15 avril 2020

Élargissement de l’Union européenne : la fuite en avant continue (1)

Par Paul Tormenen

En pleine pandémie du coronavirus, l’information est passée presque inaperçue : les différents gouvernements européens ont donné le 24 mars leur feu vert pour relancer le processus d’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du nord à l’Union européenne. Le véto que mettait jusqu’à maintenant la France à ces candidatures a été levé par le Président Macron, bien qu’il n’ait obtenu que de maigres concessions. Ce possible élargissement de l’Union européenne comporte pourtant plusieurs enjeux qui semblent avoir été largement occultés.

Nous y consacrons deux articles, le premier retraçant l’historique du processus d’adhésion de l’Albanie à l’Union européenne, le second détaillant trois problématiques majeures liées à la décision de l’Union européenne.

Dans le mouvement continu d’élargissement de l’Union européenne à de nouveaux pays, le cas de l’Albanie mérite une attention particulière. La relance du processus d’adhésion de ce pays à l’Union européenne est en effet un pari sur l’avenir qui paraît bien hasardeux.

La candidature de l’Albanie à l’Union européenne

L’Albanie a initialement présenté sa demande d’adhésion à l’Union européenne en 2009 (1). Depuis cette démarche, plusieurs étapes dans le processus d’adhésion ont été franchies.

Lors de la campagne pour l’élection des députés européens en mai 2019, la chef de file de la liste LREM, Nathalie Loiseau, se targuait d’avoir bloqué l’élargissement de l’Union européenne à l’Albanie et à la Macédoine du nord. Elle en faisait d’ailleurs un de ses arguments de campagne (2). Elle égratignait au passage Laurent Wauquiez sur ses revirements au sujet de la candidature de deux autres pays, la Serbie et le Monténégro : « il pense surtout que les gens n’ont pas de mémoire. »(3)

Le véto français

Dans la continuité de cette position, quatre pays dont la France mettaient leur véto au lancement des négociations en vue de l’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du nord à l’Union européenne lors d’une réunion des ministres des affaires étrangères à Luxembourg, le 15 octobre 2019 (4).

Le Président français, Emmanuel Macron, expliquait devant le Conseil européen les raisons de son opposition à l’entrée de l’Albanie dans l’Union européenne :

« Comment voulez-vous que j’explique à mes concitoyens que le deuxième pays qui demande le plus l’asile en France, ce sont des gens qui viennent d’Albanie, mais tout se passe tellement bien qu’on va ouvrir les négociations pour les faire entrer dans l’Union européenne ? Quand je ne sais pas l’expliquer aux gens, c’est qu’il y a un problème » (5).

Cinq mois plus tard, la modification par la Commission européenne de certaines conditions de l’adhésion de l’Albanie et de la Macédoine du nord à l’UE est venue à bout des réticences françaises et des autres pays qui avaient mis jusqu’à maintenant leur véto. Le 24 mars 2020, les représentants des différents pays européens décidaient à l’unanimité d’ouvrir les négociations en vue de l’adhésion de ces deux pays à l’Union européenne (6).

Le récent revirement du gouvernement français nous montre que c’est tout le « staff » LREM qui pense que les Français n’ont pas de mémoire.

Les raisons du revirement

L’accord qui permet la relance du processus d’adhésion de l’Albanie à l’U.E. comporte plusieurs mesures que doit prendre son gouvernement (7). Elles s’appuient notamment sur un rapport de la Commission européenne rendu en mai 2019, qui fait un point d’étape sur les réformes menées dans le pays et en demande l’approfondissement (8). Ces réformes concernent entre autres un financement transparent de la vie politique, une réforme du système judiciaire et la mise en place de structures spécialisées dans la lutte contre la corruption et la criminalité organisée.

La procédure d’adhésion comporte par ailleurs de nouvelles conditions, comme sa réversibilité et la possibilité de suspendre les négociations avec un pays candidat. Mais, comme nous allons le voir, ces quelques concessions minimisent certains aspects de ce possible nouvel élargissement de l’Union européenne.

Un précédent fâcheux

Le processus d’adhésion de l’Albanie à l’U.E. est donc relancé grâce à quelques concessions faites aux pays qui y étaient opposés jusqu’à maintenant. Il est utile de rappeler la capacité de la nomenklatura des institutions européennes à fermer les yeux sur certaines réalités pour rallier de nouveaux pays à l’avenir radieux du grand marché.

En 2001, l’Union européenne saluait les efforts « admirables et remarquables » en matière budgétaire du gouvernement grec, qui permettaient à ce pays d’entrer dans la zone euro. Tout à leur empressement à élargir l’U.E., les institutions européennes ignoraient le maquillage des comptes des finances publiques grecques, notamment par la banque d’affaires Goldman Sachs (9). Quelques années plus tard, le subterfuge était révélé alors que le pays était en quasi-banqueroute. Le gouvernement grec en était réduit à quémander à la Banque centrale européenne des financements pour éviter le défaut de paiement.

À quel niveau les bureaucrates européens mettront-ils le curseur pour l’adhésion de l’Albanie à l’Union européenne ? Quelques éléments de contexte peuvent être utilement rappelés pour mesurer l’étendue des enjeux. Ils feront l’objet d’un second article sur le sujet.

Notes

(1) « Pays candidats à l’adhésion à l’U.E. », Conseil européen, 2014

(2) « Quel programme pour l’Europe ? Les réponses de Nathalie Loiseau, tête de liste de LREM », Marianne, 9 mai 2019

(3) Interview de Nathalie Loiseau sur RTL le 22 mai 2019

(4) « Paris bloque l’adhésion de la Macédoine du nord et de l’Albanie », Les Échos, 15 octobre 2019

(5) « Élargissement de l’UE : Macron fait attendre l’Albanie et la Macédoine », Le Point, 18 octobre 2019

(6) « L’UE accepte d’engager les négociations d’élargissement avec la Macédoine et l’Albanie », Euractiv, 25 mars 2020

(7) « Conclusions du Conseil européen sur l’élargissement et le processus de stabilisation et d’association. République de Macédoine du nord et République d’Albanie », Conseil de l’Union européenne, 25 mars 2020

(8) « Commission staff working document. Albania 2019 report », Commission européenne, 25 mai 2019

(9) « Comment la Grèce a maquillé ses comptes depuis 1997 », Le Figaro, 7 septembre 2015

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