l’administration Conte, pour êtres dans les clous de la légalité géopolitique de la Botte – est aussi une des conséquences de la remise en cause de l’Accord sur le nucléaire iranien par le président américain, Donald J. Trump.
En janvier dernier, Rome avait signé avec Téhéran une série de protocoles d’accord pour 27 milliards d’Euros avec l’Iran dans les domaines des infrastructures, des chemins de fer, de l’énergie et de la pétrochimie.
Dans ce bouleversement, il semble que les élites économiques italiennes se soient appuyées sur la révolte populaire pour mener des négociations, de très haut niveau, avec l’hêgêmon étasunien.
Négociations ayant débouché sur une « patente » américaine pour défendre en retour les intérêts stratégiques italiens sur le front de l’UE. Ce que, visiblement, a été incapable d’obtenir le président français, Emmanuel Macron.
Ces tractations (sic) expliqueraient, pour partie, le blocage d’une coalition M5S-PD par le secrétaire démissionnaire et ancien président du Conseil, Matteo Renzi, puis la levée du veto par Silvio Berlusconi, les deux décisions ouvrant la voie du passage éclair d’un « gouvernement technique » à l’alliance entre Populistes et Souverainistes.
L’aval trumpien, tout a un prix, explique également l’apparition en bonne place dans le nouveau gouvernement de membres du Comité exécutif de l’Aspen Institute Italia.
Entité qu’il faut comprendre comme la tour de contrôle de l’influence (sic) étasunienne sur la Péninsule avec, dans des ministères stratégique, des personnalités comme l’économiste eurosceptique Paolo Savona, ancien directeur général de la Confédération générale de l’industrie italienne (Cofindustria) puis président de plusieurs banques (Banca di Credito Sardo, Banca Nazionale del Lavoro, Banca di Roma) au poste de ministre des Affaires européennes ; et l’avocat Enzo Moavero Milanesi, bras droit de Mario Monti, au ministère des Affaires étrangères.
Cela pourra choquer certains de nos lecteurs peu familiers de la vie politique italienne. Mais, au sein des Nationaux, Nationalistes, Populistes, Eurosceptiques et Souverainistes italiens (l’actuel camp des vainqueurs italien), le tropisme pour la chose atlantique, entendez là des liens très forts avec l’OTAN et l’hêgêmon étasunien, a toujours été dominant. Et en tout cas, plus prégnant qu’au sein des droites françaises, marquées qu’elle en conviennent ou non, par ce que furent les décisions de de Gaulle vis-à-vis de l’organisation militaire de l’OTAN et de Washington.
Également, deux choses à prendre en compte :
Primo. Il n’existera jamais à Rome l’équivalent de quelque-chose d’aussi dogmatiquela politique arabe de la France.
Secundo. En France, si les droites surent s’imprégner – et surtout faire commerce, tout se vend, de cette politique arabe (sic) – en Italie, ce fut, surtout la Democrazia Cristiana1 et le Partito Socialista Italiano (PSI)2 et son primus inter pares, Benedetto Craxi, dit Bettino Craxi3, qui furent les acteurs d’une diplomatie plus tournée vers le monde arabe.
En ces temps, puis en ceux plus lourds, des années de plomb, la droite nationale parlementaire italienne – du Movimento sociale italiano-Destra nazionale (MSI-DN)4 à l’Alleanza nazionale (AN)5 de Gianfranco Fini, dans sa majorité – marcha toujours dans les pas d’un Atlantisme assumé et de bon aloi.
Sur, ce point, l’administration Conte – et ses deux autres triumviri, le vice-président du Conseil & ministre du Développement économique, du Travail & des Politiques sociales, Luigi Di Maio, et le vice-président du Conseil & ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini6, ne font que reprendre une tradition qui, certes, surprendra certains mais est tout sauf une surprise.
Notes
1 Ou Démocratie chrétienne (DC), parfois surnommé la Baleine Blanche.
2 Ou Parti socialiste italien.
3 Mis en cause dans l’opération Mani pulite (Mains propres), en 1992, Craxi renonce à diriger le PSI en 1993 et s’enfuit un an plus tard en Tunisie, où il meurt en 2000.
4 Ou Mouvement social italien–Droite nationale.
5 Ou Alliance nationale.
6 Par ailleurs, vice-président du groupe Europe des nations & des libertés.
Article paru sur le site VoxNr.
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