7 janvier 2017

Le grand marché de la dette a commencé…

Par Olivier Pichon

La zone euro va devoir trouver sur les marchés environ 900 milliards d’euros en 2017 : « Normal ! », répondront les techniciens ; la dette, malgré le caractère péjoratif du terme, c’est de l’économie tout simplement puisqu’il y a des besoins de financements (États, entreprises) et en face des capacités de financement (ménages, institutions financières).

Ce schéma quelque peu scolaire souffre quelques remarques néanmoins :

La dette pour quoi faire ? Si c’est pour payer une partie des dettes anciennes, ce n’est guère profitable ; si c’est pour faire fonctionner des bureaucraties lourdes qui asservissent les peuples européens, on s’en passerait volontiers ; si c’est pour des investissements d’avenir, certes oui, mais la pratique des facilités monétaires de M. Draghi favorise la hausse des prix des actifs existants, mais pas les actifs à venir.

Se goinfrer de dettes ?

La zone euro va en effet emprunter plus que l’an passé, l’Italie en tête ; avec 250 à 280 milliards à lever sur les marchés, la sœur latine fera presque autant avec 200 milliards d’euros d’obligations, notre pays le fera par le truchement de l’Agence France Trésor – un nom charmant n’est-ce pas ? –, car les finances publiques endettées déjà à la hauteur du PIB ne peuvent évidemment solder les pics d’emprunts contractés dans les années précédentes. L’Allemagne veut lever 160 milliards, l’Espagne 120, mais, surprise ! c’est interdit à la Grèce, on se demande bien pourquoi…

Cette frénésie de début d’année s’explique par plusieurs raisons : une remontée probable des taux s’annonçant, il vaut mieux se couvrir à taux bas, hic et nunc.

Fatale remontée des taux

L’élection de Donald Trump y étant pour une part puisque l’annonce des dépenses qu’il a prévues au bénéfice de la relance américaine s’est conjuguée avec la hausse des taux de la FED annoncée par Madame Jelen. Même en Europe, Mario Draghi semble vouloir réduire les achats de dette, le fameux QE facilités monétaires, de 80 milliards à 60 milliards par mois (!) ; ainsi le taux à dix ans pour la France s’est tendu de 30 points depuis novembre. Le problème global étant que la demande d’emprunts des « zinzins » diminue, alors que l’offre d’emprunts d’État continue de croître.

Une bulle obligataire

Les taux bas ont provoqué le gonflement du stock d’obligations, mais celles-ci sont vendables en fonction des taux d’intérêt si d’aventure ces taux se mettaient à monter. Les détenteurs de la bulle en question se débarrasseraient de ces obligations à vil taux pour en acquérir à meilleur rendement.

Aux États-Unis, par exemple, la bulle frisant les 50 000 milliards de $ – depuis longtemps la Chine s’étant portée acquéreur des emprunts d’État US (les bons du trésor) – que se passerait-il si elle renonçait à en acheter ? Un krach obligataire qui emporterait avec lui les assurances vie.

La dette éternelle

L’Italie bat tous les records en matière de dette (après les Américains) en volume et en durée. Elle a contracté des emprunts à 100 ans ! Mais on voit fréquemment la France contracter des emprunts à 40/50 ans pour compenser les taux faibles (une rente longue). Les générations qui viennent ne nous diront pas merci.

Augmentation du risque politique

Traditionnellement, pour la finance, le risque politique était dans le Tiers-monde – insolvabilité et rééchelonnement de la dette –, puis il a gagné les pays émergents (le Brésil, par exemple)… Voilà maintenant que le risque politique s’installe dans le monde occidental.

Déjà, Donald Trump a fait bouger les taux, le « non » italien et le Brexit y ont aussi contribué, mais les incertitudes liées aux élections aux Pays-Bas (mars), en France (avril-mai), en Allemagne (septembre), conduisent les emprunteurs à se dépêcher d’emprunter aujourd’hui par crainte du risque… qui se nomme populisme.

Une nouveauté : on découvre que ce concept politique a aussi une dimension économique. Pour la France, l’impossibilité de vendre sa dette, donc de l’augmenter pour se payer un train de vie que nous ne sommes pas capables de financer par nos propres forces.

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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

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