9 mai 2017

Introuvable Germanie

Par Pierre de Laubier

Les grandes invasions commencèrent dans la nuit du 31 décembre au 1er janvier 406, lorsque les barbares franchirent le Rhin pris par les glaces. On a ainsi l’impression que les peuples germaniques, massés sur la rive droite du fleuve, n’attendaient que l’occasion de déferler sur la malheureuse Gaule. Or, le franchissement du Rhin a bien été le début des grandes invasions en Gaule, mais la Gaule n’était pas tout l’empire.

Les envahisseurs étaient des peuples germaniques, certes. Mais dire qu’ils venaient de Germanie est un abus de langage. Malet dit que les Germains « occupaient le pays entre le Rhin et le Danube à l’ouest et au sud, la Vistule et la Baltique à l’est et au nord, soit aujourd’hui l’Allemagne, le Danemark, l’Autriche et une partie de la Hongrie ». Autrement dit, le territoire des empires centraux de 1914 ! La Russie, alliée du moment, n’est pas citée… Il décrit un pays « couvert de forêts, coupé de marécages ». C’est donner à cette contrée imaginaire, au peuplement clairsemé, une unité qu’elle n’a pas. Ces peuples, qui habitaient des régions fort éloignées les unes des autres, se comportèrent de manières très diverses.

Les Goths venaient à l’origine de Scandinavie, mais ils s’étaient établis au bord de la mer Noire, dans l’Ukraine actuelle. C’est avec eux que les grandes invasions débutèrent en 376, lorsque les Ostrogoths franchirent non pas le Rhin, mais le Danube, avec la permission de l’empereur Valens. Quant aux Wisigoths, ils longèrent la mer Noire, puis la Méditerranée, jusqu’en Provence, avant de constituer un royaume qui allait de La Rochelle à Tolède, en passant par Toulouse. Les Lombards, venus de la Baltique, étaient eux aussi originaires de Scandinavie, et ils aboutirent dans le nord de l’Italie.

Les Vandales et les Suèves étaient établis entre l’Oder et la Vistule. Les Suèves parvinrent en Italie, mais ils furent exterminés. Quant aux Vandales, ils ne firent que traverser la Gaule, puis l’Espagne, pour gagner l’Afrique et s’établir en Tunisie. Mais les Burgondes, qui venaient de la même région, s’établirent en Gaule, où ils se constituèrent un royaume qui a donné son nom à la Bourgogne. Les Alains, eux, venaient de Russie. Les Francs étaient établis en Rhénanie, mais, au lieu de déferler, ils se contentèrent de s’étendre peu à peu vers le sud, ce qu’ils avaient commencé à faire dès le milieu du IIIe siècle, quand la frontière de l’empire fut ramenée sur le Rhin. Les Alamans, venus de Bavière, franchirent le fleuve pour s’établir en Alsace, mais n’allèrent pas plus loin.

Enfin les Jutes, les Angles et les Saxons, venus du Jutland, du Schleswig et du Holstein, quittèrent le continent pour envahir la Bretagne, de l’autre côté de la Manche, tandis que les Bretons insulaires, fuyant devant eux, gagnèrent la Bretagne péninsulaire, où ils s’acclimatèrent parfaitement car c’est là que les peuples celtiques avaient été le moins romanisés.

Quand on raconte l’histoire de France sans tenir compte de ce qui se passe dans l’ensemble de l’Europe, le résultat est tendancieux. En l’occurrence, les tentatives de faire ressembler les barbares germains à l’ennemi héréditaire qu’on s’apprêtait à combattre lors de la « grande revanche » sont risibles. Ils ne ressemblaient même pas aux Germains dont parle César, lesquels, quoique établis de l’autre côté du Rhin, sont décrits comme en tout point semblables aux Celtes.

Cette chronique de l’abominable histoire de France a été diffusée sur Radio Libertés dans l’émission « Synthèse ».

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Philippe Randa,
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