29 juin 2017

Rompre le jeûne pour mieux rompre la glace

Par Jean-Pierre Brun

Le Ramadan 2017 aura permis à un président de la République française de partager pour la première fois un dîner de rupture du jeûne avec les membres les plus importants de l’instance représentative du culte musulman. Cet événement ne pouvait me laisser insensible. Tout au long de mon enfance et de mon adolescence, j’avais en effet partagé avec mes camarades de classe ou mes voisins ces instants festifs que déclenchait le traditionnel coup de canon qui répercutait son écho dans l’impressionnante gorge qui traversait Constantine. C’est sans doute ce qui occasionna le rêve que j’ai fait la nuit suivante…

À l’issue du repas auquel j’avais été convié par la grâce d’un djinn anonyme, autour d’un alléchant plateau de douceurs orientales propices à l’instauration d’un climat détendu et par conséquent à des échanges beaucoup plus spontanés, la conversation s’était déplacée sur un terrain que bon nombre d’observateurs auraient pourtant qualifié de glissant.

Avec la curiosité du néophyte, notre jeune Président faisait part de la crainte que lui causaient certaines sourates du Coran dont une lecture littérale pouvait engendrer des effets certainement pervers. Sa connaissance du Saint Livre et son souci de l’éventuelle application de ses préceptes à la vie politique française ne manquaient d’ailleurs pas de m’étonner.

Il s’inquiéta tout d’abord de l’interprétation du verset 40 de la sourate 8 et de son impact sur les partis politiques ou le gouvernement dont la plupart des membres étaient athées ou francs-maçons. En effet, concernant les incrédules et les impies ne leur imposait-elle pas un traitement des plus rudes : « Combattez-les jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de schisme et que la religion sainte triomphe universellement ». Le verset 74 de la sourate 9 n’était d’ailleurs guère plus rassurant : « Combats les incrédules et les impies. Traite-les avec rigueur. L’enfer sera leur affreuse demeure. »

Sur ce dernier point, un ouléma au sourire plus mielleux que le zlabia qu’il dégustait, lui fit remarquer doctement que, étant impies par conviction, ils ne pouvaient pas croire à l’enfer et que, de ce fait, ils ne manqueraient pas de s’en tamponner le coquillard avec une plume de hareng saur (image audacieuse de conteurs arabes empruntée aux Vikings lors de leur remontée du Guadalquivir jusqu’à Séville en 844).

À peine rassuré, notre élégant chef de l’État avait souligné que dans l’attelage très républicain qu’il était tenu de diriger et d’où avaient été progressivement expulsés, au nom du progrès, bon nombre de préceptes moraux concernant la famille et notamment la fidélité conjugale et l’homosexualité, ou encore la probité dans l’exercice de son devoir d’État, le verset 29 de la sourate 29 risquait de déclencher un vent de panique chez des citoyens on ne peut plus libérés : Combattez ceux qui ne croient pas en Dieu ni au jour dernier et ne s’interdisent pas ce que Dieu et son Envoyé ont prohibé.

Le président de l’instance l’interrompit pour lui faire remarquer fort benoîtement que l’impact du verset sur les enfants de la Fille aînée de l’Église ne devrait pas l’inquiéter outre mesure car le dialogue interreligieux instauré par la conférence des évêques de France s’était déjà employé avec un succès certain à gommer l’effet fâcheux qu’aurait pu avoir la seconde partie du verset :

« Combattez également ceux parmi les gens du livre qui ne professent pas la religion de la vérité, à moins qu’ils ne versent la capitation directement et en toute humilité. »

L’humilité n’est-elle pas une vertu tout aussi catholique que maçonnique ? Détendez-vous, Monsieur le Président.

Pour clore le chapitre, un imam distingué eut alors recours à l’argument inattaquable qui consiste à distinguer le combat spirituel du combat physique, confusion que ne manquent jamais d’entretenir les islamophobes de tout poil, et des islamistes débiles ou atteint de troubles mentaux comme le souligne d’ailleurs le plus souvent la presse française traitant des attentats commis sur le territoire national.

L’invité prestigieux en convint pour s’interroger aussitôt sur la compatibilité avec les lois de la République du verset 189 de la sourate 2 et des versets 26-27 de la sourate 71 : « Combattez vos ennemis jusqu’à ce que vous n’ayez plus à craindre la tentation et que le culte divin soit établi » et « Seigneur, ne laisse subsister sur la terre aucune famille infidèle, car si Tu en laissais, ils séduiraient Tes serviteurs et n’enfanteraient que des impies et des incrédules. »

Comment concilier ces préceptes avec la liberté de conscience ? L’islam n’est-il pas par excellence la religion de la tolérance ?

« Inch’Allah ! Si Dieu le veut ! », lui répondit l’assistance dans un bel ensemble alors que makrouds et baklawas commençaient à manquer sur le savoureux plateau de la tentation.

Un trouble parut affecter soudainement la sérénité souriante du Kennedy français. Telle une arête de brochet, le verset 62 de la sourate 8 semblait lui rester en travers de la gorge. Il s’efforça de le recracher le plus discrètement possible sans embarrasser les convives. « Unissez vos efforts, rassemblez vos chevaux, afin de jeter l’épouvante dans l’âme des ennemis de Dieu, des vôtres et de ceux que vous ignorez. Dieu les connaît. Tout ce que vous avez dépensé pour son service vous sera rendu. Vous ne serez point trompés. »

Gêné par le caractère extrême de l’injonction, il demanda fort prudemment s’il ne s’agissait pas là d’une regrettable erreur d’interprétation sinon de traduction. Il eut même recours, pour justifier son doute, à l’un des 99 qualificatifs donnés à Dieu par les Musulmans eux-mêmes : « Allah le miséricordieux ! » La miséricorde ne s’oppose-t-elle pas à la terreur ?

Là encore, dans un ensemble toujours parfait, les croyants proférèrent un « Mektoub ! C’était écrit ! » dont la sécheresse implacable eut l’effet immédiat de me réveiller.

Ne trouvant pas le sommeil, je méditai les versets 3 à 12 du chapitre V de l’Évangile selon Saint Mathieu sur « les Béatitudes » Un lecteur charitable pourrait-il m’expliquer pareil coq à l’âne ?

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Philippe Randa,
Directeur d’EuroLibertés.

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