7 octobre 2018

L’Afrique dans tous ses états

Par Euro Libertes

Préface d’Alain Sanders au livre de Jean-Caude Rolinat La Bombe africaine et ses fragmentations (éditions Dualpha).

Dès qu’il le peut, Jean-Claude Rolinat boucle sa valise et part en voyage. Pour le plaisir de voyager, bien sûr. Mais pas seule­ment. Car il n’est pas rare qu’il tire parti de ses déplacements – presque des voyages d’étude, comme on disait naguère – pour jeter sur le papier ses observations, ses dé­cou­­vertes, ses questionnements. Et au bout du compte ? Eh bien ! ça devient un livre.

Pour le coup, avec celui-là, c’est à tout un continent qu’il s’attaque (à tous les sens du terme) : l’Afrique ! Du nord au sud et d’est en ouest. L’Afrique dans tous ses états. Je ne suis pas sûr qu’il ait visité tous les pays dont il parle dans ce volumineux ouvrage de près de 600 pages, à la (dé)mesure du continent étudié. Mais il en connaît un bon nom­bre, dont l’Afrique du Sud à laquelle il a consacré une étude par le passé. Dans ce nouvel opus, il n’est pas question de tourisme.

Son titre, La Bombe africaine et ses fragmentations, le dit à l’évidence.

Avec malice, l’auteur signale (au cas où l’on aurait cru autre chose, mauvais esprits que nous sommes) que cette bombe n’est ni sexuelle (dommage…), ni atomique (heureusement…), ni numérique (quésako ?), mais démographique : et c’est là, toute plaisanterie mise à part, qu’on entre dans le dur. Il y a quelques années, Roger Holeindre signait un brûlot intitulé Les Sanglots de l’homme blanc commencent à me fatiguer (Atelier Fol’Fer, 2010). Inutile de dire que ces lamentations leucodermes fatiguent aussi Jean-Claude Rolinat.

S’il veut bien admettre que la colonisation de l’Afrique par les puissances euro­péennes n’a pas toujours été exemplaire, comme c’est d’ailleurs le cas pour toutes les entreprises humaines, il refuse de se battre la coulpe en permanence et de se couvrir la tête de cendres. Une bombe démographique, l’Afrique ? C’est rien de le dire… Et cela devient tellement évident que, lors du colloque de l’Institut géopolitique des populations, qui n’est pas une officine réac, la plupart des intervenants ont fait part de leurs préoccu­pa­tions (litote…).

Avec ce constat d’un des organisateurs du colloque, Yves-Marie Laulan : « Hier l’Afrique fascinait, aujour­d’hui elle effraie, moins pour ce qu’elle est que pour ce qu’elle pourrait devenir. »

Jean-Claude Rolinat rappelle – et démontre, chiffres à l’appui – que « l’Afrique est un continent jeune ». Quelques-uns de ces chiffres justement : au sud du Sahara, 40 % de la population a moins de 15 ans. Ces jeunes très jeunes vivent dans des pays qui, à de rares exceptions qui se comptent sur les doigts de la main d’un manchot, sont laminés par le chômage, la corruption, la guerre, les affrontements ethniques, la famine, les maladies endémiques, la drogue, la prostitution, la criminalité, etc.

Or, mondialisation oblige, ces jeunes très jeunes n’ignorent rien de la vie dans les pays occidentaux qui les font rêver. Sans compter, les « frères », les « oncles », les « cousins » qui, installés dans ces « pays de cocagne », en remettent une couche pour se faire mousser. Dans la moindre petite case, le plus minuscule gourbi du petit bled le plus perdu du fin fond de la brousse, on sait qu’il suffit de passer en France (pour ne prendre que cet exemple qui nous concerne au premier chef), par tous les moyens possibles, by hook and by crook, pour être intégralement pris en charge. Logé, nourri, soigné.

Avec, le cas échéant, histoire de pallier les aléas du quotidien, un pécule que, même en travaillant comme un damné (on n’ose plus dire « comme un Nègre »), on ne toucherait pas en toute une vie d’homme « au pays »… Le choix est vite fait ? C’est humain. C’est pour cela que ce ne sont pas ces miséreux qui sont responsables de quoi que ce soit, mais les criminels qui programment cet envahissement tsunamesque. En exergue de son ouvrage, Jean-Claude Rolinat, qui a encore des illusions quant à une Europe historique (dont il ne reste que des clopinettes), écrit : « Il faut monter une garde vigilante et im­pla­cable aux créneaux de la forteresse Europe et, en même temps, com­me dirait l’autre, créer des conditions favorables, dans les pays de départ, pour que ces murailles deviennent, à terme, inutiles. »

Le problème, c’est que la forteresse Europe tient plutôt d’une construction Lego que d’une citadelle à la Vauban.

