22 juillet 2016

Un été en May pour le Royaume-Uni

Par Aristide Leucate

Finalement, David Cameron n’aura pas attendu octobre pour se faire remplacer au 10 Downing Street. C’est donc le ministre de l’Intérieur, Theresa May qui, le 13 juillet, a été nommée par la Reine, Premier ministre du Royaume-Uni. Le siège devait lui revenir quasi naturellement, après que Boris Johnson, le tonitruant chef de file du « Brexit » a déclaré forfait au lendemain du référendum, à l’instar de Andrea Leadsom, obscure secrétaire d’État à l’énergie (tout aussi favorable à la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne et ayant désormais la charge de l’Environnement dans le nouveau Cabinet), sans parler de Michael Gove, l’ancien ministre de la Justice qui ne l’a guère emporté au sein du Parti Tories.

Les médias « mainstream », ne voyant guère plus loin que le bout de leur lorgnette myope, se sont empressés de la comparer à Margaret Thatcher, en l’affublant, faute de mieux pour l’instant, du qualificatif de « Dame de fer » attribué, en son temps, à cette dernière.

On ne s’appesantira pas sur la biographie de Madame May, sauf à signaler que sa carrière politique chez les Conservateurs débute au mitan des années 1980, ce qui en fait un personnage central blanchi sous le harnais de la vie politique britannique.

Ses positions peu politiquement correctes sur l’immigration ou la sécurité intérieure en font la cible privilégiée des associations de défense des droits de l’homme qui brocardent, à l’envi, son manque d’humanité et d’empathie. Ainsi, En mai 2015, en pleine crise migratoire en Europe, rejette-t-elle la proposition de quotas obligatoires de réfugiés, considérant que l’aide humanitaire doit être exclusivement tournée vers les civils vivant dans les zones de guerre et les camps de réfugiés et refusée, sans état d’âme à « ceux qui sont assez forts et riches pour venir en Europe »… même si sa politique de réduction de l’immigration à 100 000 personnes par an est plus que mitigée avec près de 300 000 immigrants ayant afflué vers le Royaume-Uni dans les 12 mois précédant septembre 2014.

Mais cette intransigeance proverbiale ne s’étend pas aux questions sociétales, l’intéressée se réclamant d’un féminisme tel qu’on le connaît outre-Manche (comme outre-Atlantique), c’est-à-dire mâtiné d’hygiénisme et de puritanisme. En 2013, elle votera la légalisation du « mariage » homosexuel.

Quoi qu’il en soit, celle qui s’est engagée à « construire un pays qui s’occupe de tous ses citoyens, pas d’une poignée de privilégiés », notamment par la mise en place d’un « programme radical de réformes sociales » devra conduire la sortie effective de son pays des institutions bruxelloises, tout en ménageant l’Écosse qui a massivement rejeté le Brexit lors du référendum du 24 juin dernier.

Bien qu’ayant soutenu le « Remain » du bout des lèvres, moins par fidélité à l’ancien Premier ministre que par discipline gouvernementale, Theresa May apparaît, sans doute, comme la femme de la situation, son euroscepticisme étant peut-être beaucoup moins anxiogène que celui de Boris Johnson. Mais le fait que celui-ci ait hérité du portefeuille, régalien entre tous, des Affaires étrangères, n’est pas de nature, non plus, à tranquilliser les chancelleries européennes. Cette nomination est vraisemblablement la meilleure des décisions tactiques de Theresa May qui, ce faisant, conforte autant ses positions auprès de l’électorat britannique (notamment celui qui s’est prononcé en faveur du « Brexit ») que sa stature de femme d’État, de ce côté-ci du Channel. Affaire à suivre.

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Philippe Randa,
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