25 janvier 2017

La Révolution européenne

Par Richard Dessens

Une autre Europe, oui, mais à deux conditions.

Tout d’abord, il lui faut une autre conception de l’économie. Ensuite, il lui faut admettre que le cadre des États-Nations est devenu trop étriqué pour construire une Europe puissante.

La question qui se pose à ces deux conditions se réduit à une double impossibilité si l’on veut suivre le credo des économistes libéraux qui n’admettent aucune critique de l’économie actuelle et de ses ressorts. La mondialisation interdirait toute remise en question des dogmes économiques. On les a entendus lors du Brexit… pour constater leur discrétion depuis juin dernier.

Le « chiffon rouge » de l’économie officielle propagée par nos élites, inféodées au système de l’économie financière mondialiste, fidèles à l’économie monétaire, bible de la BCE notamment, empêche toute discussion sur un nouveau système économique qui sortirait des diktats du dollar et des ordres de la toute-puissante Amérique et de ses monstres financiers, véritables tentacules d’une pieuvre dominant le monde.

La seconde impossibilité tétanisante est l’idée inouïe de la disparition des États-Nations européens. Et pourtant, d’une manière ou d’une autre, de tous les bords politiques, la question est abordée, effleurée, suggérée, même de manière subliminale, des romantiques de l’Europe de Monet jusqu’aux ultralibéraux échevelés, car les peuples européens n’y sont pas encore prêts.

Et pourtant aussi, on ne cesse de reparler du « retour » des États-Nations chez les populistes ou ceux qui pensent que le cadre « patriotique » des États modernes constitue un sauvetage possible de nos maux. Quelle régression ! Quelle vision étriquée d’une Europe véritablement moderne ! En un mot, quelle erreur héritée d’un temps révolu. La vision, à l’inverse, des ultralibéraux et de nos élites officielles, est tout aussi dangereuse pour notre avenir en nous agglomérant toujours plus à un système économique au service des intérêts anglo-saxons, et notamment américains, et paralysant pour une volonté autonome de l’Europe.

La mesure de l’économie, fondée sur un capital indépendant des réalités entrepreneuriales, la financiarisation de l’économie, le tout « marchandisation », le profit à tout prix basé sur une innovation devenue folle et toujours plus éphémère pour répondre à une concurrence toujours plus vigoureuse et vorace autant que volatile. Fuite en avant d’un système économique qui marche à grands pas vers les limites de sa perte…

Non ! de notre perte, car la considération essentielle à retenir est la disparition de l’homme dans l’économie moderne. L’homme est devenu l’esclave de l’économie, comme c’est l’homme qui doit se soumettre à l’informatique alors que c’était l’informatique qui devait, au départ, être au service de l’homme.

Lorsque Platon écrit que « c’est l’homme qui est la mesure de toute chose », il faudrait éclairer cette idée majeure en écrivant : « C’est l’homme – et non l’économie financière – qui est la mesure de toute chose ». Cela signifie faire du travail, attribut naturel de l’homme, l’étalon d’une nouvelle économie.

« L’étalon-travail » doit remplacer l’étalon financier de notre monde européen. Bouleversement des concepts économiques du XXe siècle, mais déjà abordé par de nombreux économistes dont Francis Delaisi, socialiste, journaliste à La Vie Ouvrière, mort en 1947, il y a soixante-dix ans cette année.

Son rapprochement économique avec les conceptions européennes de l’Allemagne, en 1942, lui vaudra des soucis à la Libération, lui, l’homme de gauche, l’ancien dirigeant de la Ligue des Droits de l’Homme, l’admirateur de Briand !

Et pourtant il a inspiré, dans la plus grande discrétion, de nombreux hommes politiques, économistes de l’Après-Guerre. Mais les anathèmes interdisent de défendre les idées les plus novatrices surtout lorsqu’elles sont contraires aux intérêts du vainqueur et de sa domination du monde.

Rompre avec le dollar qui représente quasiment 75 % des échanges du monde, en développant une économie indépendante de l’Europe, forte de ses 500 millions d’habitants – et encore hors Russie blanche – et de son PIB supérieur à celui des USA et de la Chine. Cette Chine, elle-même en lutte contre le « roi-dollar », et qui défend ses intérêts comme l’Europe devrait le faire au plus tôt, au risque d’être détruite par les USA et les luttes intestines médiocres de ses États-Nations « patriotes ».

Le patriotisme économique est un patriotisme européen. L’Europe est la patrie des peuples européens, de leur travail, de son économie. La mondialisation devient en réalité une régionalisation gigantesque du monde. L’Europe doit s’y affirmer comme un acteur déterminant, pas comme un avatar des USA.

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Philippe Randa,
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