Jadis, la déesse Europe, fille du roi de Tyr, se faisait enlever par Zeus et lui donnait de beaux enfants. Aujourd’hui, elle sert de champ d’épandage à des violeurs venus d’ailleurs… L’Afrique noire compte – au moins – 1,3 milliard d’habitants. On en annonce – au moins – 2,50 milliards en 2050. Avec des États mammouths comme le Nigeria (près de 200 millions d’habitants déjà) ou la République démocratique du Congo (l’ex-Zaïre).

Et pendant ce temps ? « Pour un Européen de 50 ans, on comptera trois Africains de moins de 30 ans, écrit Jean-Claude Rolinat. Comme le trop-plein méridional se déversera sur le vide septentrional relatif de la planète, le scénario alarmiste du grand remplacement sera en passe d’être réalisé. »

Les Blancs, une espèce en voie de disparition ? Il ne faut pas pécher contre l’espérance. N’empêche… N’empêche que, dans le passé, des peuples dominants et hautement civilisés ont comme disparu dans le temps et dans l’espace. Quid des Cimmériens, des Étrusques, des Hittites, des Minoens, des Mycéniens, des Nabatéens, des Bactriens, des Parthes, des Curoniens, des Mitanniens, des Mèdes, des Sicules, des Elamites ? Sans compter que l’on n’a plus beaucoup de traces des Thraces…

Bonne occasion de donner, dans son intégralité (il est souvent réduit à une citation tronquée), le texte de Paul Valéry dans La Crise de l’esprit (1919) : « Nous autres, civilisations, nous savons main­tenant que nous sommes mortelles. Nous avions entendu parler de mondes disparus tout entiers, d’empires coulés à pic avec tous leurs hommes et tous leurs engins ; descendus au fond inexplorable des siècles avec leurs dieux et leurs lois, leurs académies et leurs sciences pures et appliquées, avec leurs grammaires, leurs dictionnaires, leurs classiques, leurs romantiques et leurs symbolistes, leurs critiques et les critiques de leurs critiques. Nous savions bien que toute la terre appa­rente est faite de cendres, que la cendre signifie quelque chose. Nous apercevions à travers l’épaisseur de l’histoire, les fantômes d’im­menses navires qui furent chargés de richesse et d’esprit. Nous ne pou­vions pas les compter. Mais ces naufrages, après tout, n’étaient pas notre affaire. Et nous voyons maintenant que l’abîme de l’his­toire est assez grand pour tout le monde. Nous sentons qu’une civili­sa­tion a la même fragilité qu’une vie. »

Comme il sait que les Français connaissent peu ou mal leur histoire et encore moins, si faire se peut, celle de l’Afrique – on devrait d’ailleurs dire les Afriques, comme le faisait Verlaine pour évoquer Rimbaud parti en Abyssinie – Jean-Claude Rolinat fait œuvre de pédagogue. J’ai ainsi eu plaisir à lire le chapitre intitulé « Il était une fois l’AOF et l’AEF. » Comme j’avais plaisir, du CE1 au CM2, à aller chercher dans les réserves ces cartes d’Afrique, notamment, où l’empire français semblait ne pas avoir de limites.

Ces petits trésors – j’en collectionne, particulièrement les cartes anciennes du Maroc et de l’Algérie – avaient été réalisés par de sévères hussards noirs de la République à qui il n’aurait pas fallu parler de repentance, les Vidal-Lablache, Bonnefont, Castelneau, Bruley, Deffontaines et Sole Sabaris, etc.

De ces cartes restent des noms qui n’ont pas changé : Mauri­tanie, Sénégal, Guinée, Côte d’Ivoire, Togo, Tchad, Cameroun, Gabon, etc. Et d’autres qui ne sont plus que des souvenirs : Sou­dan français (Mali), Haute-Volta (Burkina Faso), Dahomey (Bénin), Oubangui-Chari (République centrafricaine). Quand on essaie de charger encore plus le fardeau de l’hom­me blanc, qui n’en peut mais ! depuis longtemps, il n’y a qu’une quest­ion à poser (ce que fait d’ailleurs Jean-Claude Roli­nat) : qu’ont-ils fait de leur indépendance ? Poser la ques­tion… Imparfaites l’Afrique occidentale française et l’Afrique équa­toriale française ? Assurément. Sauf que ces entités, protégées par le drapeau français, purent éradiquer ces vieux démons qui, de nos jours, sont revenus s’abattre sur la pauvre Afrique, plus mor­tifères que jamais.

Autre thème traité par Jean-Claude Rolinat, les guerres post-coloniales. Et notamment celle du Biafra. En 1967, dans le camp retranché de Bukavu dans l’est de l’ex-Congo belge, avec Jean Schramme, j’avais côtoyé quelques-uns de ces soldats de fortune qui, un peu plus tard, rejoindront le colonel Ojukwu et ses héroïques Ibos. Dont « Mini » Schmidt (1,5 m), un ancien de la Légion qui laissera sa vie dans ce Biafra martyr des compa­gnies pétrolières qui s’affrontèrent par pauvres bougres inter­posés. Après la guerre du Biafra (1967-1970), j’ai vécu deux ans à Yola, dans le nord-est du Nigeria, dans cette partie du pays (capitale : Maiduguri) ravagée par la secte islamiste Boko Haram.

