3 février 2016

Écoutes américaines : l’outrage plutôt que de le déshonneur…

Par Philippe Randa

Ainsi donc, les États-Unis d’Amérique ont été pris, non pas la main dans le pot de confiture, mais les oreilles collées aux conversations – et jusqu’aux plus personnelles – de nos dirigeants. Et ce n’est pas peu dire que leurs oreilles sont grandes, puisqu’elles commettent leur indélicatesse aux quatre coins du Monde.

Pris ? Non, repris… car l’outrage n’est pas nouveau et n’avaient-ils pas été sévèrement tancés dans le passé par leurs victimes… enfin, leurs Alliés, n’est-ce pas ?… qui leur avaient adressé, telle une maîtres­se d’école à un élève à la conduite inappropriée, une sévère admonestation, valant avertissement de renvoi de l’établissement… enfin, de rupture de relations diplomatiques, n’est-ce pas ?… mais, semble-t-il, sans préciser qu’il s’agissait d’un Premier avertissement – comme il est d’usage dans nos établissements scolaires hexagonaux –, suivi en cas de récidive d’un deuxième avant une éventuelle sanction, soit un ren­voi définitif… enfin, une rupture diplomatique, n’est-ce pas ?… si la menace n’était pas prise au sérieux. À l’évidence, elle ne l’a pas été…

L’Oncle Sam, fidèle à sa boulimie de domination et à ses pathologies, a continué ses vilaines pratiques qui ne datent pas d’hier, mais, comme le rappelle Éric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement dans un entretien au Figaro : « Nous savons que les Américains nous écoutent de manière constante depuis le Général De Gaulle, même s’il y a eu des variations. Quand François Mitterrand a été élu, en 1981, les communistes ont fait leur entrée au gouvernement. Toutes les écoutes étaient dirigées vers la France, pays allié de l’Otan dans lequel des communistes arrivaient au pouvoir ! Nous avons également été particulièrement écoutés à partir de 2003 et notre refus de nous engager dans la guerre en Irak. Avec Nicolas Sarkozy, la France est pourtant revenue dans le giron de l’Otan et reste avec François Hollande plus proche des États-Unis qu’elle ne l’était par le passé. Ce qui n’empêche pas les écoutes. »

L’hyperpuissante Amérique du nord a-t-elle d’ailleurs à rendre quel­que compte de loyauté, sinon de courtoisie, à ceux qui se considèrent comme ses Alliés, alors qu’ils ne sont pour elle que de simples vassaux qu’il est toujours prudent de tenir à l’œil, ne sait-on jamais…

Le Président Barack Obama s’est certes fendu de quelques mots d’excuses pour la bonne forme – pour ce que cela lui coûte ! – et les « Alliés » devront bien s’en contenter, finalement, malgré des déclarations de dames patronnesses outragées d’avoir subi ces derniers outrages d’indiscrétions – quelques caresses croupières ne sont pas pénétration physique, tout de même !

D’ailleurs, on peut s’interroger, tout de même, sur la réalité de leurs indignations… Angela Merkel, tout comme les présidents Chi­rac, Sarkozy et Hollande, pouvaient-ils vraiment ignorer ces vi­lai­nes manières commises à leurs dépens ? On ose espérer que non… Au­cune surprise pour eux, donc ! mais l’Affaire, forcément, de­vient plus gênante quand elle est connue de leur Opinion pu­blique qui, tout de même, juge que c’est parfaitement intolérable – entre « alliés », ce sont des choses qui ne se font pas, croyait-on…

C’est, bien davantage que d’avoir subi l’outrage ou de continuer à l’endurer, que de n’avoir su continuer à le cacher, qui chagrinent nos dirigeants… qui sont finalement comme ces victimes de violences sexuelles qui préfèrent taire le crime et le laisser impuni que d’avoir à en assumer la honte… Quitte à continuer à subir l’outrage plutôt que d’assumer le déshonneur.

Pour nos gouvernants, l’un n’empêche plus l’autre !

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