À l’époque, il y avait à Yola une mosquée, une église catholique, un temple an­gli­can. Et j’ai même participé à l’inauguration d’un temple des Séra­phins et des Chérubins dont on m’avait demandé d’être le parrain ! Que reste-t-il de tout cela, hérité du British Raj, aujourd’hui que les États du Nord sont pour la plupart soumis à la charia ? Que sont devenues mes petites étudiantes haoussas et fulanis qui ne rêvaient que d’aller à Lagos et, de là, partir à la découverte de la Grande-Bretagne de ces « méchants » colonisateurs dont la langue permet au Nigeria, fédération ingé­ra­ble où l’on compte plusieurs dizaines d’idiomes différents, de parler parfois d’une même voix…

Pendant que je raconte et que j’évoque (comme on dit dans Les Tontons flingueurs), je me dis que vous avez compris qu’en poussant la porte du « monument » Rolinat, vous entrez dans un sacré caravansérail. Pour s’y retrouver, il faut toute la métho­do­logie de l’auteur qui s’y promène – et nous avec – comme l’entomologiste Fabre étudiant les fourmis. Rien – ou presque – ne manque à cette revue des troupes. Vous demandez le Darfour ? Voyez le chapitre « Guerres colo­nia­les et post-coloniales ».

Le génocide rwandais ? On en parle sans rien omet­tre des polémiques franco-françaises sur le sujet. La défunte Afrique noire espagnole ? On a ça en rayon. Et la Somalie, Mada­gascar, le Sénégal, la fonction d’homme d’État (à hauts ris­ques) en Afrique, etc., and son on, und so weiser, ‘iilakh, hitoshi, et même, en haoussa, da dai sauransi… à vous en donner le tournis ! Mais il faut savoir raison garder.

D’ailleurs, quasiment au terme de ce safari encyclopédique, une question – essentielle, vitale, cli­van­te (quand elle ne devrait pas l’être) – est posée : « L’im­mi­gration, une chance pour qui ? »

À question simple, ré­ponse aisée : À personne ! Accueillir toutes les misères du monde… La dignité même de ces peuples, transformés en loqueteux mendiants dans nos villes, commanderait qu’ils se prennent en main. Chez eux. Pour eux. Pour les leurs. Pour leur pays. Pour n’être pas une charge – et à la charge – de pays européens qui sont au bout. Qui sont à bout. Un exemple de ces paradoxes indécents ?

Mamouda Gassama, le Spiderman que tout le monde a vu (le seul qu’on n’a pas vu, c’est le gamin qu’il est supposé avoir sauvé…) arracher à la mort un garçonnet de 4 ans accroché à son balcon comme une moule à son rocher. Il a été naturalisé franchouille, fêté, encensé, décoré, accueilli en héros dans le monde entier. Et d’abord au Mali, son pays d’ori­gine. Comment se fait-il que personne – et surtout pas Macron qui l’a reçu à l’Élysée – ne lui ait posé cette question : « Vous êtes jeune, en bonne santé, sportif. Pourquoi viviez-vous comme un clodo clandestin en France plutôt que d’aller mettre vos belles qualités au service de votre pays menacé par l’islamisme, ce Mali, où meurent des soldats français pendant que vous faites l’acro­bate à Paris ? »

Vous me direz peut-être qu’on s’éloigne de La Bombe africaine de l’ami Rolinat… Au contraire ! On est en plein dans le sujet. Une déferlante. Une bombe. Et ses fragmentations. On disait jadis (René Dumont en 1962) : l’Afrique noire est mal partie. Sans doute. Mais elle est quand même bien arrivée.

Chez nous. Et massivement. Dans un pays en pleine forme, ce serait déjà insupportable (à tous les sens du terme). Mais dans un pays comme le nôtre, vieillissant, moralement décadent, politiquement impuissant et complice, c’est une catastrophe. Et une disparition programmée. À ce titre, car l’avenir n’est écrit nulle part, le travail de Jean-Claude Rolinat mérite d’être lu, médité, diffusé. Au cas où… Alain Sanders est l’auteur de près de 100 ouvrages, re­cueils de poésies, théâtre, romans, essais, bandes dessi­nées, repor­ta­ges. Journaliste au quoti­dien Présent depuis 1982, ce Grand reporter assurera des reportages notam­ment au Liban, au Honduras, au Nicaragua, en Thaï­lan­de, au Cam­­bodge, en Nouvelle-Calédonie, en Croa­tie et en Bosnie.

La Bombe africaine et ses fragmentations, Jean-Claude Rolinat, préface d’Alain Sanders, éditions Dualpha, 570 pages, 37 euros. Pour commander ce livre, cliquez ici.

Jean-Caude Rolinat, La Bombe africaine et ses fragmentations (éditions Dualpha).

Jean-Caude Rolinat, La Bombe africaine et ses fragmentations (éditions Dualpha).

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